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KHOUANE - 3ème partie - LA CEREMONIE DU RAPPEL DES KHOUANES


KHOUANE … ou KHUAN … ou KHWAN … (ขวัญ)

 

 

                     TROISIEME PARTIE

 

               La cérémonie du rappel des khouanes.

        (พิธีบายศรี ''baci'' ou พิธีสู่ขวัญ ''sou-khouane'')

(พิธีทำขวัญ ''tham-khouane'' - พิธีรับขวัญ''rap-khouane'')

 

 

Rappel :

 

La cérémonie du rappel des khouanes était à l'origine une pratique liée aux cultes de la nature, que rendait alors les T'aïs d'avant les Thaïs des temps bouddhistes.

 

Elle consistait à redonner à un individu la pleine possession de ses moyens physiques, intellectuels et psychologiques, même si à l'époque la psychologie restait à découvrir !...

 

Par conséquent ce culte était antérieur au bouddhisme et n'a rien à voir avec son idéologie.

 

 

L'élément important de cette cérémonie, c'est le ''phākhouane''. (พาขวัญ) C'est-à-dire le plateau d'offrandes destiné aux khouanes ; des victuailles que les participants à la cérémonie se feront un plaisir de manger pour que les khouanes puissent, par cette action, jouir des cadeaux qui leur sont destinés.

 

 

Comme à l'origine cette cérémonie n'avait rien à voir avec le bouddhisme c'est un mõkhouane, (หมอขวัญ) (Le maître de cérémonie) qui revêtu de blanc, officie.

 

En général c'est un homme d'un certain âge, capable de lire, connaissant par cœur quelques formules en pāli et sachant improviser. D'anciens bonzes, voire des bonzes peuvent tenir le rôle du mõkhouane.

 

Lors des soukhouanes très ordinaires, comme intervenir après la peur d'un enfant, les parents peuvent officier.

 

 

Parce qu'il est revêtu de blanc le mõkhouane, (หมอขวัญ) est aussi appelé phāme, (พราหมณ์) (Brahmane) c'est-à-dire brahmane.

 

 

J'ouvre ici une petite parenthèse pour signaler que les bouddhistes ont tendance, pour ne pas écrire l'habitude, de taxer de brahmaniste tout ce qui n'est pas bouddhiste.

 

Or contrairement à leurs dires ce n'est pas parce que ces rites se sont enrichis d'apports brahmanistes qu'ils sont brahmanistes. Ce sont d'abord et avant tout des rites typiquement t'aïs.

 

Ces rituels se sont d'ailleurs aussi enrichis ( ?) d'interventions bouddhistes.

 

Au Lanna, comme je l'ai déjà écrit, j'ai comme l'impression, que le bouddhisme a fait ''main basse'' sur cette cérémonie. Il semble l'avoir transformé en l'une de ses nombreuses tham-boum (ทำบุญ) (Obtenir des mérites mais aussi faire la fête) tout en conservant le rite consistant à lier une cordelette autour des poignets.

 

Comme je pense que j'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet dans d'autres chroniques, je ne m'étendrai pas davantage sur cette remarque.

 

Alors revenons-en à la cérémonie.

 

 

L'avant cérémonie :

 

L'avant-cérémonie commence bien souvent par une série de prières dites par cinq bonzes. Lors de cette intervention bouddhiste ces moines consacrent de l'eau, l'eau lustrale (นำนม) (Name-nome) (*) et en aspergent les personnes présentes.

 

 

(*) A l'origine l'eau lustrale était un mélange des eaux provenant des différentes rivières coulant dans la région.

 

 

 

Un autre rite facultatif, qui suit ces prières, c'est la circumambulation des petits cierges ou  vène-viène-thiane (เวรเวียนเทียน) (Effacer les fautes en tournant en rond avec des cierges) ou encore rouam-viène-thiane. (ร่วมเวียนเทียน) (Prendre part à la ronde des cierges)

 

Ce rite consiste à faire tourner autour de celui qui est au centre de la cérémonie, cinq petits cierges plantés dans un bol de riz. Il s'agirait d'un rite de purification.

 

Il existe le même type de rite au Cambodge, mais les cierges sont remplacés par un ''popil''.

 

 
 

La cérémonie :

 

La cérémonie se déroule dans la plus grande pièce de la maison, et le phākhouane (พาขวัญ) est installé tout au milieu, sur un drap blanc ou sur une natte.

 

La personne en attente de ses khouanes se place tout à côté du phākhouane, et en s'asseyant à même le sol.

 

Lorsque les invités arrivent ils ont tous en main un plateau d'offrandes qu'ils vont déposer auprès du phākhouane.

 

Ensuite ils prennent place aux côtés de la personne en attente de ses khouanes.

 

Le célébrant, qui fait son entrée tout de suite après les invités, s'installe juste en face de la personne célébrée.

 

A sa demande les cierges sont allumés, et la cérémonie débute véritablement.

 

 

Le  phāme commence à s'adresser aux divinités au moyen de formules rituelles. Et le célébré touche de sa main le phākhouane. Il se recueille pour que les Thevādā, (les divinités, génies et dieux) lui accordent ce que le mõkhouane leur demande.  

 

Lors de ces invocations il est maintenant d'usage d'en rajouter à l'adresse des trois joyaux, c'est-à-dire Bouddha, le Dharma, (son enseignement) et le Sangha (la communauté des bonzes).

 

Ces nouvelles invocations consistent à réciter à trois reprises, et en langue pāli, le Namo qui est une salutation adressée à Bouddha, et le Tisarana (ไตรสรณคมน์) qui est comme une profession d'allégeance aux trois joyaux.

