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LOY KRATHONG ET SES ORIGINES KHMERES : (1ère partie)


LOY KRATHONG ET SES ORIGINES KHMÈRES:

 

 

 

                             PREMIÈRE PARTIE

 

 

 

 

Avertissement : Les événements historiques qui vont suivre sont exacts. Par contre l'hypothèse qui les lie n'est que le fruit de mon imagination.

 

Une imagination trop débordante ou relativement proche de la réalité ?....

 

À vous de juger et à vous faire votre propre opinion.

 

 

 

 

Avec la mise en lumière des origines Chinoises et hindoues de loy krathong il est apparu que les hommes, un peu partout dans le monde, ont eu et développé à peu près les mêmes idées.

 

Nos prédécesseurs croyaient qu'après la mort la vie des défunts se poursuivait sous terre et qu'il était nécessaire de nourrir leur ''âme'' (mânes).

 

C'est pourquoi à certains jours de l'année ils déposaient de la nourriture sur les tombeaux.

 

Le liquide était répandu sur le sol, et le solide mis dans un trou creusé à cet effet pour qu'il parvienne à son destinataire. Près des tombeaux romains il y avait même une ''culina'' c'est-à-dire une espèce de petite cuisine pour préparer les mets.

 

A défaut de ces usages, l'âme affamée sortait de son tombeau pour se mettre en quête de nourriture. C'était ce manque de nourriture qui la rendait soi-disant malfaisante, tandis que l'âme qui était bien nourrie était bienfaisante.

 

Ce culte des morts n'était alors rien d'autre qu'un culte pratiqué en famille, parce qu'il ne concernait que les ancêtres d'une famille en particulier.

 

De ce fait personne d'autre, que les membres de la famille, ne pouvait prendre part à ces manifestations particulières, propre à chaque ''foyer'' … familial.

 

 

En ces temps anciens donc, la mort n'avait pas un rôle de destruction, ou de négation ; bien au contraire elle remplissait une fonction de sublimation, pour ne pas écrire de divinisation, du souvenir des disparus.

 

L'ancêtre était alors comme un ''dieu'', (*) un mânes particulier à la famille que les vivants nourrissaient et qui en échanges les protégeait de là où il était.

 

 

(*) Les Romains appelaient leurs morts ou ancêtres, les dieux cachés, les dieux de l'intérieur ou encore les dieux domestiques, (Dii pénates) voire la puissance paternelle d'après Michelet !...

 

Ce culte des ancêtres, issu de la subjectivité, était parallèle aux cultes naturistes qui eux étaient communs à l'ensemble d'une communauté ou d'un groupe. L'observation de la nature fut à l'origine des cultes collectifs qui eux naquirent de l'objectivité.

 

Ces sont ces deux types de cultes qui sont à la base de l'animisme. 

 

 

 

Autrement écrit, plus les vivants étaient généreux vis-à-vis de leurs ancêtres, et plus les ancêtres étaient aux petits soins de leurs descendants … en ligne directe.

 

 

Certains auteurs des siècles derniers écrivaient qu'en Indochine, des familles n'hésitaient pas à se mettre dans la gêne et à s'endetter pour que leurs défunts ne manquassent de rien.

 

 

 

 

Le cimetière de Wuxi en Chine. Il y a des tombes à perte de vue, la colline en est recouverte. Et ce n'est qu'une des collines, parmi quelques autres !... Toutes les tombes ont une pierre tombale.

Photo de gauche : De modestes pierres tombales avec, sur la droite, des boitiers en attente d'une urne !....

Sur les deux autres photos : Des enfants et petits enfants vont sur la tombe des ancêtres, qu'il faut retrouver et débroussailler. Ce qui est loin d'être évident car le terrain est en pente, glissant et très accidenté. Lorsque la tombe est mise à jour à coups de serpe, quelques aliments sont déposés sur la pierre tombale. Alors chacun se recueille, des photos sont prises, puis l'expédition se termine au restaurant d'à côté où les aliments des ancêtres seront au menu. C'était en octobre 2008  

 

 

 

 

D'après Léon de Milloué, (1842-192 ?) alors conservateur du musée Guimet, ''… il y avait au moins une fête par mois en l'honneur des morts (ancêtres) dont quatre plus particulièrement solennelles, celles du jour de l'an, de la fête des tombeaux, de l'ouverture de l'enfer (*) et du solstice d'hiver.'' (Conférence du 6 mars 1900)

 

 

(*) Le nom de ''l'ouverture de l'enfer'' indique que le brahmanisme avait déjà fait son apparition, car avant ce culte il n'y avait pas d'enfer ; et que ses idées s'étaient propagées au-delà du sous-continent Indien.

