BOUDDHA D’EMERAUDE (LE). 1/3
BOUDDHA D'EMERAUDE (LE). 1/3
Première partie :
LA DIVINE ORIGINE DE L'IMAGE
Le Bouddha d'émeraude du Wat Phra Kaew de Bangkok.
Ces trois photos montrent successivement le bouddha d'émeraude revêtu de ses trois habits d'or, qu'il porte selon la saison en cours … saison chaude, saison des pluies et saison froide.
Le changement de tenue est l'objet d'une grande cérémonie mettant en valeur la fonction royale.
Pour un bouddhiste le hasard n'existe pas.
En ce bas monde chacun occuperait la place qu'il ''mérite''. Car elle serait la concrétisation de la rétribution des actes méritoires obtenus lors de vies antérieures. Cette ''récompense'' ou ce ''châtiment'', résultant de cette loi bouddhique morale, porte le nom de ''karma''.
De ce fait un roi bouddhique est roi parce qu'il le mérite. Il a su, dans ses vies antérieures se conformer à l'enseignement du Bouddha, c'est-à-dire le dharma. Alors pour l'avoir déjà pratiqué, il sera d'autant plus capable en tant que roi, de veiller à son respect et à sa propagation.
D'ailleurs un roi Bouddhique porte le titre de ''Dharmarâja'' ou ''Dharmikarâja'' c'est-à-dire ''roi dharmique'' ou encore ''roi selon la loi bouddhique'' ; un roi qui règne en conformité avec l'enseignement du Bouddha et qui en est comme le dépositaire. Ce qui fait qu'il y a entre lui et Bouddha une relation à nulle autre pareille.
Intellectuellement donc, la légitimation d'un roi bouddhique s'explique par son karma, et relève du fait accompli. Matériellement cette légitimation se concrétise de différentes manières, comme par exemple la construction d'un monument ou la réalisation d'une statue, voire son appropriation. Ce qui est le cas avec le Bouddha d'émeraude. Un Bouddha qui protégea le Lanna, le Lan Xang (Le grand Laos) et qui maintenant veille sur les destinées de la Thaïlande.
Ce bouddha d'émeraude est donc bien plus qu'une image ou statuette, puisqu'il est la concrétisation de la légitimation du roi actuel, mais aussi de toute la dynastie Chakri. Ce qui n'est pas rien !
Il est, comme on dit, le palladium du royaume c'est-à-dire sa garantie et sa sauvegarde contre tous les dangers, et il est aussi son bienfaiteur.
Très souvent pour conforter une légitimation il existe des écrits qui accompagnent l'objet sacré et où apparaît généralement l'intervention de Bouddha.
Ces écrits sont la propriété de celui qui est légitimé et ne sont là, dans pratiquement tous les cas, que pour apporter du crédit à cette légitimation.
En 1778 en s'appropriant le bouddha d'émeraude les Siamois se sont aussi emparés du contenu de toutes les bibliothèques de Vientiane, ainsi que de celui de tous les monuments, palais et cætera !...
Or en Asie du Sud-est, foin des archives et du passé, les vainqueurs, quels qu'ils fussent, n'hésitaient pas à détruire tout ce qui se trouvait sur leur passage, y compris les temples mais … pas les images de Bouddha. La mise à sac d'Ayutthaya par les Birmans et de Vientiane par les Siamois, en sont les preuves.
Alors que sont devenus, s'ils y en avaient, mais il devait y en avoir, les écrits concernant le bouddha d'émeraude ?...
Sont-ils encore conservés quelque part à Bangkok ou ont-ils été détruits ?.... L'avenir - peut-être - nous l'apprendra. En tout cas, pour le moment, leur absence permet tous les stratagèmes, y compris celui de les substituer par des ''faux'' pour servir une bonne cause ?!...
Cette éventuelle substitution n'est évidemment qu'une hypothèse, mais elle ne relève pas de l'utopie. Les vainqueurs Siamois, et par la suite Thaïlandais, ont œuvré aux forceps pour imposer la langue siamoise afin d'unifier leur pays et ainsi d'en faire une nation à l'égale de celles des Occidentaux !....
Mais nous allons revenir sur ce sujet un peu plus loin.
Trois photos prises au Wat Phra Keaw de Chian-Raï.
Photo 1 : Le tableau d'entrée du Wat Phra Keaw avec en haut le nom du Wat en lettres Siamoises, donc de Bangkok, et en bas en lettres Yuön donc, du Lanna.
Photo 2 : Une page (ôle ou olle) d'un manuscrit en feuille de latanier. (Le mot ôle ou olle qui vient du Tamoul ôlei n'est pas dans le dictionnaire, mais ça viendra. Je pense qu'on dit un ôle ou une olle mais … je n'en suis pas certain.)
Photo 3 : Un coffre où sont rangés, en principe, les manuscrits en feuilles de latanier après avoir été enveloppés d'un tissu. (J'écris ''en principe'' parce que ce n'est pas toujours le cas … hélas !...)
Actuellement il existerait trois grandes chroniques (*) relatant la saga du bouddha d'émeraude, plus quelques autres au Laos, au Cambodge, en Birmanie en pays Shan et peut-être aussi, parmi les milliers de manuscrits de la bibliothèque Nationale ''Vajiranana'' (วชิรญาณ) de Bangkok, dont semblent se désintéresser les pouvoirs publics.
