MerveilleuseChiang-Mai

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MONUMENT DE LA VICTOIRE 03 (L'édification du monument))


MONUMENT DE LA VICTOIRE (3)

 

อนุสาวรีย์ชัยสมรภูมิ (VICTORY MONUMENT)

 

 

                                   L’ÉDIFICATION du MONUMENT

 

 

 

Bref résumé des deux chroniques précédentes :

 

Parce qu'un homme quelque peu mégalomane était aux rênes du pouvoir en Thaïlande en 1939, des combats à l'initiative de la Thaïlande se sont déroulés entre cette dernière et les forces françaises d'Indochine.

 

Plaek Phibun Songkhram, (1897-1964) (แปลก พิบุล สงคราม) puisque tel était le nom de cet homme, rêvait alors d'un grand empire T'aï qui aurait réuni tous les T'aïs d'Asie. C'est-à-dire depuis le sud de la Thaïlande, jusqu'aux marches du Tibet, au nord ouest de la Thaïlande ; en faisant main basse au passage sur le ''Sipong Panna'' dans le sud du Yunnan en Chine, d'une partie de la Birmanie et de l'Inde du nord-est sans oublier le nord-ouest du Tonkin  … pas moins !...

 

Des cartes géographiques de cet empire ont d'ailleurs été éditées lorsque ce dictateur était au pouvoir et que son projet restait à accomplir.

 

   

 

 

N'ayant pas retrouvé la carte de cet empire thaïlandais en devenir, j'ai tenté de la reconstituer alors …

 

Carte 1 : Le fer à cheval noir délimite approximativement cet empire. Ce qui permet la brève analyse suivante :

1/ Phibun revendiquait toutes les régions par où avaient migré les T'aïs.

2/ Ce n'était pas seulement le ''Sipsong Panna'' dont il voulait s'approprier mais au moins les ¾ du Yunnan.

3/ Il reconstituait à la mode Thaïlandaise un empire Khmer avec le Mékong comme grande artère.

 

Cartes 2 & 3 : Ces cartes, que j'ai trouvées dans un livre de classe thaïlandais et qui comportent des erreurs !... (*) … sont autant d'alibis pour revendiquer … une bonne partie de la Birmanie, le Laos et le Cambodge dans leur entier.

 

(*) La principale grosse erreur : Sous le règne de Ramkhamhaeng le royaume de Phayao était encore indépendant. Il n'a été annexé par le Lanna qu'une quarantaine d'années plus tard, vers 1338/1340.

 

Nota-bene : Pour mieux lire les cartes j'ai donné aux villes repérées en rouge leur nom actuel et en caractères romains, mais sans changer leur emplacement, y compris lorsqu'il n'était pas très exact comme Sihanoukville autrefois ''Kompong Som''.

Cette ''romanisation'' du nom de certaines villes permet de clarifier la zone du conflit franco-thaïlandais.

 

. 

 

Pour réaliser ce rêve insensé il fallait le mettre en œuvre, et cette mise en route commença par la revendication de territoires Laotien et Cambodgien, la province de Xayabouri pour le Laos et celles de Battambang et Siem-Reap pour le Cambodge.

 

Ces provinces, sous protectorat français, n'avaient pas été sans connaître quelques péripéties !....

 

Dans un premier temps, au moment des protectorats, le Siam les avait usurpées au Laos et au Cambodge, (*) au grand dam de ces derniers, en faisant valoir des droits inexistants pour tromper les autorités françaises.

 

Puis dans un second temps, découvrant les supercheries de la duplicité siamoise, les autorités françaises remirent, tant bien que mal, bon ordre à ce ''désordre'' en rendant à César ce qui appartenait à César, et cela au moyen d'un traité en date du 23 mars 1907 que les Siamois acceptèrent à contre cœur mais … tout mensonge finit par avoir un prix. Et puis les choses en étaient restées là.

 

 

Trente ans plus tard le tout nouveau premier ministre, Plaek Phibun, conteste ce traité et mobilise la population au moyen d'une propagande digne des régimes autoritaires comme ceux de Staline, d'Hitler et de Mussolini dont il était, pour le dernier, un grand admirateur.