 

 

 

Ces nombreuses festivités ont fait dire à la plupart des orientalistes que ''la vraie religion du chinois et de tout l'Extrême-Orient c'est d'abord le culte aux ancêtres.''. (*)

 

Léopold Cadière, (1869-1955) un missionnaire français ayant vécu 63 ans au Viêt-Nam écrivait même '' … la vraie religion des Vietnamiens est le culte des esprits et non le bouddhisme. ''

 

 

L'Inde avec ses livres de comptes déposés sur le petit autel (**) de la maison, à l'occasion de Puja Lakshmi lors des fêtes de dipāvalī, n'est rien d'autre qu'un stigmate de ce très ancien culte.

 

 

(*) Récapitulatif des quatre grandes fêtes dédiées au culte des ancêtres dans le sud-est asiatique et en Chine d'après Léon de Milloué.

Ce ne sont pas forcément les plus en vogue touristiquement parlant. Ainsi la fête des lumières d'octobre-novembre n'y figure pas ?!...

Il y a alors :

 

1/ fin janvier - début février - 2/ courant avril (équinoxe du printemps) - 3/ fin août - début septembre - 4/ Courant décembre.

Toutes ces fêtes sont mobiles car ce sont des fêtes liées à la lune.

 

Birmanie :

1/ Fête des moissons (et de l'union) (*) 2/ Thingyian (Fête de l'eau)  et quelques jours plus tard … Kason Nyang Ye (*) 3/ Thadingyut (Fête des lumières) (*) 4/ Multiples fêtes locales concernant les nats, des esprits spécifiquement Birmans.

(*) Le culte aux ancêtres a été remplacé ou est associé par/à une fête civile ou bouddhique.

 

Cambodge :

1/ Meak bauchea 2/ Chaul-Chlnam (Nouvel an et fête de l'eau) 3/ Prachum Ben (La quinzaine des défunts ou ancêtres ?!...) 4/

Nota : Les fêtes sont nombreuses mais elles n'ont pratiquement plus rien à voir avec les grandes fêtes d'antan dont parle Léon de Milloué. Le bouddhisme à presque fait main basse sur toutes.

 

Chine :

1/ Nouvel an 2/ fête des ancêtres ou Qing Ming 3/ fête des âmes errantes ou des esprits affamés. (Les esprits sont libérés des enfers.) 5/ fête de la divinité du foyer.

  

Laos :

1/ Boun Khoun Khao (Fêtes des moissons liées aux ancêtres durant tout mars) 2/ Boun Pimay (Nouvel an et fête de l'eau) 3/ Boun Khao Padapdin et quelques jours plus tard Boun Khao Salak (*) (Fêtes des ancêtres) 4/ Fête de la pleine lune.

(*) Avec Boun Khao Salak les offrandes sont faites aux moines, mais pour les ancêtres. On retrouve l'esprit de la fête des lanternes chinoises. C'est d'ailleurs la fin du carême bouddhique.

 

Thaïlande :

1/ 2/ Songkran (Nouvel an et fête de l'eau) 3/ Loy Krathong ou Yi Peng 4/

Nota bene : Même remarque que pour le Cambodge.

 

Viêt-Nam :

1/ Têt Nguyên Dán (nouvel an) 2/ Têt Thanh Minh (visite aux demeures des ancêtres auxquels sont offerts des aliments froids) 3/ Têt Trung Nguyen (journée des âmes errantes) 4/ Têt Song Than

 

(**) Il est peut-être bon de rappeler que l'autel a pour origine la pierre tombale, dont l'objet était de permettre aux mânes (âmes) partis dans la nature de retrouver aisément leur demeure.