Il est vrai que la rénovation des temples attire plus les touristes que la mise en valeur d'un patrimoine littéraire, et que pour l'unité du pays toutes les traductions ne sont peut-être pas les bienvenues.
Pour être plus complet il existe aussi une compilation de divers documents sur le sujet dont les originaux auraient été ''découverts'' ''par hasard'' au sein de cette bibliothèque nationale par un certain Luang Prasoet. (หลวงประเสริฐ)
Cette compilation a été publiée à Bangkok en 1907 sous l'intitulé de ''Pongsawadan Yonok'' (พงสาวดารโยนก).
Autant dire d'emblée qu'elle n'apporte pas vraiment de nouvelles informations tant les événements relatés ont été épurés de tous détails. Personnellement elle m'a uniquement servi à avoir la bonne orthographe en thaï des noms propres.
Monsieur Camille Notton (1881-1961) parle aussi de cette compilation dont il écrit qu'elle est parue en 1908 ( ?) et que son traducteur Phraya Prajakit Korachak (พระยาประชากิจกรจักร) n'aurait retenu … ''de chaque manuscrit que la substance qui, de son point de vue lui apparaissait digne d'être conservée … '' ?!....
Oui mais … ce qui est digne d'être conservé pour les uns, ne l'est pas forcément pour ceux qui sont concernés ; et par réciprocité les passages qui ont été tenus dans l'ombre sont peut-être très intéressants du point de vue des gens concernés et attentatoires à certaines idées de ceux qui les ont ignorés !...
Cette parenthèse pour dire que tous les textes qui viennent de Bangkok sont loin d'être … parole d'évangile ou pour faire couleur locale … parole de tipitaka. Ils sont donc à prendre avec précaution car ils ont été ''revus et corrigés'' pour ne pas écrire ''manipulés''.
Mais revenons aux trois grandes chroniques.
Selon l'orientaliste Georges Cœdès (1886-1969) les trois auteurs de ces ouvrages concernant le Bouddha d'émeraude auraient puisé à une même source ; un manuscrit vraisemblablement rédigé en langue indigène.
Autrement écrit chacun des trois copistes, de son propre chef ou à la demande de son commanditaire, a rédigé une chronique en … ''l'enrichissant'' de nouveaux chapitres, ou en ''supprimant'' certains passages, pour toutes sortes de raisons.
Nos copistes du moyen-âge se conduisirent de la même façon.
(*) Ces trois chroniques sont :
1/ Amarakata buddharûpa nidâna (พระพุทธรูปพมรกตนิทาน) ou ''Contes de l'image du Bouddha d'émeraude'' d'Ariyavamsa, (อริยะวม) un auteur Birman du XVe siècle. Cette chronique écrite en pali et en ''yuön'' (La langue du Lanna), a été traduite en français puis en anglais en 1932 par le consul français de Chiang-Maï Monsieur Camille Notton (1881-1961).
2/ Jinakalamalini (ชินกาลมาลินี พงศาวดารเมืองเชียงใหม่) ou ''Chronique de Chiang-Maï''. Cette chronique écrite en pali entre 1516 - 1517 par le moine Ratana Panyayana ou Ratanapanna (รัตนปัญญาณ), (*) fut publiée à Bangkok en 1908. Elle fut aussi traduite par le Français Monsieur Georges Cœdès et publiée par l'EFEO en 1925 vol. XXV pages 1 à 189.
(*) Au moins trois moines portaient ce nom à l'époque, l'un d'entre eux résidait à Phayao. Certains chercheurs pensent que le véritable auteur serait le moine qui résidait au Wat Pa Dang de Chiang-Maï mais … rien n'est moins sûr.
3/ Ratanabimbavamsa (รัตนพิมพวงศ์) ou ''Histoire du Bouddha d'émeraude'' de Brahmarājapanna (พรหมราชปัญญา) de date incertaine. Cette chronique a été éditée en 1913, en Siamois, par les services de la bibliothèque royale de Bangkok, et rééditée en 1967 par le département des Beaux arts de Bangkok.
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Avertissement : Cette carte n'a d'autre objet que de situer les villes citées dans la légende. Autrement dit elle est Historiquement fausse mais géographiquement exacte.
Exemple : Chiang-Mai n'existait pas du temps de Balkh la capitale de l'empire de la Bactriane. Mais comme la légende jongle avec les noms … je suis obligé d'en faire autant pour bien rendre compte des emplacements des villes.
Légende :
Les villes marquées d'un point vert et dont les noms sont en italiques sont donc d'époque récente (Vers XIIe siècle pour la plupart).
Les villes indiennes, quand elles ne changent pas de nom défient le temps.
La ligne jaune indique les passages de la route de la soie.
Le tracé de l'empire de la Bactriane est très aléatoire et n'est pas à prendre pour argent comptant. Ce n'est qu'une indication.
Ainsi par exemple, la chronique du Bouddha d'émeraude intitulée ''Ratanabimbavamsa'', met l'accent sur les cultes à rendre au Bouddha d'émeraude, ce que ne font pas les deux autres.
