MerveilleuseChiang-Mai

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PHRA BOUDDHA SIHING (1) (Le)



                                         LE PHRA BOUDDHA SIHING

                                                           OU

                                 SINHALA DE CHIANG-MAI

 

                                                 

                                                Première partie

 

                                                 

L’image et l’iconographie du Phra Sihing

 

Le Phra Bouddha Sihing c’est tout à la fois une image (*) et une légende. Elles sont intimement liées et indissociables pour l’homme dont la foi s’appuie sur le merveilleux. Mais pour le cartésien que je suis, il y a d’un côté, une image dont l’iconographie (**) permet de la situer dans le temps et dans l’espace ; et de l’autre côté un récit.

 

Ce récit, qui a d’abord été créé pour stimuler la foi des fidèles, et répondre à leur attente de merveilleux, a ensuite été enrichi de faits historiques, parfois fâchés avec l’histoire, pour devenir … une légende.

 

En raison de ce qui précède, et dans les deux cas, je me propose de remettre dans leur contexte l’image et la légende. De ce fait cette première partie ne concernera que l’image de Phra Bouddha Sihing, sa légende ne sera prise en compte que dans la deuxième partie de ce dyptique de chroniques.

 

(*) Une statue anthropomorphe a pour objet d’honorer une personne voire une idée au travers d’une personne, par exemple la statue de la liberté.

Une image de Bouddha, contrairement à la statue lambda, est habitée ; elle a une vie et incarne la présence même du Bouddha, d’où ses pouvoirs et sa puissance d’action. C’est pourquoi, concernant une représentation du Bouddha il vaut mieux employer le mot d’image plutôt que celui de statue.

(**) L’iconographie est la description de l’ensemble des caractéristiques propres à une image : attitudes, gestes, et formes de différents éléments (tête, corps, habit, etcetera.).

 

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Photo 1 : Le Viharn Laï Kham (วิหารลายคำ) du Wat Phrasingh Woramahaviharn de Chiang-Mai où trône le Phra Bouddha Sihing. On aperçoit Phra Sihing dans l’encadrement de la porte. (Photo 2010)

Photo 2 : Le Phra Bouddha Sihing. (Photo du 5 mai 2013)

Photo 3 : Le Phra Bouddha Sihing sur son trône en compagnie de deux autres bouddhas de même iconographie. (Ecole de Chiang-Saen). (Photo du 5 mai 2013)

 

 

En Thaïlande l’image (statue) du Phra Sihing est très vénérée et d’autant plus vénérée que son histoire a parti lié avec la naissance des premiers royaumes t’ais (Phayao - Sukhothai – Chiang-Mai et Ayutthaya.), ainsi qu’avec l’arrivée du bouddhisme en langue pālie, le Bouddhisme theravada. Il est en quelque sorte l’un des symboles forts de la naissance de l’identité thaïe.

 

Par ailleurs, cette ‘’statue‘’ n’est pas qu’une simple représentation du Bouddha Sihing. A la suite de divers rituels la statue du Bouddha Sihing est devenue la forme vivante, c’est-à-dire ‘’l’image‘’, de Bouddha lui même. Alors comme Bouddha elle est détentrice de sa puissance et de sa bienveillance.

 

Cependant, toutes les images de Bouddha n’ont pas les mêmes forces et les mêmes pouvoirs. Certaines ont des ‘’actions‘’ plus puissantes voire ‘’extraordinaires‘’ que d’autres, (*) comme celle, par exemple, de se déplacer dans l’espace.

 

C’est ce que demandera en toute bonne foi, en 1661 le roi Naraï à un sage qui lui répondra, lui aussi en toute bonne foi, par l’affirmative. Le Phra Sihing se déplace dans l’espace. De ce fait Naraï qui venait d’envahir le Lanna aurait emporté à Ayutthaya le Phra Sihing. A l’époque, et encore maintenant, on ne doutait de rien au sujet de Bouddha et de ses images.

 

Bref, à l’époque l’image du Bouddha Sihing était sans … ‘’rival‘’. C’était l’image la plus représentative de Bouddha, c’est pourquoi elle a été copiée mainte et mainte fois parce qu’une copie à l’identique est identique en tout, matériellement et psychiquement ; encore que ce ne soit pas toujours le cas, car réussir la copie d’une image à cent pour cent ne serait pas aussi évident que cela ?!... 

 

(*) Les chrétiens ont des convictions analogues. En principe toutes les statues de la vierge Marie se réfèrent à une seule et unique vierge. Il n’empêche que certaines représentations, comme les vierges noires, sont plus particulièrement vénérées que d’autres ?!.... J’en veux pour exemple la vierge noire d’Orléans, la seule ( ?) que les bombardements n’auraient pas … touchée ?!... comme me disait ma grand-mère pour justifier sa dévotion particulière à cette vierge ?!...

 

 

Quand il est apparu, le Bouddhisme theravada a du composer avec l’animisme local et proposer des rites pour remplacer ceux existants. Au fils du temps, l’image du Bouddha Sihing s’imposa comme étant censée, entre autres prodiges, faire venir la pluie, un symbole de vie par excellence ; car c’est la pluie bienfaitrice qui assure la continuité des cycles agraires, et qui met les populations à l’abri des famines.

 

Ce n’est donc pas par hasard si à Chiang-Mai lors des fêtes de Songkran, le nouvel an Thaï, les Bouddhas Sihing et autres sont sortis des temples pour trouver place dans une procession où la population leur rend hommage au moyen d’offrandes et d’aspersions d’eau lustrale.

 

Pour toutes les raisons qui précèdent, le Phra Sihing est devenu le palladium (protecteur) de nombreuses villes et royaumes ; ainsi par exemple il est l’un des palladiums de Chiang-Mai, de la dynastie Chakri et … de ce fait … de la Thaïlande.