 

C'était sur cette pierre que les vivres pour les ancêtres étaient déposés. Ce fut aussi cette pierre qui fut élevée pour rendre gloire à des ancêtres communautaires ayant protégé la collectivité.

 

L'autel est alors devenu l'endroit des sacrifices, où l'on donnait ou célébrait la mort en échange d'une vie meilleure. Les chrétiens nomment cette célébration le mystère pascal. C'est le Christ qui donne sa vie pour racheter les fautes des hommes, et leur permettre d'accéder à la vie … éternelle !...    

 

Nota bene : Tous les ouvrages qualifient ces fêtes de … ''fêtes des morts'' alors qu'il s'agit en fait de … ''fêtes des ancêtres'', ce qui n'est pas du tout la même chose. Un mort est mort, et un mort est sans vie. Or un ancêtre, dans l'esprit des gens d'ici, est toujours vivant auprès des siens, car c'est lui qui les protège des vicissitudes de la vie terrestre.    

 

 

 

 

 

 

Le cimetière de Wuxi en Chine et quelques demeures de mânes toutes marquées d'une pierre tombale.

C'est grâce à la pierre que le mânes retrouve son domicile. Selon la générosité des descendants elle est modeste ou prend forme d'une véritable table, voire … d'un autel  ou d'un splendide mausolée ?!...

 

 

 

Avec le temps les idées ont évolué, et en Extrême-Orient l'hindouisme a pris ''l'avantage'' sur la plupart des autres formes de pensées encore à l'état embryonnaire ou en cours de développement.

 

C'est pourquoi vers le VIe siècle av. JC. cette religion était comme une référence à bien des points de vue. Alors à partir du IVe ou IIIe siècle av. JC. les dieux brahmaniques ont été adoptés par d'autres peuples habitants l'Extrême-Orient, tout comme ils l'avaient été par les bouddhistes de l'Inde quelques temps auparavant.

 

C'est vers cette époque que la culture Indienne, en compagnie du bouddhisme, sont arrivés en Chine en empruntant la route de la soie.

 

Entre le IIe siècle avant J.C. et le IIe siècle après JC., les dieux hindous et le bouddhisme parviendront jusqu'à Chengdu (Chine du Sud) par la route reliant l'Assam au futur royaume de Nanzhao, (*) via la haute Birmanie.

 

(*) Le Nanzhao deviendra le royaume de Dali, puis le Yunnan.

 

 

La Chine développera ces héritages en les associant à ses différents ''systèmes'' philosophiques. Mais par la suite elle n'influencera véritablement, dans la région qui nous intéresse et beaucoup plus tard, que le nord Viêt-Nam. C'est-à-dire les terres du Tonkin et de ses alentours. Une large contrée qu'elle n'a jamais réussi à annexer, malgré ses différentes tentatives.

 

Les montagnes et la volonté de rester maître chez eux des Annamites mirent un frein aux ambitions territoriales chinoises dans cette région.

 

 

De tous temps les Chinois considérèrent leurs rapports avec les … ''barbares du sud'' … ou d'ailleurs, qu'en termes de suzeraineté, et leurs vassaux devaient leur verser un tribut.  

 

Ces impérialistes dans l'âme ont toujours mené une politique d'annexion à leur empire. Le Tibet, si besoin en était, est le parfait exemple de cette politique qui a perduré jusqu'à nos jours malgré les changements de dynasties et de régime. Chassez le naturel et il revient au galop !...

 

 

Néanmoins par le biais de l'immigration ''individuelle'', mais bien après la naissance du Christ, un certain nombre de concepts chinois se sont immiscés dans les différentes cultures du sud-est asiatique. Des cultures qui pratiquaient déjà le culte des ancêtres parce que ce culte, comme nous l'avons déjà souligné, est inhérent à toutes les sociétés humaines.

 

 

 

A gauche : 2004 - Un village de iourtes entre Turfan (Tǔlǔfān) et Urumqi.

Au centre : Carte de l'Extrême-Orient vers le Ve siècle.

La légende :

Les lignes jaunes représentent les grandes voies de communication de l'époque, dont la route de la soie.

Les points verts situent des villes qui sont à naître.