Pour cette raison il n'est pas interdit de penser qu'une main très autorisée, et ayant autorité, se soit permise de rajouter quelques chapitres à la chronique pour institutionnaliser, voire donner du crédit aux dits cultes ?!... (1)
En ce temps là, le roi Mongkut dit Rama IV, (2) avait tout à la fois le bagage intellectuel, le savoir technique et l'accès aux archives royales (La bibliothèque royale nationale n'existait pas encore) (3) pour accomplir ce qui lui semblait nécessaire pour mettre son royaume sur un pied d'égalité avec les pays occidentaux.
Ne me faites surtout pas dire que le roi Mongkut se serait livré à cette … falsification. Je ne donne que l'exemple d'une éventuelle possibilité. Mais un individu ayant toutes les qualités et possibilités du roi aurait pu œuvrer en ce sens !...
Bref il faut être très prudent concernant le contenu de cette chronique et de la deuxième.
(1) Rama III, le demi-frère de Mongkut, a usurpé le trône de ce dernier. Alors ce n'est pas sans raison si Mongkut, de son vivant et contrairement à la tradition, a désigné son successeur, Rama V, et a fait du couronnement une cérémonie publique, à la vue de tous et non plus de quelques uns.
Quant à Rama V il a créé le titre de prince héritier en l'accompagnant d'un certain nombre de règles.
Le processus de la succession à l'occidentale était enclenché ; mais en pays bouddhique il faut l'intervention de Bouddha pour avaliser ce genre de situation.
Dans le cas présent l'habileté, via l'écrit, fait intervenir Bouddha à plusieurs reprises ce qui avalise d'autant plus la fonction royale.
En conclusion, si chacun à la place qu'il mérite en ce bas monde, l'habileté ou la violence (a) y sont aussi parfois (ou souvent ?) pour quelque chose.
(a) A son avènement Rama II n'a pas hésité à faire tuer plus de 120 personnes, qu'il jugeait capable de le renverser. Il y avait parmi elles quelques grands généraux de son père, Rama I.
(2) Mongkut ou Rama IV, (1804-1851-1868) était très loin de la caricature que Yul Brynner a pu en faire dans le film ''Le roi et moi'' en 1956.
Fin lettré et polyglotte, cet homme fut moine trente ans durant avant d'accéder au trône. Alors autant dire que le pali, et les langues locales n'avaient aucun secret pour lui. D'emblée il était capable de donner l'identité du moindre manuscrit. En plus, il parlait couramment l'anglais.
A son époque la plupart des Occidentaux considéraient les Siamois comme des ''sauvages'' ou des ''barbares''. Ce sont des mots qui reviennent souvent dans les livres de ce temps là. Mongkut va tout mettre en œuvre pour montrer que le Siam a un passé qui vaut celui des occidentaux.
C'est lui qui mit fin à la coutume d'allégeance que le Siam rendait à la Chine, et que le roi Taksin s'était empresser de rétablir après avoir chassé les Birmans. (Nous allons reparler de Taksin plus loin).
C'est lui qui ''écrivit'' – très librement – la légende de Nang Noppamas (นางนพมาศ). La reine de Sukhothaï qui serait à l'origine de la fête de Loy Krathon, aujourd'hui un des fleurons de la culture thaïlandaise. (Voire les chroniques sur ce sujet)
C'est lui qui interdira les processions du Bouddha d'émeraude pour mettre fin aux diverses épidémies qui s'abattaient sur Bangkok (Choléra etc…) en expliquant la cause de ces fléaux et en donnant les moyens pour les combattre.
C'est lui qui sera l'auteur de la première publication archéologique sur le Siam.
C'est encore lui qui ''découvrira'' la pierre de Ramkhamhaeng dans les ruines de Sukhothaï. Une stèle qui permit au Siam d'alors de revendiquer un glorieux et lointain passé comme … à l'égal des pays occidentaux (a).
Alors qu'il était supérieur du Wat Bowonniwet (วัดบวรนิเวศ du pali Pavara-niwesa), de Bangkok, donc pas encore roi, courant 1840 il y installera une imprimerie avec un atelier de gravure et de fonderie employant plus de 40 personnes, afin de faire connaître sa réforme concernant le Bouddhisme, l'ordre ou la congrégation ''Dhammayut''. (Certains disent secte Dhammayut ?!...)
Dans le cadre de cette réforme, entre 1840 et 1844, il enverra des missions au Sri Lanka pour aller y chercher des manuscrits lui permettant de ''revisiter'' et de compléter les textes religieux en usage au Siam.
Alors ce sera aussi, vraisemblablement, l'occasion ''d'harmoniser'' dans le même esprit des textes d'origine ''étrangère'', qu'il était nécessaire de faire connaître pour renforcer le pouvoir royal ?!... (Vous devinez les textes dont il s'agit non ?...)
C'est lui, et lui seul, qui dirigera les travaux d'exégèse de cette œuvre considérable et formera des élèves dont la tâche fut de la terminer.
Ces textes ''revus et corrigés'' pour servir au mieux le pouvoir en place seront édités en pali, mais aussi en Siamois tant pour les bonzes, dont la plupart ne comprenaient pas le pali, que pour les quelques laïcs lettrés ; environ 20% de la population d'après Mgr Pallegoix, vicaire apostolique au Siam.