 

Car se sont deux palladiums qui accordent leur protection à la dynastie Chakri et à la Thaïlande. Le premier et le plus connu est le Bouddha d’émeraude ; le second, un peu moins connu, est … le Bouddha Sihing. L’un, le Bouddha d’émeraude, est abrité à l’intérieur de l’ubosot du Wat Phra Kaeo situé dans l’enceinte du palais royal de Bangkok ; et l’autre, le Bouddha Sihing, est logé quelques trois cent mètres plus au nord, dans l’ancien palais du vice roi, le Wang Na Palace (วังหน้า) (Le palais de devant) et plus exactement dans la salle du trône Phuttaisawan (พระที่นั่งพุทไธสวรรย์). Le Wang Na Palace est devenu aujourd’hui, entre autres affections, le musée national.

 

Ces deux palladiums, (Il y en a peut-être d’autres ?...) le Bouddha d’émeraude et le Bouddha Sihing, sont regardés par beaucoup comme complémentaires, ou carrément comme en symbiose, car les images de Bouddha sont considérées comme ayant une vie, comme écrit plus haut.

 

Pour bien comprendre la complémentarité de ces deux Bouddhas il suffit de se reporter à l’emblème de la Thaïlande, à savoir Garuda. Ce dernier est souvent représenté en tenant un ophidien (serpent) dans chaque main. Garuda se rapporte alors aux mythes solaires, c’est le Bouddha d’émeraude ;  et Shesha (Çesha), (*) le roi des ophidiens qui dans la cosmologie bouddhique porte les noms de Paya Nak (พญานาค) ou Muchalinda (มุจลินทร์), symbolise les mythes aquatiques, c’est le Bouddha Sihing.

 

(*) Le sujet de cette chronique n’est pas de traiter de la complémentarité entre ces deux Bouddhas. Cependant je me devais de la souligner, et pour une meilleure compréhension, d’ajouter le commentaire qui suit.  

Garuda et les serpents, ses demi-frères, sont ennemis. Le seul demi-frère avec qui ce n’est pas le cas, c’est le roi des nagas, celui-là même qui protégea Bouddha à plusieurs reprise, Mucalinda, et qui dans la cosmologie indienne servit à baratter la mer de lait.

Les textes Indiens disent que Garuda et Shesha ont des rôles parallèles et qu’ils n’entrent jamais en conflit. Shesla s’identifie aux cycles du temps. Son incarnation est Bala-Rāma dont les armes sont la massue, la charrue et le manche d’une baratte, ce qui nous ramène aux rites et aux rythmes agraires.

 

Dans la cosmologie Bouddhique Shesla porte les noms de Paya Nak (พญานาค), Muchalinda (มุจลินทร์), Mucalinda, Micilinda.

Nota bene : Les deux Bouddhas palladium de la Thaïlande, hier du Siam, viennent de Chiang-Maï c’est-à-dire du … Lanna. Cocasse non ?... Pour être honnête il y a de grande chance pour que le Bouddha Sihing ait été coulé à Sukhothai, mais … il vient de Chiang-Mai ?!....

 

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Photo 1 : Le Garuda dessiné par le prince Naris (1863-1947) (Narisara Nuwattiwongse) des portes de la poste de Bangkok. (Photos du 06.11.2011)

Photo 2 : Une copie du Bouddha d’émeraude occupant une niche du mondop de l’Ubosot du Wat Phrasingh Woramahaviharn de Chiang-Mai. (Photo du 2 mars 2013)

Photo 3 : L’un des Garuda dessiné par le prince Naris situé tout en haut du bâtiment  de la poste de Bangkok. (Photos du 06.11.2011)

 

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                               ‘’Le barattage de la mer de lait‘’

       Une sculpture de l’aéroport Survamabhmi : (Photo d’octobre 2014)

Photo 1 : D’un côté, la tête de Shesla et les asuras (anti-dieux)

Photo 2 : Au milieu le mont Méru avec la tortue (Kurma) incarnation du Dieu Vishnu

Photo 3 : De l’autre côté, la queue de Shesla et les devas (Dieux).

Chacune des parties tire à hue et à dia, alors de la mer de lait vont sortir Laksami, la lune, la vache sacrée Sourabhi etc… etc…

 

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Image 2 : Un certain nombre de villes n’existaient pas à l’époque. Se référer aux cartes d’à côté.

 

Naissance des royaumes t’ais et du Bouddha Sihing.

 

Nous sommes au milieu du XIIIe siècle, les Khmers ne sont plus capables d’assurer leur autorité dans l’ensemble de leur empire. Alors des chefs t’ais s’insurgent et font de leur cité une cité-état libre et indépendante de l’empire khmer. L’ambition aidant, ces nouveaux roitelets, tant pour se démarquer des Khmers que pour galvaniser et souder un royaume naissant vont délibérément se tourner vers le Bouddhisme theravada, sans toutefois abandonné le brahmaïsme, (*) et ainsi, s’ouvrir aux influences Cinghalaises, birmanes et Indienne du sud de l’Inde.

 

La recherche d’alliances est peut-être aussi l’une des raisons de cette … ouverture à l’Ouest, car les Khmers pouvaient très bien se … ‘’ressaisir‘’ et revenir ?!...

 

 

De ce fait le Bouddhisme Mahayana et les normes artistiques khmères vont décliner pour n’être plus … qu’un souvenir. Ils vont laisser place à un bouddhisme se référant à la doctrine Sri Lankaise, et à un art nouveau !... C’est ainsi qu’à Sukhothai va apparaître le Bouddha debout.

 

 

Cependant si les chefs des cité-états font table rase du passé, ils vont devoir se créer une légitimité et trouver les moyens de consolider leur pouvoir. Les reliques de Bouddha et le Bouddha Sihing venant du Sri Lanka vont répondre à ce besoin ; car les reliques étaient (et sont encore) supposées posséder des pouvoirs magiques, et le Bouddha Sihing, de son côté, était censé apporter la prospérité, la sécurité et la protection du royaume qui le détenait.

 

Autrement écrit, posséder le Bouddha Sihing c’était la garantie d’un bel avenir, car c’était posséder le palladium des palladiums (**) ; c’était posséder l’exceptionnelle et unique image de Bouddha, réalisée d’après Bouddha en personne … ou presque, il y a des siècles à Lanka ; une île qui était alors dépositaire de l’orthodoxie bouddhique de langue pālie.