 

 

Donc tout d'un coup, après trente ans de bons rapports, la France d'après Phibun menace l'intégrité du territoire thaïlandais.

 

Alors pour se protéger de la soi-disant voracité territoriale française des tracts et des slogans, hostiles à la France et aux Français, sont diffusés dans tout le pays et tout au long des frontières communes, c'est-à-dire y compris du côté français.

 

Puis une propagande aux relents nationalistes va battre son plein d'un bout à l'autre du pays car le … ''nationalisme est un concept politique qui protège les personnes et les biens des dangers extérieurs. '' (Sic) …d'où un slogan du genre …''Les Thaïs fabriquent, les Thaïs utilisent, et les Thaïs se développent''  (Thaï Tham, Thaï Chaï, Thaï Chaoren) (ไทยทำ ไทยใช้ ไทยเจริญ) !...

 

De cette façon la Thaïlande ne pouvait que devenir aussi prospère que les pays occidentaux et se mettre hors de ''dangers'' par rapport à eux. CQFD !... tout du moins d'après le ''guide'' (**) Phibun !....

 

      

 

(*) Ainsi par exemple les Siamois s'étaient appropriés d'Angkor, rien de moins !... Ce que contestaient à corps et à cris les Cambodgiens et pour cause … non ?....

 

(**) Phibun ne se faisait pas appelé le guide, mais le père … ce qui revient au même. Je ne suis déjà expliqué à ce sujet, alors je n'y reviens pas.

 

 

   

 

 

Carte 1 : L'Indochine française avec en blanc les provinces revendiquées.

Carte 2 : La province Laotienne de Xayabouri.

Carte 3 : Les provinces Cambodgiennes de Battambang et Siem-Reap.

 

 

 

Alors que Phibun était ministre de la défense sous le précédent gouvernement, (*) le budget de la défense s'était considérablement accru et le service militaire était passé à deux ans ; autant dire qu'il prévoyait déjà un éventuel affrontement avec les Français, et voire peut-être avec les anglais ?...

 

L'état de la Chine laissait libre cours à tous les espoirs hormis que … il y avait … les Japonais … dont Phibun avait sous-estimé les ambitions et l'égoïsme.

 

Les Japonais n'étaient pas ''partageurs'' … tout du moins pour la Chine  !... Ils la voulaient entière et pour eux seuls.

 

 

Arrivé au pouvoir en décembre 1938, Phibun, par la voie diplomatique en septembre 1939, va demander et à deux reprises aux Français la restitution des provinces concernées par le traité du 23 mars 1907.  Les Français ne donneront pas suite.

 

Alors mettant à profit la capitulation française du 17 juin 1939 Phibun enclenche, dès le 18 juin, une politique d'incidents de frontière.

 

Ces harcèlements militaires tout au long du Mékong vont conduire les français à riposter.

 

A partir de janvier 1941 les combats vont même prendre de l'ampleur. Mais le Japon, par crainte de voir les plans de sa campagne du Pacifique remis en cause,  s'interpose et impose un traité de paix très favorable à la Thaïlande … implicitement son allié.

 

 

Incontestablement la mini guerre franco-thaïlandaise, qui dura quatre mois, fut un match nul avec un sérieux avantage pour la Thaïlande ; et pour cause les Français devaient se battre avec un armement datant de la 1ère guerre mondiale et ne tirer qu'à bon escient pour économiser leurs munitions, ce qui était loin d'être le cas dans le camp adverse !... (**)

 

 

Avec la convention de paix du 9 mars 1941 les Thaïlandais obtinrent moins que ce qu'ils espéraient à l'arrivée, mais plus que ce qu'ils demandaient au départ, et les Français se laissèrent déposséder de plus qu'il ne le pensait. Mais ils n'eurent pas d'autre choix que celui d'accepter le dictat japonais.

 

 

Phibun, au comble de la joie ( ?...)  fit de cet avantage et de ce traité une victoire sans égale et voulut la marquer au moyen de l'édification d'un monument, le monument de la victoire … en attendant, sans doute qu'il devînt le monument ''des'' victoires ?!...