Donc, en quelques décennies le papier va se substituer à la feuille de latanier (ôle), le siamois à l'écriture khom et aussi, mais en moindre mesure, au pali.
Cette révolution technique de l'écrit est à mettre sur le compte de Mongkut, qui fut aussi, anonymement, l'auteur de certains articles d'une presse balbutiante qu'il encouragea.
Chulalongkorn (จุฬาลงกรณ์) dit Rama V (1853-1868-1910) achèvera le travail de son père en éditant nombre d'ouvrages, dont la chronique de Chiang-Mai (Jinakalamalini) en 1908.
Cinq ans plus tard, donc trois ans après le décès de Rama V, le fils de ce dernier, Vajiravudh (วชิราวุธ) dit Rama VI, (1881-1910-1925) paraîtra L'histoire du Bouddha d'émeraude (Ratanabimbavamsa).
Autrement dit, seule la chronique Amarakata buddharûpa nidâna traduite par le français Camille Notton n'a pas été passée au crible du ''penser-bien''.
Quelques derniers mots sur Mongkut, pour lequel j'ai une certaine considération, car sans lui Rama V n'aurait peut-être pas accompli toute l'œuvre qu'on lui attribue.
(a) Si en son temps, avec la découverte de la stèle de Ramkhamhaeng, Mongkut réussit à ''tromper'' quelques érudits, et non des moindres, avec le temps … l'authenticité de cette stèle semble de moins en moins crédible.
Ainsi par exemple Maha Sila Viravongs (1905-1987) (Historien Lao qui prend trop les légendes au pied de la lettre et dont il faut lire les écrits avec un certain recul.) a écrit que … Vientiane, qui fut créée en 1356, a son nom de gravé sur la stèle qui elle daterait de … 1292, ce qui fait une différence de 64 ans.
Où le graveur d'antan était un devin, ou le faussaire d'hier avait séché quelques cours d'histoire du temps de sa jeunesse.
Bref !... la stèle figure en bonne place au musée de Bangkok et a été classée par l'UNESCO comme appartenant au patrimoine mondial !...
Le musée de la monnaie de Paris expose bien des faux tant ils sont réussis. Pourquoi cette stèle n'aurait-elle pas droit à un tel honneur ?...
(3) La bibliothèque Nationale Vajiranana (วชิรญาณ) fut créée le 12 octobre 1905, à l'occasion du centenaire de la naissance du roi Mongkut. Ses fils et plus particulièrement Rama V furent à l'origine de la fusion des trois bibliothèques royales.
L'appellation de Vajiranana vient de Vajirañāṇo, nom sous lequel Mongkut entra dans les ordres.
Photo 1 : Le roi Mongkut dit Rama IV (1804 -1851-1868)
Photo 2 : La pierre de Ramkhamhaeng telle qu'on pouvait la voir en novembre 2011 au musée de Bangkok.
Photo 3 : Alors que le Siam fête Loy Krathong, le Lanna célèbre Yi-Peng, mais c'est la même fête, un hommage rendu aux ancêtres et que le temps a quelque peu édulcoré.
Loy Krathong consiste à mettre à l'eau, en faisant un vœu, un tout mini radeau, un krathong, où vacille la flamme d'une bougie qui ne doit pas s'éteindre tant que l'embarcation reste visible.
Yi-Peng remplace le radeau par une mini montgolfière ou Khomfaï qui s'élève dans l'atmosphère.
A Chiang-Mai pour être certain que le vœu se réalise le Krathong ne va pas sans le Khomfaï.
Ici un Khomfaï zoomorphe géant, devant la porte Chiang-Maï en novembre 2011. Il s'agit de Phaya Hong (พญาหงส์), un oiseau fabuleux résidant dans la forêt de l'Himaphan.
Ces quelques précisions étant apportées venons-en au contenu des différents manuscrits en commençant par … le début. Un début qui fait du Bouddha d'émeraude l'image d'entre toutes les images, l'image d'exception puisqu'elle aurait été sculptée par un dieu, le dieu Vishnu.
Première partie de la saga du Bouddha d'émeraude :
La légende, pour ne pas écrire le conte, que j'ai très librement réécrit, d'après le Ratanabimbavamsa de Bangkok, commence en Inde quelques 500 ans après l'extinction de Bouddha, ce qui fait en 160 de notre ère. (1)
Elle met en scène un brahmane devenu moine bouddhiste, Phra Naksena (พระนาคเสน) (2) qui cherche à promouvoir auprès du plus grand nombre d'hommes l'enseignement de Bouddha ... le dharma.
Le saint homme est alors persuadé qu'une image du Bouddha (3) impulserait à l'intérieur de tout un chacun le désir d'entendre l'enseignement de Bouddha et de s'y conformer.
Phra Naksena est alors le supérieur du Wat Asokarem (วัด อโศการาม) de la ville de Pataliputra (ปาฏลีบุตร) aujourd'hui Patna en Inde du nord-est, capitale de l'état du Bihar.
Le désir et la volonté de Phra Naksena sont tels qu'ils parviennent jusqu'au pied du mont Méru, là où résident les dieux.