 

C’est à Lanka qu’a été transcrite en pali et pour la première fois, la doctrine du Bouddha et les commentaires la concernant. Entre le IIIe siècle av JC et le début du XIIe il existait à Lanka trois grandes écoles : le Mahavihara, l’Abhayagiri et le Jetavana. En l’an 1160 le roi Parakramabahu (1123-1153-1186) fait du Mahavihara la seule et unique école orthodoxe du Bouddhisme Cingalais. De ce fait l’école theravada cingalaise devient pour le Bouddhisme theravada la référence des références.

 

(*) Les brahmanes étaient (et sont parfois, encore aujourd’hui) les célébrants de nombreux rites

(**) Plus une image de Bouddha était censée apporter gloire et victoire à un souverain, et plus ce souverain lui rendait gloire de mille et une manières. Cette surenchère d’honneurs réciproques ne pouvait qu’impressionner et renforcer le respect (la superstition aidant) que les sujets portaient  immanquablement à leur roi et au Bouddha concerné.

 

 

Autrefois l’île de Sri Lanka, était appelé ‘’Sinhala-dvīpa‘’ c’est-à-dire l’île des lions, l’île des Cinghalais d’où … l’île de Ceylan. Le Bouddha Sihing en thaïlandais ou Sinhala en Cinghalais, ne signifie donc rien d’autre que : le Bouddha Cinghalais,  ou le bouddha des Lions, voire le Bouddha de Lanka. Le mot ‘’lion‘’ et ‘’Cinghalais‘’ seraient comme des synonymes, (*) mais Sihing pourrait être aussi une altération de Sing qui est une forme abrégée de Sinhala c’est-à-dire Ceylan.  

 

Ce qui précède signifie que toute autre explication concernant ‘’Sihing‘’ ne peut être que fantaisiste, en particulier le fait que les membres de la statue fassent penser à ceux d’un lion comme l’explique Bodhi Ransi de Chiang-Mai ou de Lamphun auteur du Sihinganidana (สิหิงกะนิทาน) ou Sihinga Buddha Nidana, un texte écrit entre 1420 et 1457.  

 

(*) Le Mahavamsa, écrit vers 400 par le moine Mahanama, raconte que l’histoire de l’île de Lanka (Sri Lanka) commence avec sa colonisation par le prince Vijaya (543-505 av JC), le fils aîné du roi Sinhabahu ; un roi dont le nom signifie : ‘’l’homme dont l’extrémité des membres est analogue à celle d’un Lion‘’.

Sinhabahu était l’un des fils de la fille du roi du Bengale, Suppadevi. Cette dernière s’était accouplée … avec un lion-roi, d’où l’aspect physique du roi Sinhabahu !....

Ce passage du Mahavamsa, et de nombreux autres épisodes liés à l’île, confirme l’importance du Lion à Lanka et sa substitution ou superposition, au mot … cinghalais. 

 

 

Le Bouddha Sihing ou Sinhala Bouddha, au XIIIe siècle était, dans les nouveaux royaumes t’ais, et particulièrement ceux du nord (Ce n’est que mon avis), considéré comme une image (Statue) unique en son genre, et aux pouvoirs extraordinaires illimités. Bref, c’était alors un véritable palladium.

 

Il est difficile aujourd’hui d’avoir la preuve de l’existence de cette image d’exception de Bouddha, d’autant que les bouddhas Sinhala (Cinghalais), c’est-à-dire fondus et coulés à Lanka, n’ont jamais cessé de l’être, et qui plus est … sur le même modèle, un modèle unique ; à savoir assis, dans l’attitude Samādhi (สมาธิ), et avec les jambes repliées selon le mode ‘’virāsana‘’.

 

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               Quelques Bouddhas Cinghalais (Ils sont toujours assis)

Photo 1 : Un bronze d’Anuradhapura datant du VIIe ou VIIIe siècle.

Photo 2 : L’un des quatre Bouddhas d’un stupa de ‘’Polonnāruwā Vatadage‘’ (XIe & XIIIe siècle) dont certains pensent que ce stupa aurait été, un certain temps, le sanctuaire de la dent de Bouddha.

Photo 3 : Un bronze d’Anuradhapura datant du VIIIe ou IXe siècle.

     Tous ces Bouddhas ont en commun d’être dans l’attitude Samādhī …

           … et d’avoir les jambes repliées selon le mode ‘’virāsana‘’.

 

 

En Thaïlande d’aujourd’hui, plusieurs images de Bouddha portent le nom de Phra Sihing c’est-à-dire, logiquement, de Phra Sinhala, sous-entendu coulées à Lanka. Autrement écrit, leur nom authentifie leur origine sacré, car toutes ces images seraient censées venir de Lanka considéré alors comme le lieu de l’orthodoxie bouddhique.

 

Or, si ces Bouddhas sont tous assis comme ceux de l’île de Lanka, leur attitude et la position de leurs jambes, pour certains, ne sont pas conformes au modèle Sri Lankais.

 

En effet, certaines des images du Bouddha Sihing ont l’attitude de la victoire sur Māra, (Bouddha Māravijaya), et non l’attitude de la méditation, (Bouddha Samādhi) comme à Lanka ; par ailleurs leurs jambes sont parfois repliées sur le mode ‘’vajrasana‘’ et non ‘’virāsana‘’ comme à Lanka.

 

Il n’en faut pas plus pour réfuter l’origine Sri lankaise de ces Bouddhas dits … ‘’Sihing‘’ c’est-à-dire venant de l’île du Lion.

 

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Photo 1 : Bouddha Māravijaya : Une image de Bouddha dans la neuvième attitude, la victoire sur Māra (Māravijaya) dans le style de l’école du Lanna 1ère période (Ecole de Chiang-Saen) coulée au Wat Pa Siri Panyaram (วัดป่าศิริปัญญาราม) de Sakhon Nakhon (สกลนคร) dans le Nord-ouest. Cette image est la 5ème de la galerie intérieure du Wat Benchamabophit (Temple de Marbre) de Bangkok. (Photo du 6 nov.2011)

Photo 2 : Bouddha Samādhi : Une image de Bouddha dans la dixième attitude, le suprême et complet éveil ou le bouddha en méditation (Samadhī) selon la représentation Cinghalaise.

