MerveilleuseChiang-Mai

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T'AS PAS CENT BAHTS ?

T'AS PAS CENT BAHTS ?

 

 

 

Au royaume du Lanna, le meilleur conseil qu'on puisse donner à un conducteur qui va se mettre aux commandes de son engin, c'est de toujours avoir sur lui quelques billets de cent bahts afin de répondre aux attentes de ceux qui veillent sur sa sécurité.

 

Et comme quelques anecdotes valent mieux qu'un conseil pour persuader autrui, je vais donc, sans plus attendre, me faire un plaisir d'en rapporter deux.

 

La première me fut racontée par Marco, et la seconde par son copain Paul, à l'occasion d'un déjeuner à l'Empress.

 

 

Ce jour là Marco, à bord de sa voiture et en compagnie de sa femme, se rendait à Chiang-Raï.

 

La route entre Chiang-Maï et Chiang-Raï passe par la montagne. Ce qui signifie qu'elle serpente, qu'elle monte et qu'elle descend sans laisser une seconde de répit à celui qui conduit.

 

Mais lorsqu'un conducteur est seul sur cette route, c'est-à-dire sans personne devant lui, il règle sa vitesse en l'harmonisant avec son plaisir du moment. Car le paysage est loin d'être désagréable, bien au contraire.

 

Cependant lorsque la route est encombrée, comme c'est souvent le cas, et qu'en plus ce chauffeur a juste devant lui une voiture qui se traîne, l'obligeant à rouler au ralenti, ce dernier n'a alors plus qu'une idée en tête : doubler à tout prix l'emmerdeur qui lui gâche son plaisir.

 

 

C'était alors dans cette situation et ce depuis plus d'un bon quart d'heure, que se trouvait le dit Marco. Et c'était en vain qu'il essayait de doubler celui qui le précédait. Car non seulement ''il'' n'avançait pas, mais ''il'' roulait au beau milieu de la voie !...


Les ''Khon Chiang-Maï'' en particulier, et les Thaïlandais en général, sont censés rouler à gauche. Mais ils s'obstinent à rouler au centre des voies lorsqu'ils ne circulent pas carrément tout à fait à droite pour être certain de passer avant tout le monde.

 

 

Bref, pour en revenir à Marco, tandis qu'il se ''traînait'' derrière un traînard, soudain il découvrit l'opportunité, ''seulement un peu risquée'' selon ses dires, de doubler son gêneur … tout en haut d'une côte !...

 

C'était une occasion à ne pas manquer, s'empressa-t-il de préciser à nouveau, mais cette fois avec un léger sourire au coin des lèvres, comme pour se donner l'absolution.

 

 

Hélas, comme pas mal de gens avaient dû penser la même chose que lui, et bien avant lui, tout en bas de la côte en question un escadron de policiers attendait de pied ferme les amoureux du risque et des opportunités !...

 

Alors il arriva ce qui devait arriver. Marco fut interpellé. Et il se trouva en présence d'un homme tout à fait charmant, d'une courtoisie et d'une amabilité à faire rougir de honte la maréchaussée française.

 

Ce gentleman de la police lui expliqua alors qu'avec une faute pareille Marco allait se retrouver sur informatique et que les conséquences allaient lui pourrir la vie !...

 

Cependant, tandis que le flic glosait sur les risques encourus par Marco, ce dernier désespérément cherchait un billet de 100 bahts.

 

Car il avait tout de suite compris que c'était ce que le beau parleur attendait de lui, pour le laisser repartir.

 

Mais, comme par un fait exprès, ni lui ni sa femme n'avaient un billet de cent bahts sur eux.

 

La plus petite coupure dont ils disposaient, l'un et l'autre, était de cinq cents bahts !...


Comme l'aimable pandore commençait à mener à mal le passeport de Marco en le tapotant nerveusement contre la portière de sa voiture, Marco comprit que la commisération de son interlocuteur avait atteint ses limites.

 

Alors, tout en récupérant prestement son passeport au moyen d'une plaisanterie, il glissa dans la main de l'ange gardien de la route la seule coupure qu'il avait en sa possession, c'est-à-dire un billet de cinq cents bahts !....

