MerveilleuseChiang-Mai

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MAISON KALÊ (1/3 & 5/12) : L’EMPLACEMENT DES ARBRES AUTOUR D’UNE MAISON KALÊ - NORD-EST


MAISON KALÊ (1/3 & 5/12) :

 

L'EMPLACEMENT DES ARBRES AUTOUR D'UNE MAISON KALÊ.

 

                                                     Nord-est

 

 

                                              Avertissement :

Cette Chronique et les suivantes concluent une première série de chroniques concernant la maison kalê :

 

          1/ ''Musée des maisons traditionnelles du Lanna 1 & 2 ''

                                          2/ ''La maison kalê ''

 

Alors pour mieux ''goûter'' ce qui va suivre, je vous conseille de jeter un œil sur les chroniques ''Musée'' et ''Maison kalê''. Mais ce n'est qu'un conseil !....

    

 

Pour associer plus intimement le lecteur au contenu de cette chronique il doit savoir que la culture du Lanna est la résultante de trois composantes, l'animiste, le brahmaïsme et le bouddhisme, les deux dernières étant à leur départ, intimement liées.

 

Comme ces trois composantes cohabitent en bonne intelligence, tous les actes sociaux se réfèrent à chacune d'elle en permanence, au point qu'on ne peut dire si c'est l'animisme qui s'est accommodé du bouddhisme ou le contraire.

 

Compte tenu de ce qui précède, la construction d'une maison doit se conformer à un certain nombre de rites, que nous avons détaillé dans les chroniques précédentes ; et les arbres qui seront plantés autour de cette maison ne peuvent l'être qu'en conformité à cette tradition qui découle de nos trois composantes … l'animisme, l'hindouisme et le bouddhisme.

 

     

 

 

Photo 1 : Maison Kalê ''Phaya Wong'' du musée des maisons traditionnelles de Chiang-Mai.

Photo 2 : Schéma d'implantation des arbres de bon augure autour d'un habitat.

Photo 3 : La rotonde de l'angle Nord-est, dont il sera sujet dans cette chronique, du rempart de la ville de Chiang-Mai.

 

 

 

LES PLANTES ET LES ARBRES DE ''MAUVAIS AUGURES'' :

Avant de nous intéresser aux arbres dits de ''bon augure'' il ne faut pas oublier que nos ancêtres ont beaucoup observé la nature. Ainsi, et entre autres particularités, ils ont découvert que l'épanouissement des fleurs était d'une régularité remarquable. De ce fait certaines peuplades se sont servies de ce rythme naturel d'éclosion pour partager leurs journées et leurs travaux.

 

De fils en aiguille nos aînés en sont venus à déterminer que l'emplacement de certains arbres autour d'un village ou d'une demeure contribuaient au bien-être des populations. Inversement ils ont aussi constaté que la présence de certaines plantes affectaient le bien vivre et la prospérité de leurs semblables.

 

Il y a donc des plantes et des arbres qui porteraient bonheur et qui sont dits de bon augure et … des plantes et des arbres qui seraient à l'origine de différents maux et qui sont considérés comme des sujets de mauvais augure.

 

L'observation est l'une des origines de cette mauvaise réputation ; mais il y en a d'autres qui sont moins rationnelles et qui relèvent beaucoup plus de la superstition.

 

Un exemple relevant de la superstition avec le … frangipanier ou plumeria :

 

En Thaïlande, le plumeria ou frangipanier est un arbre qui pousse en nombre près des pagodes (*) mais … surtout pas près d'une demeure, car son ancien nom ''Lane thom'' (ลั่นทม) et en particulier sa deuxième syllabe ''thom'' est un mot qui veut dire maison, souffrance, peine, entre autres qualificatifs !... et lan-thom ressemblerait aussi phonétiquement à un mot qui signifierait … agonie.

 

Bref ce nom a suffisamment de significations négatives qui pourraient déteindre, et faire de la maison un lieu de souffrances et de peines … alors dans l'esprit des gens le plumeria ou le frangipanier est un arbre à éloigner des demeures !....

 

Un autre phénomène joue en la défaveur de cet arbre :

Le frangipanier est un arbre qui peuple les cours des monastères ainsi que les lieux des sanctuaires contenant des cendres de défunts.

De ce fait l'arbre doit être aussi associé à la mort ?!... Ce qui doit ternir son image … encore un peu plus.