 

 

(*) Le troisième gouvernement siamois fut dirigé par le mentor et père spirituel de Phibun, Phot Phahon Yothin (1887-1947) (พจน์ พหลโยธิน) ou Phraya Phahon, un militaire qui s'était autoproclamé premier ministre à la suite du coup d'état de 1933 (De 1932 à 1933 il y eu trois coups d'état. Il n'y a que le premier pas qui coûte !...).

 

Acculé à la démission pour des raisons hors de notre sujet, Phahon ''passa'' le relais à son jeune poulain qui fut … ''démocratiquement'' (c'est ce que j'ai lu) élu à la tête de sa dictature.

 

(**) Néanmoins les Français furent les auteurs d'une brillante bataille navale à Koh Chang le 17 janvier 1941.

Ce jour là notre marine coula le tiers de la marine thaïlandaise sans la moindre perte en homme et en matériel. Les faits ont été vérifiés à Saïgon par les journalistes qui s'y trouvaient.

 

Malgré les témoignages de ces derniers les Thaïlandais continuent à écrire et à dire aujourd'hui que cette bataille suscita de nombreuses pertes et dégâts des … deux côtés !...

 

Cela laisse rêveur quand à la fiabilité de leurs livres ''d'histoire'' et à leur esprit ''critique'' !...

 

 

Photo provenant du site:

http://www.weekendhobby.com/camp/webboard/question.asp?page=5&ID=6875

 

 

L'édification du MONUMENT DE LA VICTOIRE.

 

 

Les ordres et décisions concernant la construction du monument furent menés tambour battant, puisque Phibun, entre autre choses, posa la première pierre du monument le 24 juin 1941, (1) soit un mois et demi après la signature de la convention de paix de Tokyo du 9 mars 1941.

 

Le projet fut confié à un architecte du ministère des travaux publics, ''Naï'' ou … monsieur Mom Luang Poom Malakul (หม่อม หลาง ปุ่ม มาลากุล) (2) et les sculptures à Corrado Feroci (1892-1962) (คอร์ราโด เฟโรชี) qui se fit seconder par quelques uns de ses élèves des beaux arts.

 

 

Pour élaborer ce projet, qui visait à mettre à l'honneur l'héroïsme des combattants tués lors du conflit franco-thaïlandais, naï Mom Luang Poom Malakul avait déterminé que les cinq caractéristiques à mettre en évidence pour donner de la signification au monument étaient :

 

1/ Les cinq corps d'arme qui ont participé au conflit.

2/ La bravoure et le courage des combattants.

3/ L'arme particulière à chacun des corps d'arme.

4/ L'action caractéristique à chacun des corps d'arme.

5/ La nécessité de retenir l'attention du public.

 

 

A l'époque Bangkok ne manquait pas d'espace, les rues commençaient à remplacer les klongs et la troisième enceinte devenait obsolète.

 

En 1928 le Danois Erik Seidenfaden écrivait au sujet de Samsen, la banlieue nord de Bangkok où s'élèvera le monument '' … à Bangkok les arbres et la verdure dominent … '' et, poursuivait-il … ''Bangkok sera dans le futur une vaste ville-jardin … '' !...

 

Comme quoi un excellent témoin peut être un très mauvais devin !....

 

Dans cette banlieue nord ''Sanam Pao'', (สนามเป้า) (3) vraisemblablement un champ de manœuvres militaires destinées à l'apprentissage du tir, et peut-être du délestage depuis des avions (?...) fut alors choisi pour l'érection du monument.

 

Pour cela 18 propriétaires terriens, et non des moindres puisqu'il y avait des terres appartenant aux descendants de Rama VI et de Rama VII, furent expropriés pour une superficie globale d'environ 3 hectares (27.124 m2 environ) ou  … 6.781 taragwa (ตารางวา) (1 taragwa = 4m2 environ)

 

 

L'une des caractéristiques de l'emplacement du monument est d'être … soi-disant (?...) à 5 kilomètres du kilomètre zéro (4) situé au centre du monument de la démocratie.

 

Il ''était'' à l'intersection des voies Ratchathewi (ถนน ราชเทวี) c'est-à-dire de la route de la reine, et de Phaya Thaï (ถนน พญาไท) ce qui signifie la route  ''des souverains Thaï''.

