MerveilleuseChiang-Mai

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MOMORDIQUE DE COCHINCHINE (La)


Momordique de Cochinchine (La) ou

Concombre de Cochinchine (Le) ou

Momordica cochinchinensis (Lourd.) Spreng

Au Lanna : Fane-khao ฟันข้าว - Phac-khao – ผักข้าว

A Bangkok : Fac-khao – ฟักข้าว


 

 

La momordique de Cochinchine appartient à la grande famille des cucurbitacées. (Cucurbitaceae.) Une famille de plantes rampantes ou grimpantes qui compte pas moins de 800 espèces dont les melons, les concombres, les citrouilles et les courges (*) pour ne citer que ceux-là.

 

(*) La courge ou la gourde se disait en latin ''cucurbita'' et c'est à partir de ce mot que les naturalistes ont formé celui de ''cucurbitacée''. Les deux mots, courge et gourde, ne se sont ''spécialisés'' ou ''différenciés'' qu'au cours du XIXe siècle.

 

 

Cette grande famille se répartit en 130 genres dont celui des ''momordiques'' (*) ou ''momordica'', nom formé à partir du précédent.

 

(*) Ce mot apparaît pour la première fois dans la littérature française sous la plume du naturaliste et médecin suisse, Konrad Gesner (1516-1565) qui rapporte dans son livre ''Trésor des remèdes secrets'' que le médecin Antonio Musa Brasavola, (1500-1555) de Ferrare utilise une huile cicatrisante provenant d'un fruit contenu dans une cosse épineuse et qui s'appelle coche, momordique.

 

Le mot ''momordique'' vient vraisemblablement du latin mordere qui signifie mordre. Ce mot doit faire allusion à l'aspect épineux du fruit, et sans doute aussi à son goût amer et à sa toxicité.

Pour l'anecdote, il existe un gâteau sec italien qui s'appelle ''osso da mordere'' littéralement, l'os à mordre.

 

Dans leur dictionnaire universel paru en 1837, les deux auteurs (Merat et de Lens) disent que le mot viendrait de ''momordi'' qui est le prétérit de ''mordeo'', mâcher, et cela en raison de la forme aplatie des semences de quelques unes des espèces, qui donnent l'impression d'avoir été mâchées.

 

Mordre ou mâcher ?... à vous de choisir !...      

 

 

Parmi les nombreuses variétés de momordica, (*), il y a la cochinchinensis. Une espèce que les naturalistes ont créée à partir du nom d'une des régions de l'Asie du Sud-est, la Cochinchine, dont la ville principale est Saigon. (Hô Chi Minh-ville pour ceux qui préfèrent.)

 

(*) Il y a actuellement une cinquantaine de variétés de momordica, Balsamina – Boivinii - Charentia – Cylindrica – Dioïca Roxb. – Elaterium – Luffa acutangula (L) Roxb. –  Opercula L. – Pedata – Purgans – Rostrata A. Zimm. - Sénégalensis Lam, etc… etc… dont trente six sont africaines.

 

 

 La momordique de Cochinchine est donc une cucurbitacée originaire et endémique du Sud-est Asiatique. On la trouve dans l'est de l'Inde, au Bengladesh, en Birmanie, Thaïlande, Laos, Vietnam, Malaisie, Philippines et sud de la Chine.

 



C'est une plante grimpante à vrilles qui ressemble à nos treilles. Son pied est sarmenteux. Ses filaments spiralés s'enroulent, ou s'accrochent, à tout ce qu'ils peuvent trouver sur leur passage. (Plantes, grillages, fils électriques, etc.…etc.…)

 

 

La momordique de Cochinchine peut ainsi pousser ses rameaux herbacés et les fixer, jusqu'à quinze ou vingt mètres au-delà de son pied.

 

C'est une plante  dioïque. C'est-à-dire qu'il existe deux types d'individus dans cette espèce, une plante mâle et une plante femelle.

 

Il est d'ailleurs conseiller pour la reproduction de l'espèce d'avoir toujours au moins un pied mâle près des pieds femelles. Car la plante étant allogame, la pollinisation d'une fleur femelle ne peut se faire qu'avec le pollen d'une fleur mâle.

 

L'espèce se multiplie par graines ou par boutures des racines. Le deuxième procédé donnerait une meilleure fructification que la reproduction par graines.