 

Pour la petite histoire, Son Altesse royale Maha Chakri Sirindhorn (มหาจักรีสิรินธร), la fille du roi actuel, s'est émue de cette situation, car cet arbre a de très jolies fleurs à l'odeur agréable. Alors elle a rebaptisé le ''Lan-thom'' en ''Lilawadi'' (ลี่ลาวดี). Mais la situation n'a pas changé, les vieilles superstitions ont la peau dure.

 

Au Viêt-Nam ''on'' raconte que le frangipanier est habité par des fantômes de jeunes filles mortes dans leur adolescence. Alors pour leur être agréable des petites balançoires en papiers sont accrochées dans ses branches pour que ces fantômes puissent se balancer et … très certainement ( ?) … laisser en paix les vivants.

 

''On'' dit aussi que les garçons qui veulent revêtir l'habit de moine sont invités à boire la rosée qui, de tôt matin, se forme sur les pétales des fleurs du plumeria. Cet … ''élixir'' du matin aurait la faculté, paraît-il, d'apaiser les ardeurs sexuelles des jeunes gens ?!...  

 

 

(*) Le pluméria vient du Sri Lanka ce qui est une marque de sainteté, d'autant que ses jolies fleurs blanches servent à certains rituels.

En fait le plumeria est endémique d'Amérique centrale et a été importé en Asie du Sud-est via le Sri Lanka.

 

 

    

 

 

                                        Quelques frangipaniers de Chiang-Mai

                     1/ place des trois rois      2/ hotel Holliday Inn       3/ Wat Prasat

 

 

 

Un exemple issu de l'observation avec le rauvolfia cambodiana.

 

En Thaïlande, le ''Kha-yom-luang'' (ะย่อมหลวง) (*) est aussi une plante qu'il est déconseillé de planter autour, ou près, d'une maison parce qu'elle pousse ses racines très loin d'elle. Alors selon les ouï-dire ces dernières endommageraient les maisons et porteraient atteinte aux racines des autres plantes qu'elles ''tueraient'' en les … ''étranglant '' ?!...

 

En fait, cette plante appartient à la famille des apocinaceae et à la tribu des plumériées où figure … le frangipanier. Elle est aussi appelé bois-lait, mais son lait est … toxique !... Ceci explique peut-être cela ?!...

 

 

(*) Le ''Rauvolfia Cambodiana Pierre ex Pitard'' porte en Thaïlande différents noms dont Khayomtinhna (ขะย่อมตีนหนา) en Issan (ภาคเหนือ) ''Rayom'' (ระย่อม) à Trat (ตราด), Khayomluang au Lanna et celui de Nang Yaem (นางแย้ม) à Nakhon ratchasima (นครราชสีมา) ; un nom identique à celui du  Clerodendrum fragrans … au Lanna … ce qui ne facilite pas la tâche du néophyte en botanique que je suis !...

 

 

 

Les exemples liés à la superstition sont nombreux, pour le plaisir, en voici quelques autres que j'ai lus dans l'ouvrage de l'érudit Phya Anuman Rajadhon (1888-1969) (พระยาอนุมานราชธน). Cette … ''collecte'' porte le titre de : ''Quelques superstitions Siamoises à propos des arbres et des plantes ''.

 

Caryota mitis ou Palmier à queue de poisson - tao-ragn (เต่าร้าง) :

Ce palmier a le tord d'avoir sa deuxième syllabe qui signifie : désert, délaissé ou abandonné, des mots qui font peur et pourraient mettre en danger le couple de la maison par le biais d'un … divorce ?!...

 

Clerodendrum fragransnang Yaem (นางแย้ม) :

Cet arbuste odorant prolifère au point d'être envahissant et de causer des dégâts du sol et de son environnement. Consécutivement à ces dégâts les gens sont persuadés qu'en vieillissant l'arbuste se transforme en ''phi'' c'est-à-dire en fantôme qui prend un malin plaisir à perturber la tranquillité de la maison en jetant des cailloux contre elle durant la nuit ; et … ce n'est pas tout.

Nang Yaem pourrait se traduire par ''demoiselle innocente'', une innocence troublante sujette à réveiller quelques fantasmes érotiques chez le premier homme de passage, d'autant que le parfum de la fleur attire plus qu'il ne repousse !....

Par ailleurs, en littérature érotique, c'est Phya Rajadhon qui l'écrit, cette fleur n'est pas la dernière à être cité ?!....

Alors pour la paix des ménages et la mise à l'écart des fantômes mieux vaut ignorer cette ''fleur'' … dont l'innocence n'est pas sans danger pour la fidélité qu'un homme a juré à sa femme !...      