Touchés et émus par la sincérité du moine, Indra et Vishnu décident d'aller lui rendre visite.
Lorsque Phra Naksena découvrit leur présence dans le jardin de son Wat, parmi les paons et les effluves de jasmin, il alla se jeter à leurs pieds et les supplia de satisfaire sa demande.
Alors en dieu magnanime Indra ordonna à Vishnu d'aller sur les pentes du mont où régnait Ishvara pour s'enquérir de la pierre la plus précieuse d'entre les pierres les plus précieuses.
Comme Vishnu sembla ne pas avoir entendu l'ordre, Indra insista.
Alors Vishnu, peu fier et tombant à genoux devant le dieu des dieux, expliqua que d'obscurs démons gardaient ces trésors avec tout autant de soin que les rois Siamois leurs éléphants blancs ; (4) et qu'en plus ils réduisaient à néant tous ceux qu'ils surprenaient à prendre la moindre de leurs pierres.
Pour apaiser les craintes de Vishnu Indra lui posa la main sur son épaule et de conserve ils se dirigèrent vers la montagne du seigneur Ishvara.
A leur approche les démons, dont la vigilance n'avait d'égal que leur agressivité, se firent menaçant puis, reconnaissant Indra, ils se campèrent dans une attitude plus sereine, mais néanmoins hostile.
Alors Indra leur expliqua qu'avec Vishnu ils étaient venus chercher une pierre d'exception pour réaliser une image de Bouddha.
Les démons commencèrent par arguer qu'ils étaient là pour servir le seigneur Ishvara et personne d'autre. Mais comme il était question de Bouddha, et que ce nom leur imposait du respect, ils convièrent les deux dieux à les suivre pour leur montrer le plus beau spécimen de leurs minéraux.
C'était un morceau de jade à nul autre pareil et d'un vert d'une profondeur à bouleverser les cœurs les plus hermétiques au dharma.
En découvrant ce bloc de pierre d'un vert profond, les deux dieux furent saisis d'admiration, et d'emblée convaincus que c'était la pierre qu'il leur fallait pour créer l'image de Bouddha.
Ils demandèrent à l'emporter.
Les démons commencèrent par refuser. Puis une fois de plus, en entendant le nom de Bouddha pour lequel ils avaient beaucoup de respect, ils revinrent sur leur décision.
Des dieux qui par la magie de l'hindouisation ne sont plus tout-à-fait les mêmes en Indochine qu'en Inde … par exemple ...
Photo 1 : L'une des représentations de l'imagerie populaire indienne de Brahma sur son vāhana, (son véhicule céleste.) un paon.
Photo 2 : L'une des représentations thaïlandaises de Brahma, dont le nom s'est transformé en Phra Phrom (พระพรม).
Photo 3 : Phra Indra (พระอินทร์) vu par un artiste thaïlandais.
Photo 4 : Indra tel que le représente l'imagerie populaire indienne. Son vāhana est un éléphant qui en général a quatre têtes. Il se nomme Airavata en Inde et Erawan (ช้างเอราวัณ) en Thaïlande.
Lorsque Phra Naksena découvrit la pierre dans le jardin de son Wat il n'en crut pas ses yeux ; et son cœur, tout d'un coup, retrouva sa légèreté d'antan.
Alors Indra ne voulant pas rompre ce moment de félicité, s'en retourna sur la pointe des pieds tout en haut de son mont Méru, en laissant Vishnu et le saint homme.
Phra Naksena après une longue extase, découvrant l'absence d'Indra questionna Vishnu du regard.
Ce dernier avec la dextérité d'un prestidigitateur, et sans dire le moindre mot, se saisit du bloc de jade; et en moins de temps qu'il faut pour l'écrire, il le transforma en une superbe image de Bouddha sans que la moindre poussière de matière n'allât choir sur le sol.
D'une masse sans forme mais d'une qualité exceptionnelle il avait créé une image d'une grande perfection d'où irradiait la force et la sérénité de Bouddha.
Après avoir remercié Vishnu le supérieur du Wat s'empressa de faire construire une demeure digne de l'image et l'exposa à la vénération des fidèles qui affluèrent du monde entier afin de la contempler, de la vénérer et … de prêter l'oreille au dharma.
Le bouddhisme allait pouvoir ainsi s'épanouir 5.000 ans durant sur la totalité de la terre !...
Fin de la première partie dont l'objet était de faire du Bouddha d'émeraude une image divine n'ayant rien à voir avec toutes les images profanes, mais néanmoins sacrées, qui ont pu être créées par les hommes.
Pour parvenir à cet objectif l'auteur met l'accent sur deux points.
Tout d'abord, le créateur de l'image est un dieu, Vishnu et non un homme.
Ensuite l'émeraude a été tout spécialement conçue pour l'image en question. Ce n'est pas une émeraude trouvée miraculeusement, par hasard, et qui aurait pu être utilisée pour tout autre chose.
Non, c'est une pierre précieuse qui dès sa création était destinée à devenir l'image du Bouddha … dit d'émeraude.