 


 

Les feuilles de la momordique de Cochinchine mesurent une quinzaine de centimètres. Elles sont glabres, alternes, entières ou découpées en trois ou cinq lobes, et accompagnées de vrilles.

 

 

Les fleurs de la momordique de Cochinchine sont donc dioïques et leur pollinisation s'opère au moyen d'un tiers, vent ou insectes.

 

Les fleurs mâles apparaissent sous la forme d'un calice à cinq sépales ''quinconciaux'' auquel adhère une corolle formée de cinq pétales de couleur blanchâtre. Leurs étamines sont insérées tout au fond de la fleur.

 

 


Les fleurs femelles présentent, à partir de leur calice, la même apparence extérieure que la fleur mâle. Mais sous leur calice il y a l'ovaire. Un ovaire infère qui est surmonté par un style ''trifurqué'' (*) tout au fond du calice, dont chacune des trois extrémités se termine par un stigmate épais de couleur jaune.


Ci-dessous des fleurs mâles.



 

(*) Ce terme de botanique signifie que le style se sépare en trois parties à son sommet.

 

 

Le fruit de la momordique de Cochinchine est de forme ovoïde plus ou moins allongée, ou parfois presque ronde le faisant ressembler à une grosse orange recouverte d'épines à moitié molles, ou à un jouet pour chien en plastique fluorescent.

 

Ses dimensions varient entre sept à dix centimètres, voire quinze. Il est de couleur verte, mais en murissant il devient orange.

 

 

A l'intérieur il y a une pulpe rouge, dans laquelle se sont développées une quinzaine de graines aplaties dont la particularité est de toujours avoir leur bord irrégulier.

 



C'est un fruit comestible, mais dans lequel il est déconseillé de mordre à pleine dents à cause de son amertume. C'est pourquoi il se consomme toujours cuit.

 

La momordique de Cochinchine est donc plus un condiment qu'un aliment. Elle apporte saveur et couleur aux plats dont elle entre dans la composition.

 

Cependant, en Chine, elle est cuisinée, car ce serait un excellent rafraîchissant ; et après cuisson, son goût serait doux, sucré, et légèrement acidulé.

 

Mais il est bien connu qu'en gastronomie les Chinois ont l'art de tout savoir préparer, et que plus un met est excellent et moins il faut chercher à en connaître le contenu, sous peine d'entrave à la digestion du plat en question !...

 

 

Au Lanna la momordique de Cochinchine ne se trouve pas sur les marchés, mais dans les ''treilles'' des cours des particuliers. Car c'est un fruit qui n'est pas de consommation courante, ou très courant ; sauf sur les fils électriques … alimentant les habitations. (*)

 

(*) Personnellement, c'est là que j'en ai vu pour la première fois. Ces momordiques de Cochinchine murissaient, et murissent encore, sur des conducteurs électriques traversant une rue, la thanon Wiang Kaeo (ถนน วียงแก้ว) pas très loin de la Thai Airways !...

 

Chiang-Maï n'est pas Paris, il y souffle un air venant de la campagne!...

 




Par contre au Vietnam le ''gâc'', prononcer ''geuk'', c'est ainsi que l'appellent les Vietnamiens, est un fruit très populaire.

 

Il participe aux grands événements, comme les mariages. C'est lui qui donne sa couleur rouge, (*) au riz gluant des festivités.

 

(*) Au Vietnam le rouge porte bonheur, alors que le blanc est lié à la mort, d'où la nécessité de colorer le riz lors des fêtes.

 

Alors ce n'est pas par hasard si cette plante pousse et se développe auprès de la plupart des habitations Vietnamiennes.

 

En Inde, où elle s'appelle ''Karela'', le fruit vert entre dans la composition des sauces au curry.

 

 

 

Médicalement, la momordique de Cochinchine serait un purgatif drastique qui donné à haute dose peut devenir un poison.

 

Elle est donc utilisée pour traiter les troubles gastro-intestinaux mais aussi les douleurs menstruelles, les problèmes cutanés, la dysenterie, la malaria et les vers.

 

Bref, elle serait dépurative, diurétiques, émolliente, laxative, rafraîchissante, sédative, vermifuge et aurait aussi des vertus aphrodisiaques ?!...