Photo 3 : Bouddha Māravijaya : Une image de Bouddha dans la neuvième attitude, la victoire sur Māra (Māravijaya) dans le style de l’école du Lanna 2ème période (Ecole de Chiang-Maï) coulée au Wat Phra Bat Tak Pha (วัดพระบาทตากผ้า) dans la province de Lamphun (ลำพูน). Cette image est la 25ème de la galerie intérieure du Wat Benchamabophit (Temple de Marbre) de Bangkok. (Photo du 6 nov.2011).

Photo 4 : Jambes repliées selon le mode ‘’vajrasana‘’.

Photo 5 : Jambes repliées selon le mode ‘’virāsana‘’.

 

Ces détails, et quelques autres considérations, font écrire au professeur M.C. Subhadradis Diskul (1923-2003) (สุภัทรดิศ ดิศกุล) :

- ou cette image (L’image du Bouddha Sihing coulée au Sri Lanka) a vraiment existé mais elle a disparu depuis longtemps et une autre aurait été fondue pour la remplacer,

- ou elle n’a peut-être jamais existé et c’est pour honorer une nouvelle image qu’une légende a vu le jour et a pris corps au cours des siècles.

 

 

En tout cas, rien ne naît de rien. C’est pourquoi d’un fait historique peut naître une légende et … vice versa ?!....

 

De ce fait, Subhadradis Diskul doit avoir raison. Une image a été créée et une légende est née autour d’elle pour en faire une image d’exception aux pouvoirs exceptionnels ; et s’il est difficile de dire comment est née cette légende, il est tout aussi difficile de trouver où et quand est apparue la soi-disant fameuse image de Phra Bouddha Sihing.

 

Toujours est-il que les images de Phra Bouddha Sihing ont été très vénérées entre 1470 et 1689 et qu’aujourd’hui elles ne manquent pas. Cependant trois tiennent le haut du pavé, à savoir le Phra Bouddha Sihing du Wat Phrasingh Woramahaviharn de Chiang-Mai, le Phra Bouddha Sihing de la chapelle Bouddhaisawan du musée nationale de Bangkok et le Phra Bouddha Sihing de Nakhon Si Thammarat.

 

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Photo 1 : Le Phra Bouddha Sihing du Wat Phrasingh Woramahaviharn de Chiang-Mai. Cette image est abritée au sein du Viharn Laï Kham (วิหารลายคำ) (Le Wiharn aux motifs d’or) (Photo 2 mars 2013)

C’est un Bouddha de l’école Lanna et plus précisément de l’école de Chiang-Saen (Sing I). L’attitude est celle de la victoire sur Māra, dite Māravijaya (มารวิชัย) et la position assise celle de ‘’virāsana‘’ (วีราสนะ).

Photo 2 : La copie du Phra Bouddha Sihing de la salle du trône Phuttaisawan s’élevant dans le musée national de Bangkok. Cette copie est aussi l’une des pièces de ce musée.

Cette image, originaire de Chiang-Mai, est de style Lanna, plus exactement de l’école de Chiang-Mai (Sing II). L’attitude est celle de la méditation, dite Samadhi (สมาธิ) et la position assise est celle de ‘’virāsana‘’ (วีราสนะ). (Cette image est proche du modèle Cinghalais et pourrait être le … ‘’fameux‘’ … Bouddha Sihing) (Photo de novembre 2012)

Photo 3 : Le Phra Bouddha Sihing de la sala Klang de Nakhon Si Thammarat.

C’est un Bouddha de l’école de Nakhon Si Thammarat dite école de Khanom Thom ou Khanom Tom

Son attitude est celle de la victoire sur Māra, dite Māravijaya (มารวิชัย) et sa position assise celle de ‘’vajrasana‘’ (วัชาราสนะ). L’habit forme un drapé entre le sol et les jambes – ce détail se voit mieux sur le croquis précédant intitulé ‘’vajrasana‘’. (Photo www.Buddhanet.net)       

 

 

Nota bene : Aucune des trois images ne présente les mêmes caractéristiques, ce qui signifie qu’elles ont été coulées indépendamment, voire en des lieux différents et sans se référer à l’iconographie Sri Lankaise.

 

 

De ces trois images, c’est incontestablement le Phra Sihing de Chiang-Mai le plus connu, sans doute parce que sa légende et son histoire sont relatées dans différents textes concernant Chiang-Mai ou le Yonok. (*) Mais s’agit-il vraiment de celui de la légende ?...

 

(*) La légende du Phra Bouddha Sihing est relatée dans la Jinakālamāli-pakaranam (ชินกาลมาลีปกรณ์) du moine Ratanapañña ou Ratanapanyā thera (พระรัตนปัณณาเถระ), le Tamnān Phra Bouddha Sihing (ตำนานพระพุทธสิหิงค์) de Phra Bōdhi Rangsī (พระโพธิรังสิ), et le Pongsāwadan Yonok (พงศาวดารโยนก).

 

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Une image d’un Bouddha Māravijaya (มารวิชัย) (victoire sur Māra) de Style Lanna et plus précisément de style de l’école de Chiang-Saen comme le Phra Bouddha Sihing de Chiang-Mai. Cette image coulée à Chiang-Mai est la 21ème de la galerie intérieure du Wat Benchamabophit (Temple de Marbre) de Bangkok. (Photos du 6 nov.2011).

 

 

Phra Bouddha Sihing de Chiang-Mai.

(Wat Phrasingh Woramahaviharn de Chiang-Mai)

Cette image (statue) mesure 122 centimètres de haut et aurait été coulée fin XIIIe ou milieu du XIVe siècle. Ce serait la plus ancienne ?!...