 

Hibiscus (*)chaba (ชบา) :

La fleur de l'hibiscus aurait la beauté du diable, cette beauté perverse qui attire irrésistiblement et dont on ne peut se détourner. Il n'en fallait pas plus pour qu'elle soit (la fleur) comparée à une femme de mauvaise vie dont les appâts attirent les plus vertueux des hommes.

Le vicomte de Chateaubriand raconte que les Natchez, un peuple amérindien, donnaient leur rendez-vous amoureux à l'heure où les fleurs de l'hibiscus se fermaient.

Comme pour renforcer cette image érotique de l'hibiscus, dans les temps jadis en Asie du Sud-est, la femme adultère était mise au pilori avec deux fleurs d'hibiscus rouge coincé entre sa chevelure et le haut de chacune de ses oreilles.

 

Moins érotique, en Inde du Sud il était d'usage de faire porter un collier d'hibiscus à tous les criminels qui se rendait sur le lieu de leur exécution. Les auteurs qui relatent ce fait ne disent pas si ces hommes avaient tué leur femme pour une aventure amoureuse ?!... mais rien n'empêche de l'imaginer.

 

Bref, une femme avisée qui tient à son mari et qui veut lui éviter quelques faux pas doit se faire un devoir (conjugal ?...) d'éloigner cette fleur de la maison familiale.

 

 

(*) L'hibiscus compte plus de 30.000 variétés, et s'est adapté un peu partout dans le monde. Autrement écrit …  femmes de tous les pays vous avez du souci à vous faire si vous cultivez cette fleur dans votre jardin ?!...

 

 

      

 

 

1/ La feuille de Caryota mitis, une espèce de palmier 2/ Clerodendrum Thomson 3/ Clerodendrum philippinum, deux espèces de clerodendrum  4/ hibiscus, l'une des … 30.000 variétés ?!...

 

 

 

Pinus Wallichiana ou le pin pleureur de l'Himalaya – sarakam (สะระกำ) :

Là encore les deux dernières syllabes de ce mot ''ra-kam'' ont pour significations : misère, peine, affliction et … funeste !...

Et, comme si cela ne suffisait pas, les français se sont mis de la partie en qualifiant cet arbre de … pleureur.

Bref un arbre à éviter pour ne pas fondre en larme à longueur de journée.

 

Zalacca ou Salacca (un type de palmier) – sala (สละ) :

Là aussi le mot sala a plusieurs signification dont : abandon, donner, renoncer, sacrifier mais aussi … consacrer ?!...

Néanmoins, malgré le mot ''consacrer'', c'est un arbre à ne pas planter près de chez soi pour ne pas vivre dans le dénuement. Le don doit rester à l'appréciation du donneur !...

 

 

Parfois la donne change. Une plante ''maléfique'' peut devenir ''bénéfique'' ; c'est en tout cas ce qui est en train de se produire avec le …''rak''. Mais lisez plutôt.

 

Calotropis gigantea - rak (รัก) :

Le mot Thaïlandais ''rak'' signifie ''aimer'' et ''chérir''. C'est un mot qui vient de l'indien ''araka''.

Dans les temps jadis les indiens faisaient des guirlandes avec cette fleur qu'ils mettaient autour du cou des criminels se rendant sur le lieu de leur exécution. En Thaïlande, cette fleur était/est utilisée lors des crémations. De ce fait le ''rak'' ne poussait qu'à l'état sauvage, sans doute pour éloigner la mort des maisons.

Aujourd'hui, la signification du mot ''amour'' a repris de sa signification. Ce sont avec des colliers de fleurs de rak dont se parent les couples à l'occasion de leur mariage.

 

 

Outre ces quelques exemples particuliers, il existe une codification en 5 volets concernant les plantes et les arbres à ne pas planter, et encore moins à cultiver, auprès d'une maison pour que ses habitants vivent heureux et connaissent la prospérité.

 

       

 

 

                                                 Calotropis gigantea - rak (รัก)

              1/ son arbuste           2 & 3 / ses fleurs           4/ son fruit et ses graines

 

 

 

Les arbres et les plantes à ne pas planter près, ou autour d'une maison sont classés en cinq catégories :

 

1/ Les conifères : son (สน).