 

La route Rachathewi conduisait alors des résidences royales où vivaient reines et concubines (*) à la route Phaya Thaï qui elle menait directement, en tournant sur la gauche, à l'aéroport de Don Muang, (**) et en virant sur la droite vers le centre ville.

 

 

(*) La route rachathewi desservait alors le ''suan dusit'' (สวนดุสิต) ou ''jardin céleste'' un parc de 76 hectares où s'élevaient 13 résidences royales dont le palais Vimanmek.

L'un des palais, le palais Suan Sunmandha est devenu l'université Suan Sunandha Rajabhat et en 1938 les autres résidences ont laissé place au zoo de Bangkok.

Donc la route Ratchthewi était bien la route de la reine ou … la route des reines ?... pour aller à l'aéroport ou pour aller au centre ville.

 

(**) La force aérienne siamoise, la 1ère de la région, fut crée le 2 novembre 1913 et stationnait à l'aéroport de Don Muang qui comptait à l'époque plus de 400 appareils d'origines françaises (Breguet et Nieuport). Don Muang fut donc à l'origine un terrain d'aviation militaire.

 

   

 

Le Siam à même construit quelques avions militaires avec l'aide des … Français. Ici, à Don Muang, montage de fuselages – emboutissage de capots – montage des avions dont la carcasse était en bois.

 

Donc la route Phaya Thaï conduisait essentiellement, dans un premier temps, vers des installations militaires dont l'aéroport.

 

 

   

 

 

Photo 1 : Le monument de la démocratie et les … Champs Elysées de Bangkok … Ratchadamnoen Klang road.

La photo a été prise dans le sens ouest/est.

La rue à gauche est Khaosan road et la rue transversale Bowonniwet road.

Photo 3 : Le monument de la victoire qui vu d'avion ressemble à une cible. Alors le nom de ''Sanam Pao'' est-il d'origine ou a-t-il été donné au lieu par la suite ?... (Photo de Peter Williams Hut – 1946)

 

 

              

Les routes ont-elles des noms anodins ou porteurs de sous-entendus ?... A vous d'en juger !...

 

Le tronçon de la route ''Phaya Thaï'', situé au nord du monument, fut débaptisé une première fois pour être nommé ''Prachathipatai'' (ถนน ประชาธิปไตย) c'est-à-dire la route de la démocratie. Une route qui prenait la continuité de celle des ''rois Thaïs'', des souverains qui étaient auparavant à la tête d'une monarchie … absolue ?!...

 

Faut-il y voir le symbole de la monarchie constitutionnelle qui prend la relève de la monarchie absolue ?...

 

 

Prachathipatai faisait alors 22 kilomètres, (je rappelle que les routes étaient rares à l'époque), et conduisait à l'aéroport de Don Muang … encore un beau symbole de liberté !....

 

Puis la route fut rallongée de 140 kilomètres environ et, sur les ordres de Phibun, elle prit le nom de Phahon Yothin, (ถนน พหลโยธิน).

 

Phahon Yothin fut à l'initiative du premier coup d'état ''réussi'' en 1932, celui qui instaura la monarchie constitutionnelle, et du troisième en 1933 où il s'autoproclama premier ministre … en bon démocrate vraisemblablement ?!....

 

Durant sa dictature, de 1933 à 1938, Phibun fut son dauphin et ministre des armées.

 

 

Cette route, compte aujourd'hui plus de 1.000 kilomètres. Elle conduit à la frontière birmane, tout au nord de Chiang-Raï, à Mae Saï très exactement. C'est la grande route numéro 1, et celle qui aurait peut-être du conduire jusqu'aux marches du Tibet … traversant le grand empire dont rêvait Phibun … qui sait à part Phibun ?....

 

 

Ce changement de nom et la prolongation à l'infini de la route, en plus de rendre hommage au mentor de Phibun, ne sous-entendaient-ils pas que la voie issue de la ''démocratie'', conduisait beaucoup plus loin et vers des horizons plein de promesses (Don Muang) que celles dont les noms restaient attachés à la monarchie absolue ?...

 

Les deux autres voies (l'une à le même nom de part et d'autre du monument) sont relativement courtes … et limitées par d'autres rues à leurs extrémités !...

 

Mes remarques sont-elles pertinentes ou pernicieuses ?... Les choses se sont-elles faites innocemment ou consciemment ?!... A vous de choisir !...