 

L'autre alors le salua comme si de rien n'était et, avec tout autant de fair-play, il lui indiqua, le sourire aux lèvres et d'un geste de la main, la direction de Chiang-Raï.

 

Et Marco conclut : ''Ce qui m'a emmerdé le plus ce n'est pas de lui avoir filé 500 bahts, mais de savoir qu'il allait se rincer la gueule avec ses copains à la santé du Farang.''

 

Autrement dit, si Marco avait eu quelques coupures de cent bahts sur lui, il n'aurait pas éprouvé cette amertume nauséabonde et l'escadron de policiers aurait trinqué avec du whisky de moins bonne qualité et en moins grande quantité !...

 

 

  

L'anecdote de Paul était toute différente.

 

Paul venait d'acheter une voiture, et il avait décidé pour l'étrenner d'aller faire un tour à Bangkok en compagnie de son épouse, une Thaïlandaise.

 

Contrairement à Marco, Paul roulait en terrain plat et sans avoir un seul traînard devant lui. La route était même si dégagée qu'il aurait été … inhumain de ne pas profiter de cette situation exceptionnelle pour tester les reprises et la rapidité de sa nouvelle acquisition !...

 

D'ailleurs l'atmosphère était si grisante, et le contexte particulièrement festif, que le pied de Paul se laissa aller à presser la pédale de l'accélérateur sans s'apercevoir qu'il était sous l'emprise d'une tentation sournoise dont la victime ne se rend compte qu'après le fait accompli.


Ces petites pointes de vitesse n'étaient pas en elles-mêmes bien graves, et les choses auraient pu en rester là si la police ne s'y était pas mêlée.

 

Mais en appuyant un peu trop sur un accélérateur, on finit par commettre ce qu'on appelle : un excès de vitesse !...

 

Alors Paul eut affaire à un policier, tout aussi classe et tout aussi bienveillant vis-à-vis des contrevenants que celui de son ami Marco.

 

Et comme Paul, sans être particulièrement musicien, connaît néanmoins la musique en de pareilles circonstances, il glissa très discrètement deux billets de cent bahts dans la main de son ''gourmandeur'' de service, qui la referma machinalement et n'eut pas ainsi à s'impatienter, comme dans le cas de Marco.

 

 

Ce fut alors que la femme de Paul, un tantinet plus … dominatrice que celle de Marco, en rajouta un peu en prenant d'autorité, devant le policier, le volant des mains de son mari ; lequel a la faiblesse de ne jamais rien refuser à sa femme !....

 

Hélas, si l'épouse de Paul ne commit aucun excès de vitesse, sa manière de conduire attira l'attention d'une patrouille de police, sise quelques kilomètres plus loin, en attente  elle aussi d'âmes bienfaisantes.

 

 

Comme l'épouse en question conduisait sans permis, le couple en fut quitte pour deux nouveaux billets de cent bahts, et Paul à reprendre le volant.

 

Depuis, la femme de Paul a passé son permis de conduire. Mais d'après les confidences de son mari, elle ne conduit pas mieux qu'avant !...

 

Ce qui nous amusa, Marco et moi, mais ne nous étonna pas outre mesure. Elle doit conduire ni mieux ni plus mal que ses compatriotes, c'est-à-dire en fermant les yeux et en remettant son destin entre les mains de Bouddha !...


Pour en revenir à l'objet de cette chronique, je pense qu'il est maintenant inutile d'entrer dans de grandes explications pour dire combien il est important sur les routes de ce beau royaume de toujours avoir sur soi quelques billets de cent bahts … salvateurs.

 

 

Cependant, pour bien remettre les choses dans leur contexte, alors que nos gamins de banlieue tapent le quidam sans le moindre respect, en le tutoyant et en lui balançant à brûle-pourpoint : ''T'as pas cent balles ?... '' ;  en ce beau royaume, tout se passe avec élégance et sans agressivité.

 

D'abord Les flics ont la pudeur de ne jamais rien demander, et ensuite la délicatesse de ne jamais rien refuser.

 

Car, à bien y réfléchir, ce sont les contrevenants qui sont des corrupteurs et non les flics des corrompus !... Non ?...



14/11/2009
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