Pin (สนสองใบ) - mélèze (สนลาร์ค) – sapin (สนคริสต์มาส) - cèdre (สนซีชึ่ดาร์) – épicéa (สนสพรูช-ต้นเฮมลอด) - cyprès (สนไซเปรส) et cetera et cetera.

D'après nombre d'auteurs de blogs thaïs l'odeur des conifères provoquerait des douleurs abdominales. Je n'ai rien trouvé à ce sujet. Autrement écrit, leurs assertions restent à vérifier.

Ce qui est vrai, c'est que les conifères secrètent une toxine qui élimine toute vie sous leurs branches. Cette désertification localisée entrerait-elle en ligne de compte ?!...

… ou la tradition chinoise aurait-elle joué un rôle ?...

 

Ainsi, le li-ki (*) raconte que dans la tradition chinoise le cercueil extérieur des princes était en bois de pin, et celui des grands préfets en bois de cyprès. Ces deux arbres, compte tenu de leurs vertus, étaient aussi plantés auprès des tombes pour éloigner un monstre, Wang hiang dont la particularité était de dévorer les cervelles des cadavres ?!...

 

La mort, que la tradition chinoise ''traite'' au moyen de conifères, et la crainte de la mort que ces conifères inspirent aux populations non chinoises seraient-elles liées ?....

 

Pour apporter un peu d'eau à mon moulin, ce qui n'engage que moi : le mot pin en thaï se dit son (สน) et en chinois sōng () ou song-chou ?!... Si la phonétique est presque semblable c'est vraisemblablement parce que les t'aïs ont fait leurs, mais à leur manière, de cette tradition chinoise.   

 

 

(*) Le ''li ki'' est un mémorial des rites des Zhou (1.046-256 av. JC.). Cet ouvrage a subi de nombreux avatars puisqu'il comptait à l'origine 131 chapitres et a fini avec 49 sous les Tang (618-907). Il n'en compterait plus que 27 aujourd'hui ?!...

 

 

 

2/ Le laurier rose : Tonyitho (ต้นยีโถ)

Cette plante, qui peut atteindre les 4 mètres de haut et dont les fleurs sont roses mais aussi rouges ou blanches, est d'une toxicité sans appel en raison des hétérosides cardiotoniques qu'elle contient.

Elle est mortelle par ingestion, contact avec sa sève et inhalation. (Fumée de son bois en combustion).

 

Le fait de dormir sous cet arbuste est dangereux. D'après Wikipédia en 1806, une douzaine de soldats de l'armée Napoléonienne auraient fait les frais de cette grande toxicité. Huit de ces soldats seraient morts pour avoir mangé de la viande rôtie au moyen de broches en laurier rose, et les quatre autres auraient été gravement intoxiqués.

 

En botanique le laurier rose porte le nom de ''Nerium oleander Lin''. Le mot de ''Nerium'' sert à désigner les plantes qui donnent un suc vénéneux. Le laurier rose  appartient à la famille des … apocynaceae. En pharmacopée, employé avec précaution, le laurier rose permet de lutter contre la gale et la dysenterie.

 

En conclusion si les fleurs sont belles elles sont aussi dangereuses pour la santé de tous les êtres vivants sauf … un papillon.

 

3/ Le tulipier : Ton-thiou-lip (ต้นทิวลิป).  

Il existe deux espèces de tulipier, une espèce originaire de Virginie en Amérique du nord c'est le tulipier de Virginie, et une espèce endémique au sud de la Chine, provinces du Yunnan, Guizhou, Shanxi et nord Viêt-Nam, c'est le tulipier de Chine ou ''Liriodendron Chinensis (Hemsley 1886) Sargent 1903'', appelée aussi ''Liriodendron tulipifera var. chinensis''. En fait, dans les deux espèces, les variétés ne manquent pas.

 

D'une façon générale, surtout en Europe où il a été importé, c'est un arbre qui peut  atteindre les 30 mètres de haut, mais qui à l'état sauvage mesurerait entre 50 à 60 mètres.  De ce fait il développe de grosses et longues racines en surface qui ne respectent rien, pas même les maisons, qu'elles soulèvent à l'occasion et … endommagent !...

 

Par ailleurs son bois est tendre, léger et cassant. L'espèce chinensis serait même plus cassante que l'espèce américaine. Comme le bois du tulipier est peu robuste, il n'est pas rare que son tronc cède à un coup de vent et … un tronc d'une trentaine de mètres, même cassant, qui s'abat sur une maison fait … des dégâts.

 

De ce fait la dangerosité de cet arbre se comprend et, sans avoir à chercher des raisons … métaphysiques.