A droite : 2004 – Une place de la ville d'Urumqi.

 

 

 

 

Tandis que la culture Indienne et le bouddhisme se répandaient en Chine, comme nous venons de le voir, l'hindouiste pénétrait les côtes de la péninsule Indochinoise, y compris les îles indonésiennes comme Java et … Bali.

 

 

La pénétration s'opéra d'autant mieux que ''l'hindouisation'' (*) fut une colonisation sans but politique mais seulement commerciale et, que les échanges entre Hindous et ''barbares du sud'' (**) se firent sur un pied d'égalité.

 

 

 (*) Le mot ''hindouisation'' est de l'orientaliste Georges Cœdès. (1886-1969) Il désigne ''l'expansion de la culture indienne''. Pour en savoir plus la concernant, se reporter à son ouvrage ''les états hindouisés d'Indochine et d'Indonésie'' page 35.

 

(**) En écrivant le mot ''barbare'' avec un ''B'' majuscule les Grecs et les Romains voulaient désigner un homme qui ne parlait pas leur langue, donc un étranger, civilisé ou non.

Ce mot désigne aujourd'hui un ''sauvage'' ou un homme non civilisé.

 

Que sous-entendaient alors, et encore maintenant, les chinois qui utilisaient et utilisent ce mot ?....   

 

 

 

 

Cette hindouisation se déroula en deux étapes. (*) La première au IIe et IIIe siècle de notre ère fut comme la préparation de la seconde, (IVe et Ve siècle) mais sans avoir été accomplie dans cette intention. Car les deux mouvements migratoires s'enchaînèrent tout à fait fortuitement et au bénéfice de toutes les populations.

 

Lorsque les émigrants hindous de la dernière vague migratoire abordèrent les côtes du sud-est asiatique, les uns s'intégrèrent aux communautés existantes et, les autres créèrent de nouvelles colonies quand ils n'en trouvèrent pas.

 

Ces communautés, dirigées par des brahmanes, vécurent alors sans trop se mélanger avec les autochtones, car brahmanisme obligeait.

 

Pour préserver leur ''pureté'', les créateurs des castes n'avaient de relations avec les indigènes que contraints et forcés. C'est-à-dire pour des raisons essentiellement économiques mais aussi de … repeuplement … si la communauté hindoue ne voulait pas mourir faute de naissance !...

 

Alors dans ces deux cas, et peut-être aussi quelques autres, les brahmanes ne fréquentaient que … les ''élites'' locales !...

 

 

Lors de ces ''commerces obligés'' les élites, c'est-à-dire les chefs des chefferies dominantes, découvrirent alors la culture brahmanique et l'adoptèrent pour des raisons de ''modernité''.

 

Le peuple quant à lui continua à vivre avec ses anciennes pratiques et croyances, auxquelles le bouddhisme fera le meilleur accueil.

 

 

                                      

 

 

Carte de l'Indochine vers les IVe et Ve siècle.

 

 

 

(*) La première hindouisation du sud-est Asiatique, qui va durer du Ier au IIIe siècle de notre ère, correspond aux débuts d'un commerce maritime en voie d'expansion avec le sud de l'Inde.

 

Les implantations de colonies hindoues en Indochine, nécessaire au développement de ce trafic maritime, bénéficieront surtout au Founan, un royaume qui occupait alors l'extrémité de la péninsule indochinoise, autrement dit la Cochinchine d'aujourd'hui et largement au-delà.

 

Du côté hindou il va profiter à la dynastie des Pallava (Environ de 225 à 800 après JC). Cette dynastie des Pallava  (*) va régner sur une grande partie de l'Inde du sud-est à partir de l'avènement de Mahendravarman 1er (vers 580/630). Un règne qui est à l'origine d'un âge d'or artistique et architectural. Les temples sont alors creusés dans la roche (**) puis sous les règnes suivants vont s'élever du sol en forme de colossaux monuments qui vont être, d'une façon ou d'une autre, comme les ''inspirateurs'' d'Angkor ?!...

 

(*) Il ne faut pas confondre la dynastie des Pallava d'obédience hindouiste du sud de l'Inde, avec celle des Pala, (750 à 1174) une dynastie bouddhiste du nord-est de l'Inde, dont nous avons déjà parlé avec Naraka.