 

 

 

(1) Le 24 juin est une date fétiche.

C'est le 24 juin 1932 que fut renversée la monarchie absolue, le 24 juin 1939 que commencèrent les travaux du monument de la démocratie et le 24 juin 1940 que ce monument fut inauguré.

 

(2) Mom Luang Poom Malakul est aussi avec Rawi Chomseri (ระวี ชมเสรี), l'architecte du grand hôtel Erawan qui connu, soi-disant, les pires malheurs au début de sa construction en 1955. Cela parce que Brahma, le grand dieu hindou, dont l'éléphant Erawan est la monture de son condisciple Indra, n'avait pas de sanctuaire ... selon le contre-amiral Luang Suwichampat (หลวงสุวิชานแพทย์) qui s'était alors reconverti dans l'astrologie !...

 

L'oubli ou l'erreur fut réparé par les architectes grâce au contre-amiral.

 

Aujourd'hui ce sanctuaire ''Phra Phrom'' ou ''Thao Maha Brahma'' (ท้าวมหาพรหม) qui se situe à l'intersection des rues Ploenchit (ถนนเพลินจิต) et Rachadamri (ถนน ราชดำริ) est l'un des plus connus et des plus fréquentés de Bangkok, tant par les touristes que par les indigènes.

 

Hélas …plus personne, ou presque, ne se souvient de ses maîtres d'œuvres ?!.... Mais du jour ou le sanctuaire fut terminé l'achèvement des travaux de l'hôtel ne connut plus un seul ennui. Merci Brama.

 

(3) Sanam (สนาม) signifie champ ou grande étendue de terrains et Pao (เป้า) cible. Il devait donc s'agir d'un terrain de manœuvres militaires plus particulièrement destiné à l'apprentissage du tir, voire peut-être à des délestages à partir d'avion ?....  A moins que le nom fut donné par rapport au nouvel aménagement du lieu ?...

 

(4) Il n'est pas spécifié si les cinq kilomètres qui séparent les deux centres des monuments sont à vol d'oiseau ou par l'itinéraire routier le plus direct. Car il n'y a pas d'avenue joignant les deux monuments  en ligne droite.

 

  Phot Phahon Yothin   

Alors qu'il était encore tout au bas de la voie hiérarchique.

 

(5) Le premier dictateur Siamois, Phot Phahon Yothin (1887-1933-1938-1947) (พหล พลพยุหเสนา) fut l'un des quatre mousquetaires (ทหารเสือคณะราษฎร์) à l'origine du premier coup d'état ''réussi'' ; celui de 1932 qui renversa la monarchie absolue au bénéfice de la monarchie constitutionnelle.

 

Il aurait du y avoir un premier coup d'état en 1912 mais il fut déjoué en février. Les Thaïlandais le connaissent sous le nom de Kabot Ro. So. 130, la révolte 130 de l'ère Rattanakosin (1912-1782 = 130 ans) (ภาคปฏิวัติครั้งแรกของไทย ร.ศ. 130).

 

Pour la petite histoire :

Phot Phahon Yothin aurait été le camarade de classe de Hermann Göring en 1903 à l'académie prussienne de Lichterfel près de Berlin où il étudia l'art militaire.

Il serait mort dans la misère, et ce serait Phibun qui aurait réglé les dépenses de ses funérailles que sa famille ne put assumer.

Un bel exemple de reconnaissance non ?!...

 

 

     

 

 

De gauche à droite les obélisques de … Paris (*), Buenos-Aires, Rome (*) et … Bangkok. Hormis celui de Paris les trois autres ont vu le jour entre 1932 et 1939.

(*) Paris et Rome sont des monolithes le premier en pierre et le second en marbre de Carrare alors que les deux autres sont en béton armé, recouvert de plaques de marbre pour celui de Bangkok.

 

 

 

Le style du monument :

 

Tous les auteurs que j'ai pu lire sont unanimes : Le monument tranche avec tous ceux qui s'élèvent en Thaïlande. Il aurait un côté … occidental.