Car Ishvara n'est autre que l'un des noms du dieu Brahma, l'un des dieux appartenant à la trinité indienne, Brahma, Vishnu et Shiva. C'est celui qui personnifie le Brahman ; c'est-à-dire ce qui est à l'origine de toute création et où tout retourne en fin d'existence.
J'ai fait l'impasse sur la prophétie de Phra Naksena, mais nous y reviendrons à l'occasion de la deuxième version du conte.
Enfin, notons au passage que Bouddha, qui n'est pas un dieu, est au-dessus de ces dieux. Les dieux sont à ses pieds et ne lui refusent rien. Ils sont comme des adorateurs et des protecteurs de Bouddha !...
Photo 1 : Une des nombreuses représentations du théra Phra Naksena ou Phra Nâgasena.
Photo 2 : Une statue de Bouddha de l'école Gandhara des Ier – IIe siècles. Elle se trouve au musée national de Tokyo (Japon).
Photo 3 : Une pièce de monnaie à l'effigie du roi indo-grec Ménandre, (le sauveur) ou Basileos Soteros Menandrou (160 -130 av.JC) (ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΣΩΤΗΡOΣ ΜΕΝΑΝΔΡΟΥ) roi de la Bactriane.
Photo 4 : Un quintet de Nagas se trouvant à l'entrée du Wat Buppharam, rue Thapae à Chiang-Maï extra-muros.
(1) L'auteur de la légende s'appuie sur le charisme de Phra Naksena pour inclure son récit dans l'Histoire de l'humanité et lui donner ainsi plus de crédibilité. Cependant il commet une petite erreur de deux siècles environ. Car le nom de Phra Naksena n'apparaît que dans un seul manuscrit connu à ce jour. C'est un texte qui le met en scène avec le roi indo-grec Ménandre, ou Basileos Soteros Menandrou (160 -130 av.JC) (Milinda en Pali) et Phra Djao Milina en Thaïlandais (พระเจ้ามิลินท์) roi de la Bactriane.
540 ans environ s'insèrent entre la naissance de Bouddha et celle du Christ. Bouddha s'étant éteint vers 80 ans, les 500 ans ne commencent qu'en 460 av. JC. (540 – 80) = 460 ans.
Autrement dit les 500 ans se terminent en 40 de notre ère. Or si le roi Ménandre régnait en -140, entre -140 et 40 il y a 180 ans … pratiquement deux siècles !...
Alors à moins d'avoir vécu plus de 200 ans Phra Naksena ne pouvait être en vie 500 ans après l'extinction de Bouddha.
(2) Phra Nak-sena se compose de deux mots outre le titre de Phra.
1/ Nak se traduit par nâga ; et Phra Nak est une divinité aquatique. C'est le roi des nâgas qui porta secours à Bouddha à plusieurs reprises. L'homonymie sert à merveille l'auteur de la légende.
2/ Sena signifie vase, la vase des fonds sous-marin, mais aussi en langue Pali … ''armée''. Car sena a été traduit du pali.
Phra Nak-sena a donc à la fois la signification d'une divinité aquatique venue du fond des eaux, et de divinité ayant la puissance d'une armée.
Autrement dit, Phra Nak-sena, Phra Nâgasena ou Phra Nâgasenn (Entre autre orthographe.) est donc un moine hors du commun, avec un tempérament hors pair, et pour ces raisons l'interlocuteur idéal pour dialoguer avec les dieux.
Du fait de sa sainteté, car il aurait atteint l'éveil comme Bouddha, il porte le titre de ''Arhat'', ''Arhant'' ou ''Lohan'' et figure souvent parmi 18 autres lohans, dont … Subinda, Maitreya, Vanavasin etc… etc …
Phra Naksena ou Nâgasena est celui qui se récure l'oreille avec un bâtonnet pour signifier qu'il ne faut pas prendre pour argent comptant tout ce qu'on entend et qu'il est nécessaire de chasser de son conduit auditif les sons et les paroles préjudiciables à un bon équilibre de vie.
(3) Le mot image est préféré au mot statue par les Thaïlandais. Alors ces deux mots sont donc synonymes. (Image et statue).
D'après la légende Vishnu remit à Phra Naksena l'image d'un bouddha ayant une apparence humaine. Or Bouddha, en 140 av. JC, et deux siècles avant les 500 ans qui soi-disant suivirent son extinction, était encore représenté par des symboles, comme la roue du dharma, et non sous forme humaine.
Les toutes premières ''statues'' anthropomorphes de bouddha sont apparues entre le Ier et le IIe siècle de notre ère ; au Gandhara (Pakistan & Afghanistan d'aujourd'hui) taillées dans le schiste, et certainement un peu plus tard à Mathura (Ville indienne du nord ouest) sculptées dans du grès rose.
Ce sont vraisemblablement les grecs du Gandhara, descendants des soldats d'Alexandre le grand (-356/-323) et conquis au bouddhisme, qui les premiers donnèrent un visage à Bouddha. Leurs œuvres trouvèrent un écho favorable dans les villes de Mathura puis Sārnāth et ensuite dans toute l'Inde.
(4) Je n'ai pas pu résister à faire mienne la formule concernant les soins prodigués aux éléphants blancs par les rois siamois. Car elle est très belle.