 

(**) Ces temples, dits rupestres, sont construits sans brique, sans bois, sans métal et sans mortier contrairement à tous ceux qui les ont précédés. Ils sont donc les témoins d'une révolution technique et artistique dans l'art de la construction.

 

 

La deuxième hindouisation se fait deux siècles plus tard, environ. C'est-à-dire lors des IVe et Ve siècle.

 

Comme le Brahmanisme tenait alors le haut du pavé en Inde, la vague migratoire n'était donc pas consécutive à des persécutions, mais bel et bien pour des raisons commerciales. 

 

Les marchands hindous cherchaient-ils de nouveaux débouchés, des matières précieuses comme de l'or dont ils étaient venus à manquer ?...

 

Bref, toutes les hypothèses sont permises et les historiens sont là pour mettre en lumière ces zones d'ombres.

 

 

Toujours est-il que, d'après Georges Cœdès, ces nouveaux arrivants, qui comptaient nombre de brahmanes parmi eux, étaient soi-disant ''plus instruits'' que les précédents. Alors ils vont transmettre aux élites du Founan, entre autres choses, leurs légendes, leurs techniques, leur alphabet, leur religion et … leurs fêtes !...

 

 

 

 

Sur le continent du sud-est Asiatique, la civilisation Khmère est celle qui nous a laissé les plus beaux témoignages de l'adoption de la culture hindoue d'alors. 

 

 

Mais tandis que les Khmers sublimaient la culture hindoue au point de créer une remarquable civilisation, qui atteindra son apogée dans le courant du XIIe siècle,  tout au nord de leur empire des migrants T'aïs, descendus du sud de la Chine depuis environ le Ier siècle et s'étant établis, alors que d'autres poursuivaient leur avancée, allaient contester leur autorité, s'autoproclamer indépendant et faire de la ville khmère de Sukhothai une cité-état vers 1238.

 

 


 

 

Quelques uns des chefs-d'œuvre de la culture khmère.

 

A gauche : Un temple de Roulos, le ''Preah Kô'' ou le temple du ''bœuf sacré''. Il fut consacré en 879 et inaugure la tradition des temples dédiés aux ancêtres.

Au centre : le monastère bouddhique de ''Ta Prohm'' ou ''l'ancêtre Brahma''. Ce temple qui date du milieu de XIIe siècle a été construit à la gloire des parents divinisés.

A droite : Quelques uns des cinquante quatre génies situés de part et d'autre de la porte sud donnant accès à Angkor Thom.

 

 

 

Autrement dit lorsque le T'aï Ramkhamhaeng prend la succession de son frère sur le trône de Sukhothaï quelques années après ''l'indépendance'', vers 1277, les fêtes qui sont célébrées dans son royaume sont ni plus ni moins celles que fêtaient les Khmers.

 

 

Alors lorsque Adhémar Leclère (1853-1917) (*) rapporte dans l'un de ses livres qu'un ''… manuel d'éducation siamoise enseigne que toutes les fêtes célébrées en cours d'année proviennent des brahmanes parce que dans le temps passé la plupart des brahmanes étaient professeurs en notre pays … '' c'est vrai, mais il y manque la précision que nous venons d'apporter.

 

Les fêtes siamoises sont bien d'origine hindouiste, mais via les Khmers. Elles font parti des us et coutumes Cambodgiens que les Siamois ont repris à leur compte.

 

Il n'est pas toujours facile de reconnaître ce qu'on doit à un voisin, surtout  quand on ne le porte pas vraiment dans son cœur, mais les faits sont les faits et l'histoire est ainsi n'en déplaise aux intéressés ?!... (**)

 

 

(*) Adhémar Leclère (1853-1917) commença sa carrière comme ouvrier-typographe. Après avoir été journaliste et créé de nombreux journaux il est nommé administrateur colonial au Cambodge où il restera durant 25 ans. Ce militant socialiste finira sa carrière comme ''résident de France'' à Phnom Penh.

Sa façon d'agir ne sera pas toujours du goût de certains coloniaux … colonisateurs, par contre les autochtones l'apprécieront !....