 

 

Après toutes ces invocations, c'est la partie fondamentale de la cérémonie qui fait suite, l'appel aux khouanes proprement dit.

 

Il consiste en la récitation d'une suite de formules sues par cœur, mais aussi de temps en temps improvisées, où il est fait état de toutes sortes d'arguments pour les attirer.

 

Le contenu de ces formules dépasse l'entendement.

 

C'est un vrai délire de paroles extravagantes formulant des souhaits extraordinaires et invraisemblables qui portent toujours sur quatre grands thèmes, la longévité, les honneurs, le bonheur et la force.

 

Ces formules sont donc le plus souvent des flatteries, des compliments, des promesses, des souhaits, mais aussi parfois des menaces, quoique cela soit très rare.

 

Car dans la plupart des cas les khouanes, qui sont très sensibles aux paroles gentilles et doucereuses, s'en contenteraient. Ils leur porteraient foi d'emblée, sans la moindre méfiance, voire même avec beaucoup de naïveté.

 

  

Lorsque le brame met fin à son long monologue cela signifie que les khouanes ont répondu à l'appel, qu'ils ont été convaincus, ramenés à la raison et qu'ils ont réintégré leur demeure respective.

 

C'est donc un appel qui se termine toujours bien. Les Khouanes ne semblent faire aucune difficulté pour revenir.

 

Mais encore fallait-il les appeler !

 

 

Alors commencent l'offrande aux khouanes et la ligature des poignets, qui vont de paire. C'est le Phouk-khène, (ผูกแขน) ''Nouer les bras''. On dit aussi Phouk-kho-mu (ผูกข้อมือ) c'est-à-dire, ''nouer à l'articulation de la main''.

 

Les deux premières cordelettes, ou fils sacrés, (Sine-khana) (สิ้นคน) seront nouées autour des poignets du mõkhouane par la personne la plus âgée et la plus respectable de l'assistance.

 

Le célébrant tend le bras en tournant la paume de la main vers le ciel et en touchant du dos de cette main le kaï-khouane. (ไก่ขวัญ) (Le poulet bouilli)

 

Quelques offrandes sont déposées dans le creux de sa main, au moins une boulette de riz et une banane, et dans ce geste d'offrande en direction des khouanes, l'homme respectable lui lie un cordonnet autour du poignet pour retenir les khouanes et les empêcher de repartir.

 

Le même rite sera recommencé avec l'autre main.

 

 

Puis c'est le célébrant, qui a donc les poignets ceints d'une cordelette, qui va lier les poignets du célébré et de tous les autres assistants.

 

Très souvent ce rite est accompagné d'un dit, invitant les khouanes à ne plus abandonner leur demeure et à donner le meilleur d'eux-mêmes pour le plus grand bien de l'individu chez qui ils sont.

 

 

Enfin pour fêter ce moment particulier dans la vie d'un homme un repas vient comme clôturer cette cérémonie.

 

Des plats, qui ont été prévus à cet effet, sont servis. Les offrandes y sont jointes et sont alors mangées, sauf les pâtisseries qui sont mises de côté.

 

Car lors de la cérémonie, les gâteaux se seraient dotés de ''forces spécifiques'' ou peut-être ''chargées d'une énergie de vie particulière''. ( ?!...)

 

Toujours est-il qu'ils seraient devenus tout indiqué pour le bien-être des enfants et la santé des malades.

 

De même, le tissu qui était joint au phākhouane va servir à couvrir durant la nuit un enfant ou un malade, et là encore pour vivifier la personne.

 

 

Le repas commence toujours par un ''bon'' verre d'alcool, ou une bonne aspiration lorsqu'il est contenu dans une jarre, que le célébré boit en premier au moyen d'un tube.

 

 

En fin de parcourt il ne restera de cette cérémonie, que les fleurs, qui seront gardées quelques jours puis jetées à la rivière.

 

 

 

Cette cérémonie montre combien l'état d'esprit des gens est simple et qu'ils ne s'embarrassent pas de la moindre réflexion métaphysique.

 

Alors c'est volontairement que je n'ai pas utilisé au cours de ces trois chroniques le terme d'animiste car je trouve qu'il est porteur de connotations péjoratives.

 

Or tout système qui tend à répondre aux attentes spirituelles, ou autres, des hommes afin de leur permettre de vibrer sur la même note que celle du diapason universel mérite respect.

 

Sans l'animisme il n'y aurait pas eu les grands courants de pensées actuelles qui, qu'on le veuille ou non, préparent ceux de demain et qui, dans les siècles à venir, seront peut-être eux-aussi porteurs de connotations péjoratives.

 

 

L'homme semble voué à chercher toute sa vie les raisons de sa présence sur terre. Jusqu'ici aucun ''système'' qu'il soit politique ou religieux n'a vraiment apporté une réponse satisfaisante à cette quête.

 

Ce qui signifie qu'aucun mode de pensée ne peut prétendre être meilleur que tous les autres.

 

Alors l'important n'est-il pas que chacun se sente en harmonie avec l'univers, au moyen d'un système dont il se sent proche et qui ne porte pas atteinte à la liberté d'autrui ?

 

 

 

 

 

Si vous désirez en savoir beaucoup plus sur les Khouanes, et avoir les références de livres sur le sujet, reportez vous à celui de Marcello Zago.

 

Il n'est pas évident à trouver, même à Paris, mais le Chapitre IV, de la page 129 à la page 170, où il est question des khouanes est intégralement accessible sur le net.

 



07/09/2010
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