En fait, elle appartient à Marian Davies Toth auteur d'un livre de contes … Thaïlandais et ne figure évidemment pas dans les manuscrits qui ont été traduits.
A propos de la matière du Bouddha dit d'émeraude :
Le bouddha dit d'émeraude serait en fait un bloc de jaspe, pouvant venir tout à la fois de Birmanie, de Chine ou encore de Nan, une région du Lanna où ce quartz est présent et avec lequel sont sculptés, encore actuellement, des petits bouddha.
Cette roche sédimentaire contient du silicate de fer, qui lui donne sa couleur vert foncé d'où ses noms de ''jaspe vert indien'', ''jaspe plasma''.
Il est difficile d'en savoir plus sur la matière réelle du Bouddha d'émeraude, dont on sait seulement qu'il n'est pas en émeraude. A l'heure actuelle personne n'est autorisé à toucher ou examiner ce Bouddha. Alors … difficile d'en savoir plus !...
CARTE DE L'INDOCHINE AUX ENVIRONS DU XIVe et XVe siècle.
Nota bene : Compte tenu des alliances et des vassalités qui changeaient au gré des opportunités il est difficile de dresser une carte plus précise d'autant qu'en ce temps là les limites d'un royaume restaient très vagues !... alors c'est du grosso modo !... mais qui permet de se faire une idée de la situation.
Deuxième version de cette légende :
Cette légende est tirée cette fois de la Jinakalamalini de Chiang-Mai traduite par Georges Cœdès en 1925. Le conte, là encore, est très librement réécrit, mais fidèle au contenu.
Cinq cents ans après l'extinction de Bouddha le thera Nâgasena devenu supérieur de son Wat, réfléchit à la manière de propager le Bouddhisme.
C'est alors que l'idée d'une image du Bouddha se fait jour dans son esprit et le séduit.
Pour mettre cette image à l'abri de la cupidité des générations futures il décide alors d'utiliser non pas l'or et l'argent mais une pierre précieuse chargée de pouvoirs surnaturels.
Son idée est si belle que tout aussitôt Sakka, (Indra en pali) le roi des dieux et Vissukamma (Vishnu) (1) quittent leur séjour céleste pour descendre sur terre afin d'aider Nâgasena, qui accepte leur concours de bon cœur.
De conserve et après que Vissukamma, non par crainte mais pour cause d'humilité, se fut fait tirer l'oreille par Indra, les deux créatures célestes se rendirent au pied du mont Vipulapabbata ou … la noble et généreuse montagne.
Au pied de la montagne, Sakka, ne doutant de rien demanda au roi des Kumbhandas, (2) tenant le rôle de gardiens, de se faire remettre le manijoti, c'est-à-dire … la plus belles de toutes les pierres.
Sa demande fut refusée, mais on lui proposa en échange, et courtoisement, une émeraude de deux coudées et trois pouces, (3) qu'il accepta et alla déposer aux pieds de Nâgasena.
Dans cette partie du conte le nom de Bouddha n'a pas été prononcé ou écrit une seule fois. La pierre est remise à Sakka parce qu'il l'a tout simplement demandée. Ce détail n'est pas sans importance. Car le nom de Bouddha n'a pas été le sésame comme dans l'autre version.
Alors que Nâgasena se demandait qui allait bien pouvoir devenir le maître d'œuvre de sa statue, Vissukamma, au même instant se présenta à lui sous les traits d'un sculpteur de pierres.
Sept jours et sept nuits lui furent nécessaires pour réaliser son œuvre, un chef-d'œuvre !... que les moines et les dieux adorèrent une semaine durant, de jour comme de nuit, tandis que, parallèlement, le bouddha d'émeraude accomplissait miracles sur miracles.
Après ces dévotions, Nâgasena convia alors sept saintes reliques à prendre possession de l'image.
Selon la place qu'elles se choisirent le thera prophétisa que le bouddha d'émeraude serait célèbre en trois royaumes, le Kamboja (Cambodge), l'Arimaddama (Pagan, cœur de la Birmanie) ; et le Syāma (Chiang-Maï, cœur du Lanna). (4)
Vishnu … Vissukamma et Phra Naraï !...
Photos 1 & 2 : Deux représentations de l'imagerie populaire indienne de Vishnu sur son vāhana, (son véhicule céleste.) l'aigle mi-homme mi-oiseau Garuda.
Photo 3 : Vishnu devenu Vissukamma, (l'architecte divin) au Cambodge, et Phra Naraï (พระนารายณ์) en Thaïlande.
Ici il attend très patiemment d'être fixé sur son vāhana, Garuda, afin de parader en fin de soirée lors du défilé de Yi-Peng de novembre 2009.
Photo 4 : La monture de Phra Naraï, Garuda (ครุช) qui lui est déjà à la proue de son … Rotkrathong. (Char de défilé) (รถกระทง)
(1) Au début du bouddhisme Vissukamma, qui deviendra Vishnu, apparaît comme un aide d'Indra. C'était l'architecte divin à qui fut attribué, par des légendes, quelques constructions d'Angkor.
Avec le temps il deviendra un dieu à part entière et appartiendra au trimūrti Indien (La trinité hindoue) en compagnie de Brahmā et de Shiva.