Comme c'est un passionné et un curieux il va s'intéresser au Cambodge et écrire de nombreux ouvrages à son sujet.

A la parution de ses livres les critiques de l'EFEO se montreront souvent sévères. Car Adhémar Leclère n'est pas véritablement l'un des leurs, c'est-à-dire un ''initié'' des choses touchant à l'orientalisme   '' … certaines erreurs philologiques où l'entraîne sa connaissance insuffisante du sanscrit et du pali … '' sont quelques unes des remises en place qui lui sont signifiées.

 

Il n'empêche que, malgré les critiques de ces auteurs que j'ai néanmoins plaisir à lire, Monsieur Adhémar Leclère a produit tout une série de témoignages qui sont, non seulement très intéressants mais, d'une valeur inestimable sur le Cambodge d'alors.

 

(**) Les Siamois, qui deviendront les Thaïlandais, doivent beaucoup aux Khmers et ils semblent ne jamais leur avoir pardonné.

Ainsi l'alphabet Thaï, par exemple, qui est attribué à Ramkhamhaeng (*) est dérivé de l'alphabet Khmer qui lui-même vient de l'alphabet Vatteluttu. Un alphabet que les brahmanes venus du sud de l'Inde ont apporté au Cambodge.

 

L'alphabet thaïlandais n'est donc pas un alphabet issu directement de l'alphabet hindou, mais indirectement. Il en va de même pour les fêtes et … pratiquement tout le reste !....

 

De leur côté les Cambodgiens ne sont pas les derniers pour honnir les Thaïlandais. Ainsi, par exemple, ils ont fait de l'arrêt du 15 juin 1962 rendu par la Cour de La Haye une fête, pour ne pas écrire une ''journée de victoire nationale'', qu'ils appellent la journée de Préah Vihear.

 

Ce 15 juin la Cour de La Haye avait jugé que le temple de Préah Vihear appartenait au patrimoine Cambodgien et non Thaïlandais.

Le temple en question se situe au Cambodge, tout en haut d'une falaise, mais n'est accessible que du côté … Thaïlandais !.... ce qui laisse présager que le 15 juin n'est pas une victoire mais seulement un … ''cessez-le-feu'' !... confirmé d'ailleurs par une récente actualité avec la reprise des hostilités Khméro-thaïes et quelques morts dont on aurait pu se passer !...

 

(*) Ramkhamhaeng est un peu la Jeanne d'Arc thaïlandaise. C'est-à-dire celui dont on a eu besoin à un moment donné pour bâtir une histoire nationale et créer le sentiment qui s'y rattache.

 

Comme on ne prête qu'aux riches, alors en plus d'être à l'origine de la nation Thaïlandaise il sert d'alibi à bien des thèses qui restent à vérifier. Un faux, qui a berné nombre de spécialistes, à même été sculpté, c'est la fameuse pierre de Ramkhamhaeng, (*) pour apporter plus de crédit au personnage et à son œuvre.

 

Entre 1850 et 1910 les Siamois ont eu recours à bien des subterfuges  pour tenter de se mettre sur un pied d'égalité avec les occidentaux. Il fallait alors contrecarrer leurs appétits territoriaux.

 

Qui, dans leur situation, n'aurait pas fait de même ?!...

 

Michelet et ses pairs ont bien sortis Jeanne d'Arc, que tout le monde avait oublié, à une époque ou la France avait besoin de ''resserrer les rangs''. C'est d'ailleurs à cette même époque … seulement … que l'église en a fait une sainte ?!... Curieux non ?!... (**)

 

(*) Si le sujet vous intéresse il existe une chronique le concernant.

 

(**) Jeanne d'Arc, la libératrice de la France, a été élue bienheureuse le 18 avril 1909, canonisée le 16 mai 1920 et nommée patronne de la France le 2 mars 1922, soit presque 5 siècles après sa mort en 1431 !... Entre 1909 et 1920 il y a eu la guerre de 14-18 ?!...

A noter que Jeanne d'Arc fut aussi récupérée par Jean Jaurès … un homme de gauche … je crois ?!... Elle n'appartient donc pas qu'à la droite.