 

En fait il a plus un côté égyptien qu'occidental. Car les monuments de ce type, (des obélisques), qui s'érigent de par le monde viennent pour la plupart d'Egypte tant celui d'Istanbul que de Londres, de Paris et de Rome qui en compte à elle seule au moins une quinzaine. (*)

 

Autrement dit les capitales des grandes puissances de l'époque, y comprise Berlin en ce temps là, avaient leur obélisque, dont les uns disent que c'est la représentation d'un rayon du soleil figé pour l'éternité et d'autres que c'est le témoignage d'un individu qui a voulu se hisser aux rangs des dieux en commémorant un grand événement !...

 

 

Compte tenu des aspirations de Phibun,  il était logique que la Thaïlande qu'il voulait ''rivale et aussi prospère que les grands pays civilisés'' (Sic) ait son obélisque, d'autant qu'elle venait de se doter d'un arc de triomphe via le monument de la démocratie et d'une avenue, l'avenue Ratchadamnen Klang (ราชดำเนินกลาง) qui n'était pas sans vouloir copier les champs Elysées de Paris !...

 

Alors quoi de plus normal que de rajouter l'obélisque de la Concorde pour obtenir le triptyque parisien ?... (1) J'extrapole à peine.

 

 

À défaut d'avoir un obélisque venant d'Egypte la Thaïlande,  tout comme les Etats-Unis (2) l'Argentine ou l'Italie de Benito Mussolini, a construit le sien ; un obélisque de 50 mètres. Il dépasse d'une vingtaine de mètres tous ceux venus d'Egypte s'élevant dans les pays rivaux (3) … un détail qui n'a pas été sans flatter l'égo du commanditaire !.... non ?...

 

 

Mais tandis que tous les obélisques ont une base carrée, un fût quadrangulaire étiré, avec des faces planes, et qu'à leur extrémité leurs pentes se cassent pour se terminer par un pyramidion, la base de celui de Bangkok est pentagonale.

 

Ce pentagone a été la résultante de la forme étoilée du corps de l'obélisque dont les faces sont incurvées pour former en leur milieu une excroissance à angle aigue.

 

Celles-ci, les faces et les excroissances, se rejoignent au ''faîte'' du corps du monument en se brisant légèrement pour former … un pyramidion !....

 

Il s'agit donc bien d'un obélisque qui a été construit.

 

La raison de cette forme étoilée est due au fait que le corps de l'obélisque, en béton armé recouvert de plaques en marbre, représente symboliquement cinq baïonnettes en faisceau, appuyées dos à dos avec le fil de la lame tournée vers l'espace. Car ces baïonnettes sont prêtent à transpercer le premier ennemi venu. (4)

 

 

 

(1) Il ne faut pas perdre de vue que Phibun est venu faire ses études militaires à Poitiers et à Fontainebleau entre 1924 et 1927. Il a donc très bien connu Paris et a peut-être … qui sait ?... défilé sous l'arc de triomphe ?!...

 

En extrapolant encore, ce fut place de la Concorde que Louis XVI fut guillotiné. La monarchie absolue et la monarchie tout court prenaient théoriquement fin. (''Théoriquement'' parce qu'il y eu la restauration)

A Bangkok la monarchie absolue venait de prendre fin et, suite à l'abdication de rama VII en 1935 il fut interdit à tous d'accrocher et d'avoir un portrait de ce roi, alors que celui de Phibun se laissait voir en tous lieux.

 

(2) De nombreuses villes ou pays ont construit ''leur'' obélisque. Ainsi il y a le ''Washington monument'', 169 mètres, qui fut érigé entre 1838 et 1884, celui de Buenos-Aires, 67 mètres, construit de mars à mai 1936, et … celui de Benito Mussolini du ''Fora Italico'' à Rome, 36 mètres, élevé en marbre de Carrare en … 1932 !....

 

L'admirateur du duce ne pouvait pas faire moins, 10 ans plus tard, que de doter Bangkok de son obélisque, mais encore lui fallait-il un événement pour justifier de sa création.

 

(3) L'Italie de Benito Mussolini n'était pas un pays rival, mais un pays ''ami''.

 

(4) Dans les textes Thaïlandais il est écrit que le dessin formé par la base du faisceau de baïonnettes ressemble à une carambole (มะเฟือง) coupée horizontalement ou transversalement !... Ce fruit s'appelle aussi la ''pomme étoile''. Ci-dessous, sa fleur, son fruit et une tranche transversale du fruit.