(2) Les Kumdhanda ou les Kumphan sont des géants à la mine patibulaire au service d'Indra. Ce conte les a mis au service du ''monarque universel'' c'est-à-dire Ishvara ou … Brahma.
(3) Dans cette version, à aucun moment le nom de Bouddha n'a été écrit, et les Kumdhanda n'ont pas été agressifs.
(4) Dans la version précédente Nâgasena faisait aussi une prophétie. Mais il donnait alors cinq pays et non pas trois, ce qui renforçait la prédiction et la prescience du moine.
Il est vrai qu'en 1913, il était plus facile à un auteur de lister, sans faire d'erreur, des pays ayant existé entre 1516 et 1913 (*) ; ce qui était beaucoup plus difficile à un copiste de 1516 à moins d'être … devin comme Nâgasena !...
(*) Ce nouvel indice vient appuyer ma thèse de la réécriture ''idéologique''.
Les noms des cinq pays de la première version étaient : le Lankadvipa (Sri Lanka), le Ramalakka (a), le royaume Dvāravatî (*) (Royaume des Môns du sud de la Thaïlande) le Lanna (Chiang-Maï) et le Lan Xang (Laos).
(a) La localisation du Ramalakka, Ramalakkha en pali ou Raman en siamois, reste une énigme.
Pour certains se serait Pegu (Ramalakkhanagara) et par voie de conséquence Pagan et la Birmanie.
Le Culavamsa (Chronique du Sri Lanka) fait du créateur de Pagan, le roi Anuruddha, (1044-1077) le roi des Ramanna appelé aussi Suvannabhumi.
Encore jeune conquérant, Anuruddha venait tout juste de conquérir la cité mône de Pegu, c'est-à-dire Ramalakkhanagara.
Au moment des faits Pagan sortait de l'ombre, presque personne ne connaissait cette citée, alors que sa conquête, Ramalakkhanagara était une cité florissante très connue. Il était alors plus significatif de préférer le nom de cette dernière à celui de Pagan pour désigner le royaume d'Anuruddha. Très vite avec le temps la tendance s'inversera et Pagan laissera dans l'ombre Pegu ou Pégou.
Pour d'autres il pourrait s'agir de la ville de Nan au Lanna, voire la région de Bassac au Laos. Le débat reste ouvert mais l'explication concernant Pegu me paraît tout à fait adéquate.
(*) Là encore en 1913 seuls quelques érudits devaient connaître la civilisation Dvāravatî !... encore un indice de ''réécriture … idéologique'' !...
Photo 1 : Un Gardien ou Kumphan gardant l'entrée du Wat Lokmoli de Chiang-Maï extra-muros – rive nord de la douve.
Photo 2 : Ishvara, Brahma ou Phrômachak ou encore en Thaïlande … Phra Phrôm, (พระพรหม) une terre cuite de style Lanna (*)
Photo 3 : Phra Vishnu, (พระวิษณุ) (พระวิษณุกรรม) ou (พระเวสสุกรรม) ou encore en Thaïlande … Phra Naraï, (พระนารายญ์) une terre cuite de style Indianisé (*)
Photo 4 : Un autre kumphan (*)
(*) Ces trois œuvres se trouvaient dans le jardin de la Société Terra cotta de Chiang-Mai intra-muros à 100 mètres de la porte de Chiang-Maï. Un jardin qui se visite et dont l'entrée est gratuite. Alors si vous passez à côté !....
Premières conclusions :
A la lecture de ces récits deux évidences apparaissent clairement :
1/. Concernant la Jinakalamalini : La légende du Bouddha d'émeraude est postérieure à sa découverte. Elle a été inventée pour satisfaire aux goûts du merveilleux des hommes de cette époque et par la même occasion pour crédibiliser un maximum la notoriété naissante de la statuette, pas de Bouddha pour qui c'était et c'est déjà fait, mais de la statuette. L'animiste est très présent.
C'est en 1434 ou 1436 que l'image du Bouddha d'émeraude a fait parler d'elle et c'est en 1516 qu'on a écrit sa légende. Un siècle sépare ces dates, ou pour être plus précis quatre vingt-deux ans durant lesquels a du se créer la légende. Mais une légende sans autre visée que celle de donner du pouvoir à la statuette qui est en quelque sorte une amulette géante ou plutôt … un talisman qui serait doué de pouvoirs exceptionnels.
2/.- Concernant la Ratanabimbavamsa : La légende diffusée (*) par cette chronique est pratiquement la même que la précédente, à la différence qu'elle répond à un objectif supplémentaire, elle fait de Bouddha un catalyseur c'est-à-dire une Jeanne d'arc à la Siamoise. Bouddha et par derrière lui le roi, devient le symbole unificateur du nouveau grand Siam, celui de 1782 dont nous parlerons plus loin.
(*) J'ai bien choisi mon mot car c'est bien de propagande dont il s'agit. A la manière des évangélistes qui imprimaient des bibles, pour évangéliser les Siamois, Mongkut, et par la suite son fils Chulalongkorn, fit éditer des publications pour renforcer le pouvoir royal.
FIN de cette première partie
Pour lire la suite se rendre dans : LEXIQUE et …
Cliquer sur : BOUDDHA D'EMERAUDE (LE) 2/3.
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