En 1922, ce bouddha a été décapitée et sa tête volée. Sa nouvelle tête a été réalisée d’après celles des deux bouddhas qui figurent actuellement à ses côtés et qui seraient de la même époque. (Cependant, l’image de droite ne repose pas sur un lotus, mais à la mode Sukhothaï, c’est-à-dire directement sur un socle ?... alors ?!...)

Cette œuvre d’art a été enregistrée par le département des beaux arts le 8 mars 1935 dans la gazette gouvernementale n° 52 – section 75.

 

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Photo 1 : La tête du Bouddha trônant à droite du Phra Sihing de Chiang-Mai

Photo 2 : La tête du Bouddha Phra Sihing de Chiang-Mai (*)

Photo 3 : La tête du Bouddha trônant à gauche du Phra Sihing de Chiang-Mai

(*) La photo a été réalisée lors des fêtes de Songkran 2015. Phra Sihing était au dehors, en lieu et place de Phra Kruba Si Wichai.

 

 

Ce type de Bouddha relève de l’école du Lanna, une école d’art spécifiquement t’aïe ; comme nombre d’entre eux ont été trouvés à Chiang-Saen et ses proches environs, leur facture s’identifie à une école qui leur est propre, à savoir l’école de Chiang-saen (Sing I).

 

D’après le professeur et prince Subhadradis Diskul (1923-2003) (สุภัทรดิศ ดิศกุล) ce type de Bouddha présente quelques affinités avec le style pāla du Nord-est de l’Inde ; des affinités qui seraient arrivées à Chiang-Saen et ses environs via la Birmanie.

 

Le docteur Surasawasdi Sooksawasdi de la faculté des Beaux arts de Chiang-Mai confirme cette influence du style Pāla du Bengale-Bihar et de l’Orissa (Nord-ouest de l’Inde – l’empire Pāla était très étendu) et précise qu’on trouve aussi dans ce type de Bouddha quelques traits de style propre au Népal et au Tibet comme, par exemple, la forme et l’amovibilité du joyau (bouton floral au-dessus de la tête), ainsi que l’aspect ondulant de la main droite, pour ne citer que ces deux caractéristiques là.

 

Toujours est-il que la présence de ces Bouddhas accrédite l’idée qu’au XIe siècle il y aurait eu autour de Chiang-Saen, quelques principautés indépendantes, (pour Payao c’est certain) et que le bouddhisme Mahayana-Vajrayana avait trouvé droit de cité ; un bouddhisme Mahayana que les môns venus de l’Ouest ou les Khmers venus de l’Est avaient ‘’prêché‘’ ou apporté avec eux. (*) 

 

(*) D’après la Jinakālamāli-pakaranam (ชินกาลมาลีปกรณ์) le roi khmer Sūryavarman Ier (1002-1050), fondateur de la 2ème dynastie des rois d’Angkor, qualifié de ‘’prince guerrier Bouddhiste‘’ (Mahayana) aurait annexé à son empire toute la partie méridionale de la Thaïlande, de Lopburi à Nakhon Si Thammarat, et la plus grande partie du Laos méridional, jusqu’à Luang Phrabang.

Petit ‘’bémol‘’ : Historiquement rien n’est moins sûr, le moine Ratanapañña, auteur de la Jinakālamāli s’est ‘’arrangé‘’ avec l’Histoire avec un grand ‘’H‘’.

Au début de son règne Sūryavarman Ier (1002-1050) ‘’partageait‘’, contraint et forcé, son pouvoir et le royaume Khmer avec un rival installé lui à Angkor, Jayaviravarman (1002-1010 ?...).

Il y a une grande chance pour que Sūryavarman Ier fût çivaïte et non bouddhiste, et Jayaviraman, que je soupçonne d’être venu de Nakhon Si Thammara (ce n’est que mon avis que j’expliquerai dans une chronique à venir) Bouddhiste. Ce qui semble possible c’est qu’à cette époque les khmers avaient des marches (avant-postes), plus ou moins assujetties, dans la région c’est-à-dire près de Lamphun (Hariphunchaï).  

Les môns, de leur côté, sont allés au-delà de Vientiane et ont vraisemblablement atteint Chiang-Saen qui devait être alors un grand carrefour fluvial. En tout cas, la région de Chiang-Mai a été l’un des lieux d’affrontements khmers/môns.

Compte tenu de ce qui précède, Mengraï, le fondateur de Chiang-Mai, avait forcément entendu parler du Bouddhisme, mais du Bouddhisme Mahayana avant d’adopter le Bouddhisme … theravada ?!...

 

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Description de ce type d’image (statue) de bouddha : (*)

 

L’école : L’école de Chiang-Saen.

L’iconographie : Bouddha assis - Attitude : Māravijaya – jambes repliées en Vajrasana avec la plante des pieds tournées vers le ciel.

Le visage est rond, légèrement souriant avec un bas, menton y compris, plutôt massif … comme la mâchoire d’un lion.

La chevelure se compose de grosses et de grandes boucles dont la mèche tourne vers la droite, comme dans la coiffure des ‘’nobles‘’ indiens. Le haut de la tête se termine par une protubérance ou ‘’ushnīsha‘’ (usnīna) surmontée  d’un ornement en forme de bouton floral appelé joyau. (**)

 

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L’extrémité des doigts de la main droite remonte légèrement, ondule dit Surasawasdi Sooksawasdi. Le ventre est quelque peu rebondi et sur l’épaule gauche, par dessus la robe (uttarāsanga) repose un très court pan du manteau (sanghāti), lequel se termine comme une queue d’hirondelle ou de poisson.

Le socle sur lequel repose l’image est décoré de pétales de lotus stylisés surmontés de leurs pistils, un fin filet surmonté d’une petite boule.

 

(*) L’école désigne un type de modèles par rapport à un lieu, une époque ou autres. Une école peut servir de référence à de nouvelles créations. Les créations seront alors des images de style, des copies, en opposition avec des images d’époque.