 

   

 

Or du point de vue symbolique, en Occident, sous les empereurs romains la pomme symbolisait le monde. C'est pourquoi, à cette époque, il existait des statues équestres où le cavalier tenait une pomme dans sa main montrant ainsi qu'il dominait le monde. Ce fut le cas de celle de l'empereur justinien (483-527-565) à Constantinople qui tenait un globe doré surnommé … la pomme rouge ?!...

 

Y aurait-il dans ce monument cette symbolique de domination, sinon mondiale du moins régionale ?...

A chacun d'en penser ce qu'il veut !...

 

 

 

 

Au bas de l'obélisque, devant chacun des bas côtés du piédestal et au-dessous de chacune des baïonnettes, il y a une statue en bronze représentant un combattant.

 

Ils sont donc au nombre de cinq et s'identifient aux trois armes de l'armée thaïlandaise, l'armée de terre, l'armée de l'air, la marine, ainsi que les corps de la police et des civils.

 

Les personnages, deux fois plus grands qu'en réalité, ont été l'œuvre de Corrado Feroci et de certains de ses élèves dont :

 

Sitthidet Saenghiran (1916-1957) (สิทธิเดช แสงหิรัญ)

Cham Khaomeecheu (1914-1942) (แช่ม ขาวมีชื่อ)

Piman Mulpramook (1912-1992) (พิมาน มูลประมุข) (*)

 

… et du modeleur Suk Ayuman (สุข อยู­มั่น)

 

 

 

1/ L'aviateur avec sa bombe écoutant les instructions.

2/ Le civil avec son manuel marchant porter les ordres.

3/ Le marin avec son obus chargeant une culasse de canon.

4/ Le soldat avec son fusil-baïonnette marchant au combat

5/ Le policier avec son fusil-baïonnette en intervention.

 

 

 

Corrado Feroci aurait qualifié ce monument de monument de ''l'embarassement''. S'agit-il d'une coquille, ou a-t-il réellement employé ce mot au lieu …''d'embarras'' je n'en sais rien. Toujours est-il que cet ''écart de langage'' n'est pas anodin, car la construction du monument fut quelque peu controversée !... d'autant qu'il a quand même coûté la bagatelle de 550.000 bahts de l'époque !...

 

 

 

(*) Piman Mulpramook fut celui qui œuvra à la réalisation de la statue mettant à l'honneur les forces de la police.

Sans doute parce qu'il réalisa une statue qui eut l'art de plaire à ce corps de fonctionnaires il lui fut demandé de sculpter la statue qui s'élève aujourd'hui devant le poste principal de la police de Chiang-Maï !...

   

                                   1953                                       vers 1987                                 2011

 

Cette statue fut inaugurée le 13 octobre 1953 et glorifie le rôle protecteur de la police auprès de la population en général et en particulier des victimes et des enfants !...

 

 

 

Les noms des victimes de cette guerre furent inscrits sur les bas-côtés du monument. Il y en aurait eu en tout et pour tout 160, 94 soldats des armées de terre, 41 marins, (*) 13 aviateurs et 12 policiers, des chiffres vraisemblablement très en-dessous de la réalité … hélas !...    

 

Avec le temps vinrent s'ajouter les victimes de la seconde guerre mondiale et ceux de la guerre de Corée …. 801. Ce qui semblerait signifier que le souvenir aurait pris le pas sur la victoire et que ce monument soit devenu un mémorial plutôt qu'un témoignage à la gloire d'un conflit dont il vaudrait mieux ne pas se vanter. Mais ce n'est que le point de vue d'un Français !...

 

D'ailleurs c'est en ce lieu que viennent déposer une gerbe les étrangers en visite officielle et que se commémore, tous les trois février, le souvenir des anciens combattants.

 

Comme en France il existe une association qui vient en aide au plus défavorisés des parents des militaires tués en service.

 

 

(*) Suite à la bataille de Koh Chang le gouvernement thaïlandais d'alors annonça la perte de 36 marins et le sauvetage de 82 autres. Or trois bâtiments furent coulés et l'équipage de chacun d'eux comptait quelques 160 hommes environ ?!...