 

J'ai lu dans les blogs thaïs que la toxicité des fleurs du tulipier aurait pour conséquence de favoriser la chute des cheveux ?!... Mais je n'ai rien trouvé confirmant ces assertions.

 

 

4/ Le jasmin de nuit : Ton-ratri (ต้นราตรี) (*) – Ton-yue-lai-xiang (ต้นเยียไหลเชียง) (夜来香) –

 

Cette plante est originaire des Antilles, d'Amérique centrale et du nord de l'Amérique du Sud. Elle a donc été importée en Asie du Sud-est. Linné l'a répertorié sous le nom de : Cestrum nocturnum, mais elle est beaucoup plus connue sous les noms de : ''Queen of the night'', ''Galant de nuit'', et … ''Piayeur'' qui en Guyane sert à désigner les sorciers ensorceleurs et … empoisonneurs.

 

Ces noms suffisent à définir cet arbuste dont la taille ne dépasse pas les quatre mètres mais qui à défaut de s'élever à tendance à se propager et à devenir envahissant.

 

Ses fleurs, blanches ou jaunes, naissent en grappes et ont la particularité de fleurir la nuit. De ce fait elles exhalent un parfum nocturne, d'abord agréable et ensuite insupportable ; en particulier en lieu clos car il donne des maux de tête.

 

Son fruit est une petite baie blanche très toxique à l'instar de toute la plante, racines, tiges, feuilles et fleurs. Les parents avec de jeunes enfants, et/ou les propriétaires d'animaux de compagnie prennent un très grand risque en se laissant séduire par le parfum du jasmin de nuit.

 

Cependant ce parfum a été à l'origine d'une chanson que composa en octobre 1944 ''Li Guang Chiun'' (锦光) et que chanta avec succès ''Li Xiang Lan'' (李香 ). Son titre est 夜来香, ce qui phonétiquement donne … ''yue-lai-xiang'', l'un des noms de cette plante en Thaïlande.

''夜来香'' ''yuelaixiang'' se traduit, à partir du chinois par … nuit, venir et parfum, ce qui pourrait signifier … le parfum qui vient de la nuit.

 

Contrairement aux Thaïlandais les Chinois ont un ''faible'' pour cet arbuste. Pour s'en convaincre il suffit de se promener dans certaines rues de Shanghai qui le soir exhalent le parfum du jasmin de nuit car leurs bords en sont plantés sans discontinuer, en particulier à Xujiahui un quartier moderne et ancien quartier de la concession Française. 

 

Le jasmin de nuit appartient à la famille des ''solanacées'' (solanaceae) qui compte une centaine de genres et plus de 2.700 espèces dont certaines sont alimentaires comme la pomme de terre et la tomate et d'autres utilisées en pharmacopée parce que contenant des alcaloïdes comme … le Cestrum nocturnum Lin.

 

 

(*)Ton-ratri (ต้นราตรี) signifie littéralement : l'arbre de la nuit ou de la soirée. 

 

 

     

 

 

1/  La fleur du ''Nerium oleander Lin'' ou laurier rose - Tonyitho (ต้นยีโถ)

2/ Une gravure du peintre Wallon et Français Pierre Joseph Redoute (1759-1840) du ''Liriodendron tulipifera'' ou Tulipier.

3/ Une petite grappe de fleurs du Cestrum nocturnum ou jasmin de nuit - Ton-ratri (ต้นราตรี) prise à Shanghai.

 

 

 

5/ Les fougères et les lianes : Ton-fèn (ต้นเฟิร์น) & Thao-wan (เถาวัลย์).

Les fougères comptent plus de 13.000 espèces qui se répartissent en plusieurs familles dont les ¾ poussent en régions tropicales.

Les lianes ne constituent pas une famille botanique particulière. Ce sont des plantes dites grimpantes qui appartiennent à différentes familles. Ces plantes grimpantes sont suffisamment souples pour prendre appui, s'agripper ou s'enrouler sur des supports, très souvent des arbres, afin de s'élever pour trouver la lumière … pour la plupart d'entre elles.

Les plantes épiphytes c'est-à-dire vivant en s'accrochant à une autre plante ne sont pas obligatoirement des plantes parasites.

 

D'après les dires populaires du Lanna ces plantes, fougères et lianes, attireraient des insectes vénéneux et nuiraient à la végétation avoisinante.