L’iconographie c’est la description de l’ensemble des caractéristiques propres à l’image : attitudes, gestes, et formes de différents éléments (tête, corps, habit, etcetera.). C’est le commanditaire qui détermine l’école et l’iconographie d’une image.)

Le style recouvre deux concepts.

Le premier se réfère aux copies qui sont coulées par rapport à des images d’époque (ancienne). Une copie de style X ou Y peut être très belle mais n’aura jamais la valeur d’une image X ou Y d’époque. Alors attention aux faux.

Le deuxième concept de ‘’style‘’ concerne l’artiste qui va œuvrer sur l’image et y apporter sa note personnelle sans dénaturer l’iconographie.

Ce sont, par exemple, les études stylistiques qui permettent de montrer que la statuaire du Bouddha Sihing a pris naissance au Lanna et qu’ensuite les artistes de Sukhothai, d’Ayutthaya et de Nakhon Si Thammarat ont marqué de leur ‘’empreinte stylistique‘’ cette image, dont le cheminement est contraire à ce que racontent les légendes ?!...

(**) Les lakshana sont des marques spécifiques de Bouddha, 32 au total. Ce ne sont pas des critères de beauté mais certaines, comme l’ushnisha, (Le chignon) sont l’expression d’un pouvoir surnaturel et d’une destinée d’exception.

 

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Photos 1& 2 : Le Phra Bouddha Sihing de Bangkok. L’attitude est celle de la méditation, dite Samādhi (สมาธิ) et la position assise est celle de ‘’virāsana‘’ (วีราสนะ)

Photo 3 : L’image de Phra Chao Kao Tue (พระเจ้าเก้าตื้อ) de l’ubosot du Wat Suan Dok de Chiang-Mai aurait servi de modèle, au Phra Sihing de Bangkok. Cette image, toujours en place, mesure 4 mètres 70 de haut, et aurait été coulée à la demande du roi Phra Muang Kéo (1495-1526) (พระเมืองแก้ว) en 1505 et terminée en 1510.

L’attitude est celle de la victoire sur Māra, dite Māravijaya (มารวิชัย) et la position assise est celle de ‘’virāsana‘’ (วีราสนะ).

Photo 4 : La réplique de la tête du Phra Bouddha Sihing de Bangkok.

 

Phra Bouddha Sihing de Bangkok

(Chapelle Phra-Thinang Phutthaisawan du musée nationale de bangkok)

Cette statue mesure 73 centimètres de haut et aurait été coulée au début du XVIe siècle ?!...

 

Ce Bouddha, ou peut-être un autre ?... après maints voyages se remettait de ses aventures à Chiang-Mai. Ce Bouddha, et pas un autre, a été ‘’emporté‘’ à Bangkok en 1795 par le jeune et unique frère de Rama Ier (1782-1809),  le prince Bovorn Racha Chao Maha Surasinghanart (1744-1803) (สมเด็จพระบวรราชเจ้ามหาสุรสิงหนาท). Ce prince était alors vice-roi de Bangkok, ou uparaja sous le nom de Boonma (อุปราขบุญมา). Il fut aussi l’époux de Chao Sri Anocha (เจ้าศรีอโนชา) la sœur de Chao Kawila, roi de Chiang-Mai ; Chao Kawila fut couronné le dimanche 14 décembre 1802 par … les deux frères, ou ses beaux-frères, Rama Ier et Boonma  ?!...

 

Ce Phra Bouddha Sihing trouvera sa place dans le Phra-Thinang Phutthaisawan construit en 1787. Il s’agit d’une chapelle du palais du vice-roi, devenu aujourd’hui le Musée de Bangkok, les beaux arts et l’université de Thammasat.

 

Cette image a été enregistrée par le département des beaux arts le 14 novembre 1961 dans la gazette gouvernementale n° 78 – section 74. Puis le ministère de l’éducation l’a enregistrée en 1977 comme une importante image de Bouddha. 

 

Description de ce type d’image (statue) de bouddha :

 

L’école : L’école de Sukhothai du groupe IV ou Wat Tra Kuan. (*)

L’iconographie : Bouddha assis - Attitude : Samadhī – jambes : repliées en ‘’virāsana‘’.

Le visage est légèrement ovale, légèrement souriant avec un menton arrondi et non en pointe comme dans les autres groupes.

La chevelure se constitue de petites boucles. Le haut de la tête se termine par une courte protubérance (usnīna) surmontée d’une flamme.

Le professeur Subhadradis Diskul précise que … ‘’le corps du Bouddha et le piédestal sont manifestement de l’art de Sukhothaï. ‘’ .

 

Selon certains spécialistes, dont le docteur Sakchaï Saisingha (ดร. ศักดิ์ชัย สายสิงห์) cette … ‘’image ressemble en tous points à la statue nommée ‘’Phra Chao Kao Tue‘’ (พระเจ้าเก่าตื้อ)‘’ … qui trône sur l’autel de l’Ubosot du Wat Suan Dok, de … Chiang-Mai ?!...

Sauf que : … pour l’image de Bangkok, Bouddha est dans l’attitude de Samādhi, et pour l’image du Wat Suan Dok, Bouddha est dans l’attitude de victoire sur Mara (Maravijaya). Alors, sauf erreur de ma part, ces images ne se ressemblent pas en tous points. (Voir les photos ci-dessus).

 

(*) L’art de la statuaire de Sukhothai se réparti en quatre groupes. Le quatrième, celui qui nous intéresse parce qu’il concerne le Phra Sihing de Bangkok, est appelé le groupe du Wat Tra Kuan parce que les premières images (statues) de ce groupe ont été découvertes dans le dit Wat. Ces ‘’premières‘’ images seraient aussi, vraisemblablement, les premières de l’art de Sukhothai ce qui expliquerait leur variété ou diversité. Elles auraient été influencées tant par l’art Cinghalais que par l’école de Chiang-Saen.

Pour les raisons qui précèdent l’image daterait plutôt de la fin du XIV ou du début du XVe siècle et non du XVIe siècle.