 

Où sont passés les quelques 350 marins manquant à l'appel ?....

 

 

A l'intérieur du monument ont été réunis les ossements des victimes et le musée qui était prévu semble être parti pour ne jamais voir le jour.

 

 

 

L'épitaphe du monument serait : (*)

 

''A tous ceux qui ont leur nom d'inscrit sur ce monument. '' (ใครจะจารึกชื่อในอนุสาวรีย์ก่อนกัน)

 

 

 

(*) Je ne suis pas certain de l'exactitude de ma traduction. Si quelqu'un en a une plus juste … elle est la bienvenue.

 



L'inauguration du monument de la victoire eut lieu le … 24 juin 1942 … et avec un parterre d'invités officiels particulièrement choisi, ne laissant aucun doute sur les sentiments du maréchal Phibun puisqu'il y avait essentiellement des représentants … allemands et japonais. Les amis de mes amis sont mes amis !... n'est-il pas vrai ?...

 

   

 

 

Photo 1 : Les troupes thaïlandaises et japonaises fraternisant courant 1943.

Photo 2 : Le 24 juin 1942, jour de l'inauguration du monument de la victoire, le maréchal Phibun et ses invités … triés sur le volet.

Photo 3 : Une autre sculpture de Piman Mulpramook celle d'un certain … maréchal Phibun. (Ce plâtre est à la galerie des sculptures de l'université Silpakorn de Bangkok, quant au bronze il est au centre d'artillerie de Lopburi)

 

 

 

 

Pour terminer je voudrais rectifier une erreur qui circule sur le Web. Le monument de la victoire n'a pas été construit sous le règne de Rama IX, mais sous celui de Rama VIII et pour cause …

 

Le monument de la victoire fut inauguré le 24 juin 1942, sous la régence de Pridi Banomyong (1900-1983) (ปรีดีพนมยงค์).

 

Rama VIII ou Ananda Mahidol (อานันทมหิดล) (1925-1946) qui fut couronné le 2 mars 1935 à l'âge de 10 ans, avait alors 17 ans et poursuivait ses études en Suisse.

 

Son règne, de très courte durée, ne commença véritablement qu'en 1945 à son retour de Suisse. Et à cette époque le monument avait été inauguré depuis … trois ans !...

  

Rama IX ou Bhumibol Adulyadej (1927-1946) (ภูมิพล อดุลยเดช) ne succèdera à son aîné qu'en 1946, au décès de celui-ci, et ne sera couronné que le 5 mai 1950. C'est toujours lui, en 2011, le roi de Thaïlande.

 

 

Epilogue :

 

Malgré mes recherches dans les différentes librairies de Chiang-Maï, peu nombreuses il est vrai, je n'ai pas trouvé de livre sur Phibun alors qu'il y en a sur ses contemporains ?!...

 

Le brave homme serait-il au purgatoire ?...

 

Si tel était le cas peut-être serait-il temps pour nos amis Thaïlandais d'enseigner cette période de leur histoire en ''rectifiant'' quelques soi-disant … ''vérités'' ?!...

 

Ce n'est pas parce qu'un pays, au cours de son histoire, a eu un comportement peu louable que ses enfants doivent en subir la honte des siècles durant. Ces derniers ne sont pas responsables des actes de leurs parents.

 

La France, et de loin s'en faut … hélas !... est un parfait exemple en ce domaine. Elle a eu de grandes heures mais aussi de méprisables lâchetés. Et que cela plaise ou non, ce sont ces moments de générosité et de faiblesse qui font ce qu'elle est et qui la rendent malgré tout … attachante, tout du moins en ce qui me concerne !

 

Alors la Thaïlande qui désire tant se mettre sur un pied d'égalité avec les pays occidentaux en a l'occasion avec cette page de leur histoire.

 

Cependant, il faut savoir que si elle revenait sur la présentation de certains faits … elle perdrait … la face !....

 

Alors là … c'est encore une autre histoire … mais une histoire à histoires !.... Alors  … tournons la page !...

 

 

   

 

 

      Le monument de la victoire

… en 1946 …                    en 2008 (Photo de Swami Stream) …        et  en 1950 !...

 

 

 



21/09/2011
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