 

 

 

 

Les Khmers faisaient commencer leur année en octobre-novembre. Le premier mois en était Kārttika. (*) Et lors de ce mois il y avait la fête du nouvel an et la fête de Kārttika qui correspond à … la fête des lumières ou … Loy krathong !....

 

 

(*) A l'heure actuelle le nouvel an bouddhiste est célébré à la pleine lune de Vissak, c'est-à-dire en avril ou mai.

 

 

 

 

 

Quelques kratongs !.... Regardez bien celui du centre. Ce sont des feuilles de bananier pliées repliées et rerepliées et … etc… etc … !...

 

 

 

Autrefois, et encore maintenant au Cambodge, les fêtes ne manquaient pas. En plus des fêtes annuelles dont Caitra une autre fête d'équinoxe, il y avait aussi les fêtes mensuelles de pleine lune, cinq manifestations particulières qui portaient le nom de ''pancotsava'' et s'étalaient dans l'année, et de multiples célébrations exceptionnelles.

 

Ces solennités, qui duraient plusieurs jours, réunissaient en général tous les clergés, sauf quand il s'agissait de célébrer un événement propre à un seul culte. Car en dépit de certains heurts à certains moments ou époques, les cultes hindouistes et bouddhistes ont relativement vécu en bonne intelligence au Cambodge.

 

 

Concernant la fête de la pleine lune de Kārttika, ou la fête du retrait des eaux Adhémar Leclère, dans sa chronique intitulée ''La fête des eaux à Phnom Penh'' et parue dans le IVe volume du BEFEO de 1904, commence par préciser que … '' … la cérémonie est présidée par un bakou ou prâhm (Brahmane) à l'exclusion des religieux du Bouddha. Cela semble indiquer son origine brahmanique '' … puis il enchaîne en écrivant

'' La fête des eaux a quatre parties…. La quatrième, se nomme …le thvo bǒn loi pratip ou fête des feux flottants que les Siamois appellent Sāt loi kathǒng…

 

Loi pratip commence par un défilé … de pirogues chargées de représentations d'animaux de toutes sortes et de grandeur nature en papier, de vraies lanternes vénitiennes éclairées à l'intérieur par des bougies. ''.

 

Il poursuit … '' … autrefois, il y a quelques années à peine, le peuple lançait par milliers des petites embarcations en feuille ou en tronc de bananier chargés de gâteaux de riz, éclairées par des bougies et des baguettes odoriférantes et tous s'adressant aux esprits des aïeux venus à la fêtes joignaient les mains en disant « allez aux pays aux champs que vous habitez, allez aux montagnes aux pierres aux arbres qui vous servent de résidence, allez retourner au mois à la saison au temps. Vos fils et vos petits enfants pensent à vous. Alors vous reviendrez … vous reviendrez. ''

 

Ce sont les âmes des ancêtres du peuple Khmer munies de vivres avec des torches pour éclairer leur route qui retournent aux pays mystérieux où elles attendent soit dans le bonheur soit dans la détresse mais toujours dans l'espérance le jour de leur renaissance. Et il ajoute, entre parenthèses, ... (Là encore aucun moine bouddhiste ne prenait part à cette cérémonie.) ?!...

 

 

D'après Louis Finot, (1864-1935) (*) la fête des eaux serait la réunion de plusieurs rites originairement indépendants.

1/ La fête des offrandes de nourritures aux morts.

2/ La fête de la sortie de Vassa (Carême bouddhiste.) terminée par le départ des morts sur de petits radeaux, loy pratip.

3/ la fête royale des courses de pirogues.

 

 

(*) Louis Finot fut le créateur de l'EFEO, l'école Française d'Extrême Orient.

 

 

 

Ces deux témoignages vont donc dans le même sens.

 

 

Maintenant, avec la deuxième partie, voyons plus précisément comment ces fêtes ont été ''récupérées'' par les Siamois avec la légende de Nang Nophamas.

 

Une légende qui met en scène une reine de Sukhothaï, Nang Nophamas (นางนพมาศ)  laquelle aurait été à l'origine de toutes les manifestations de Loy krathong connues aujourd'hui en Thaïlande !...



11/02/2011
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