 

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Photos 1 et 2 : Le monument du prince Phra Rajawangbovorn Maha Surasinghanart. Cet édifice est situé dans une enclave de son ancien palais ; il donne rue Na Phra That Alley, devant l’entrée du musée Silpa Bhirasri qui lui, est à l’intérieur de la faculté des beaux arts. (Photo du 6 nov.2011)

Photo 3 : Un portrait du prince Phra Rajawangbovorn Maha Surasinghanart.

 

 

Phra Bouddha Sihing de Nakhon Si Thammarat

(Sala Klang de Nakhon Si Thammarat.)

Cette statue mesure 41 centimètres 5 de haut et aurait été coulée lors du XVIe siècle ?!...

L’ancienneté de cette image lui a valu d’être enregistrée par le département des beaux arts le 27 septembre 1936 dans la Gazette gouvernementale n° 53 – section 34.

 

Ce type de Bouddha relève de l’école Khanom Thom (Khanom Tom) (*) de Nakhon Si Thammarat, une école d’art spécifique au sud de la Thaïlande dont certains écrivent qu’elle pourrait dériver de l’art de Srivijaya, et dont l’une des créations majeure aurait été au Ve siècle une statue de Vishnou.

 

(*) Le Khanom Tom est aussi le nom d’un petit dessert thaïlandais. Il s’agit d’une boule de riz gluant qui a trempée dans du lait de coco et que l’on a enveloppée dans un morceau de feuille de bananier. Un fils végétal maintien l’adhésion de la feuille de bananier sur la boule de riz gluant.

Khanom Tom est aussi le nom d’un soldat, Naï Khanom Tom, un héros Siamois qui au XVIIIe mit hors combat par KO, dix champions birmans. 

 

Description de ce type d’image (statue) de bouddha :

 

L’école : L’école de Khanom Thom (Nakhon Si Thammarat).

L’iconographie : Bouddha assis - Attitude : Māravijaya – jambes repliées en Vajrasana avec la plante des pieds tournées vers le ciel.

Il y a beaucoup de similitudes avec l’image de l’école de Chiang-Saen, mais il y a aussi de nombreuses dissemblances qui font la différence.

Le visage est très rond, le menton souligné, et la chevelure, plus aplatie que gonflante, se compose de boucles moyennes. La protubérance ou ‘’ushnīsha‘’ (usnīna) du haut de la tête est elle aussi comme aplatie et l’ornement en forme de bouton floral appelé joyau, semble enfoncé.

L’extrémité des doigts de la main droite ondule légèrement. Le corps est plus trapu et le bord de la robe (uttarāsanga) est plus rapproché du sein droit. Le pan du manteau (sanghāti), retombant sur l’épaule gauche se termine, certes comme une queue d’hirondelle ou de poisson mais avec, en plus, des surplis ‘’fantaisies‘’.

Le socle sur lequel repose l’image est décoré de pétales de lotus stylisés en forme de pointe.

 

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Photo 1 : Le Phra Sihing de Nakhon Si Thammarat. (L’original) Ecole de Khanom Thom.

Photo 2 : Une copie du Phra Sihing de Nakhon Si Thammarat. (Il y en a beaucoup sous forme d’Amulettes)

Photo 3 : Le Phra Sihing de Nakhon Si Thammarat lors d’un Songkran.

Photo 4 : Une image trouvée sur le net appartenant au musée de l’université du Michigan. Cette image de 41.6 X 32.8 daterait du 15/16e et serait de l’école de Khanom Thom. Sauf erreur de ma part, cette image a toute les chances d’être de l’école Lanna, vraisemblablement école de Chiang-Maï. Les deux raisons, entre autres, qui me font dire qu’elle ne peut pas être de l’école de Khanom Thom, c’est que le visage de l’image n’est pas assez rond et surtout le pan de son manteau (sanghāti) qui tombe sur l’épaule gauche n’a pas de … surplis ‘’fantaisies‘’. (Comparez avec la photo d’à côté, la photo 3.)

 

Outre ces trois images, il faut savoir qu’il en existe d’autres pour lesquelles ‘’on‘’ revendique le ‘’titre‘’ d’être le véritable ‘’Phra Sihing‘’, et qui mériteraient tout autant d’être sur le devant de la scène, en particulier :

1.- Le Phra Bouddha Sihing du Wat Phra Chao Mengrai de Chiang-Mai.

2.- Le Phra Bouddha Sihing du Wat Khok Kham de Samut Sakhon.

3.- Un Phra du musée national Chao Sam Phraya d’Ayutthaya

4.- Le Phra Bouddha Sihing du Wat de Trang qui a été volé ?!....

 

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Photos 1 & 2 : Le Phra Bouddha Sihing du Wat Phra Chao Mengrai de Chiang-Mai. Ces deux photos ont été prises à quelques années d’intervalles et je dois dire que le fait d’avoir peint le lotus en rouge ne relève pas d’une heureuse initiative ?!...

Photo 3 : Le Phra Bouddha Sihing du Wat Khok Kham de Samut Sakhon.

Photo 4 : Un Phra du musée national Chao Sam Phraya d’Ayutthaya. Cette image a été trouvée dans la crypte de la tour principale du Wat Mahathat. Elle daterait de la fin du XIVe et début du XVe siècle. Elle mesure 18 centimètres de haut sur 14 centimètres de large. Serait-ce un Phra Sihing de style Ayutthaya ?.... Il a en tout cas de nombreux points communs avec le Phra Sihing de Bangkok !... (Photo Kaz Tsurata).

 

 

Conclusion :

 

Aucune des images en question ne vient du Sri Lanka, cela est sûr et certain, et tout à fait entre nous, croyez-vous que le roi actuel de Thaïlande Rama IX aurait donné à un suzerain invité à son 60ème anniversaire de règne le Bouddha d’émeraude si l’un de ces souverains le lui avait demandé ?....

 

Donner une image du Bouddha c’est, quelque part, perdre de son pouvoir et de son prestige. Le Sri Lanka devait garder jalousement ses reliques et ses Bouddha-s.

Enfin, si par extraordinaire ce Bouddha a existé, ce dont je doute, il n’en reste plus la moindre trace.