 

Ses racines sont employées en guise de savon. Au Lanna, elles entraient dans la préparation qui servait à laver les cheveux lors du rituel de ''dam houa''. (ดำห้ว) (*) Et grâce à elles les cheveux traités retrouvaient leur éclat, cessaient de tomber, et étaient libérés de  tous leurs parasites.

 

  (*) Au Lanna, au XIIIe siècle ''dam houa'' (ดำห้ว) était un rituel hebdomadaire qui consistait à se dégraisser les cheveux que les gens se graissaient les autres jours de la semaine, conformément aux critères de beauté de l'époque. (Il est fait état de cet us dans la chronique ''La légende de la triple alliance de 1287 ''.)

 

 

Dans les années 1940 des chercheurs Franco-Vietnamiens ont découvert, que la momordique de Cochinchine régulait le taux de glucose chez les diabétiques non dépendants de l'insuline, qu'elle était riche en caroténoïde, (*) qu'elle prévenait les cataractes et enfin, que l'huile extraite du fruit contenait des antioxydants ralentissant le vieillissement.

 

(*) Parmi les caroténoïdes contenus en grande quantité dans la momordique de Cochinchine il y aurait le lycopen. Un carotène qui aurait des propriétés préventives contre des maladies liées à l'âge, comme les troubles cardio-vasculaires et oculaires (cataracte). D'après certaines études il y aurait même un lien entre une nourriture riche en lycopen et la diminution de certains cancers. (Prostate – foie)

 

 Au Mexique, ainsi qu'au Vietnam et au Lanna, un jus de momordique de Cochinchine est commercialisé en mettant en avant tous les mérites que je viens d'énumérer.  

 

 

 

Comme pour tous les fruits, les noms pour désigner la momordique de Cochinchine ne manquent pas.

 

Le commun des mortels fait tout aussi bien que les naturalistes et … peut-être mieux ou … pire ?... C'est selon.

 

Entre autre noms il y a, le concombre amer, la margose ou la margoze, le concombre sauvage, la courge amère, le sorossi, ou la sorossi puisque j'ai vu l'assorossie ?!...

 

Bref, bon nombre d'internautes attribuent le nom des uns aux autres et vice versa ; tout en mettant en garde leur lecteur de ne pas confondre les différentes variétés qu'ils sont les premiers à confondre !....

 

Alors tenez-vous en à momordique de Cochinchine ou Momordica cochinchinensis (Lourd.) Spreng vous serez certain, en parlant de cette variété de cucurbitacée, de vous servir des bonnes appellations.

 

 

A propos d'appellations communes, cette fois encore la Thaïlande bat tous les records car chaque région, pour ne pas écrire chaque ville, lui a donné un nom, malgré l'appellation officielle made in Bangkok de Fac-khao – ฟักข้าว.

 

A Chiang-Maï c'est Phak-khao, (ผักข้าว) ou Fane-Khao (ฟันข้าว) et encore plus au nord-ouest du Lanna, chez les Karens et à Mae Hong Son c'est Phou-khou-tao, (พุคู้เต๊าะ) à Phrae, Ma-Khao, (มะข้าว)  et au sud à Pattani Khi-ka-khruea (ขี้กาเครือ) etc. etc.

 

Comme vous le voyez, il y a là aussi de quoi perdre les pédales, mais au moins … pas son latin.

 

 

 

Nota bene : Comme à mon habitude j'ai glané tous ces renseignements en passant par Gallica le service en ligne de la BNF. Mais je suis allé aussi sur le net et là, j'ai découvert un site de photos présentant 450 variétés de courges !...

 

Je vous conseille d'aller y jeter un œil, ne serait-ce que par curiosité et pour méditer quelques instants sur la diversité de la grande famille des cucurbitacées, où bien évidemment la momordique de Cochinchine ne figure pas. Ce qui signifie que la liste est loin d'être close.

 

Comme je ne suis pas sectaire, et que je pardonne aux auteurs de ce site l'absence de la momordique de Cochinchine, ce qu'ils doivent n'avoir que faire, je vous souhaite … une bonne promenade virtuelle parmi les courges et les gourdes et … sans arrières pensées !...

 

Surtout, gardez bien votre chemin. Car vous verrez qu'il y a de quoi se perdre dans les formes  et dans les noms.

 

C'est le site : Marché de la courge 2008

http://www.bangomarkt.ch/courges_fr.htm#Haut%20de%20courges

 




16/06/2010
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