 

 

En résumé pour mieux comprendre la suite (légende) :

 

Dans ce qui constitue aujourd’hui le royaume thaïlandais les premières images en bronze ‘’connues‘’ furent coulées aux environs du XIe et XIIIe siècle. Elles se rapportent, pratiquement et uniquement, à l’école de Chiang-Saen. (Il ne faut pas occulter celles qui ont été retrouvées autour de Chiang-Saen, vraisemblablement dans des cités états disparues et oubliées, et qui dateraient du XIe siècle ?!... )

 

Donc, dans un premier temps, les images furent en pierre et en terre cuite : l’art dvāravatī (VI/XIe siècle - influencée par l’art Gupta Indien et l’art Khmer préangkorien) et l’art de Lopburi (VIIe siècle ville mône, XIe ville Khmère et fin XIIIe ville siamoise) ont sculptée des images en pierre ; l’art d’Hariphunchaï (Lamphun) (VIIIe/XIIIe siècle) a réalisée des images en terre cuite recouverte de stuc (Enduit à base de chaux.). (Quelques images en bronze datant du Xe siècle ont été retrouvées.)

 

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Photo 1 : Un grès dvāravatī du VIIIe siècle de 73 centimètres de haut excavé dans la province de Buriram (N/Est de Bangkok) représentant Bouddha dans l’attitude Maravijaya (jambes en mode vajrasana) – l’iconographie combine des influences locales avec celles de l’art Pala de l’Inde - Musée national de Bangkok (Photo Novembre 2012).

Photo 2 : Art de Lopburi – Style Angkor Vat XIIIe siècle – Bouddha sous la protection du roi des nagas. - Musée national de Bangkok (Photo Novembre 2012).

Photo 3 : Art d’Hariphunchaï – un stuc restauré du Wat Chema Thewi ou Wat Kukut du Chédi – Lamphun. (Photo de 2011)

 

 

Les images en Bronze :

 

Les toutes premières images en bronze relevant d’un art proprement thaï sont de style Lanna et appartiennent au Bouddhisme theravada.

Le style Lanna, qui s’étend du XIe au XVIIe siècle, se divise en deux groupes. Il y a l’école de Chiang-Saen qui fut influencée par le style pâla de l’Inde de l’Est ainsi que par … le Népal et le Tibet, (XIe/XIVe siècle)  et l’école de Chiang-Mai qui elle, fut influencée par l’art de Sukhothai, XVe/ XVIIe siècle)

 

L’art de Sukhothai couvre le XIIIe et XIVe siècle. Il se divise en quatre groupes : le groupe de Sukhothai, qui est le plus commun, le groupe de Kamphaengpet, le groupe du Pra Puttha Chinarat et le groupe du Wat Tra Kuan dont les images de Bouddha ont été influencées par l’art de ceylan et d’où viendrait le … Phra Bouddha Sihing de … Bangkok ?!...

 

 

Par ailleurs il faut rappeler que dans le sud, à Nakhon Si Thamarat (Principauté de Tambralinga – Ligor) les statues brahmaniques et Bouddhiques Mahayana se sont côtoyées un temps durant. Les images du bouddha ont été influencées par l’Inde de l’Est et Angkor d’où nombre de Bouddha protégés par le roi des Nagas. L’un des plus beaux spécimens est le Bouddha trouvé dans la ville de Granit.

Après le XIIe siècle les découvertes archéologiques font la part belle à l’art bouddhique. (D’après D.K. Wyatt de 1130 à 1176 le Tambralinga  aurait été sous le contrôle de l’île de Ceylan ?!...)

 

Alors il y a au Sud de la Thaïlande l’art de Srivijaya avec des bouddha protégés par le roi des nagas, tout à fait au Nord l’art de Chiang-Saen avec des bouddha prenant la terre à témoin (Maravijaya) des bouddha Sihing et … au milieu du royaume l’art de Shukhothai et plus particulièrement l’école du  Wat Tra Kuan qui se serait approprié du Bouddha Sihing de l’école Lanna pour lui donner quelques traits Ceylanais ?!....

 

 

Maintenant que le point a été fait sur les principales images liées à la légende et supposées avoir été coulée au Sri Lanka, je vous propose de découvrir la légende qui, comme toute légende qui se respecte, jongle avec brio et sans souci du vraisemblable avec les mythes, la tradition et les faits historiques. Car en ces temps là, et aujourd’hui encore, plus les récits étaient merveilleux et plus le public … en … redemandait.

 

 

Pour clore cette chronique et mettre votre attention à la question, je vous propose de donner un nom d’école aux différentes images qui vont suivre.

 

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Les réponses :

Toutes les images sont des copies de l’école Lanna, mais d’écoles différentes, sauf la quatrième.

Les trois premières appartiennent à la galerie du temple de marbre à Bangkok et concernent Bouddha dans l’attitude Maravijaya. (Photos du 6 novembre 2011) et la quatrième est exposée au musée de Lamphun. (Photo de 2011)

 

Photo 1 : Cette image est de style Chiang-Saen  (Chevelure et joyau au-dessus de la tête.) et son créateur a su ‘’imprimer son style personnel‘’. Elle a été fondue au Wat Ko Kaeo d’Ayutthaya. (Image n° 15)

Photo 2 : Cette image est de style Chiang-Mai (influencée par Sukhothai – Flamme au-dessus de la tête). Elle a été fondue au Wat Phra Chao Ton  Luang de Phayao. (Image n° 17)

Photo 3 : Cette image est de style Chiang-Mai (influencée par Sukhothai – le visage est allongé). Elle a été fondue au Wat Phra Bat Pha de Lamphun. (Image n° 25)

Photo 4 : Cette image, Phra San Sae (พระ แสนแส) contrairement au trois autres est … d’époque XIV/XVe siècle et semble être de style Chiang-Mai ( ?...). Elle provient  Wat Don Kaew de Lamphun et se trouve aujourd’hui au musée de Lamphun.

 

                                                                                      Jean de la Mainate Avril 2015



30/04/2015
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