 

Cette généralité manque de discernement, et serait à nuancer d'autant que la réalité la contredit. Par exemple l'acacia concinna qui au Lanna porte le nom de sompoï (สมป่อย), est un arbre grimpant et … de bon augure. Il trouve sa place au nord de la maison kalê … Cet exemple n'est qu'un exemple parmi d'autres.

 

 

LES ARBRES DE BON AUGURE :

 

 

Avertissement :

 

Au Lanna, et en Asie du Sud-est, de nombreux critères entrent en ligne de compte pour planter un arbre de bon augure, entre autres le calendrier duodénaire (Horoscope chinois).

 

Ainsi il serait plus favorable de planter un manguier dans l'année du buffle que dans celle du Lapin.

Ensuite, le bon développement comme les bonnes influences de ce manguier dépendent aussi du jour et de l'heure de sa plantation.

 

Comme il serait trop long et fastidieux de prendre en considération tous ces critères, alors cette chronique ne concernera que l'arbre et sa position autour de l'habitat.

 

Par ailleurs, comme pour valider ce qu'ils écrivent sur les ''croyances ancestrales'', nombre d'auteurs de blogs thaïs se réfèrent au ''Feng Shui'' (ฮวงจุ้ยเสริม) (*), une œuvre d'origine chinoise, en faisant table rase des héritages animistes, brahmaniques et bouddhiques ?!...

 

J'ai fait le contraire car je pense que les royaumes constituant la Thaïlande, dont le Lanna, (**) doivent beaucoup plus à l'Inde, via les Môns, qu'à la Chine ; ce qui n'éliminera pas ce que j'ai trouvé sur l'influence chinoise, bien évidemment.

 

 

(*) Le ''Feng Shui'' est un traité chinois vieux de plus de 4.000 ans dont l'objet est de développer l'art et la manière d'aménager la nature autour de soi pour un meilleur bien être, une bonne santé et aussi … connaître la prospérité.

En lisant les blogs thaïs, il ne fait aucun doute que la plupart des auteurs s'appuient sur le ''Feng Shui'' sans savoir ce dont il s'agit.

(**) Le Nord Vietnam ou Tonkin, fait peut-être, exception ?!...  

 

 

    

 

 

Image n° 1 : Le plan de la maison kalê ''Phaya Wong'' du musée des maisons traditionnelles de Chiang-Mai.

Image n° 2 : Un ''Mars'' khmer en terre cuite sur son vāhana, un bélier … noir.

Image n° 3 : Le zodiaque occidental avec Mars dans le signe qu'il gouverne, c'est-à-dire le signe du bélier. (Impulsivité – courage – mais sans ténacité.)

 

 

 

Le Nord-Est : (ทิศตะวันออกเฉียงเหนือ)

 

Le Nord-est est une direction de très bon augure.

Dans la maison kalê c'est au Nord-est de la maison ou chambre des parents que dorment les parents avec la tête à l'Est. C'est donc là que réside le Chef de la famille, celui qui la protège.

 

 

Les astrologues qui ont présidé à la naissance de Chiang-Mai ont mis cette direction sous la protection de la planète Mars qui gouverne le signe du bélier.

 

En Inde Mars correspond à la Navagrāha (*) Mangala qui en Thaïlande porte le nom de Phra Ang Khan (ระอังคาร). Mangala appartient à la caste des Kshatriyas, c'est-à-dire des princes et hauts dignitaires détenteurs de l'autorité temporelle dont le rouge les représente. (Les Thaïlandais ont préféré le rose au rouge qui est la couleur du Mardi.)

 

Astrologiquement les plantes associées à Phra Ang Khan (Mardi) sont :

Le bétel (พลู), la courgette (บวบ), le Ylang-ylang (กระดังงา), la rose  (กุหลาบ).

 … et les pierres : Le corail (ปะการัง), le diamant rose (เพชรสีชมพู) et la perle rose (ไข่มุกสีชมพู).

 

 

(*) ''Navagrāha'' littéralement : ''nava'' = neuf et ''grāha'' = saisisseur, preneur, d'où … les neuf saisisseurs ou les neuf planètes.

La ou le ''grāha'' sert à désigner une fonction vitale comme la vue, le souffle, les mains, entre autres, mais c'est aussi le nom d'une coupe servant à des sacrifices ; Dans le cas présent la ou le ''grāha'' est comme un contenant qui appréhende les sens humains, ou qui s'impose aux organes sensoriels des hommes, donc qui les influence dans leur vie. C'est ce que sont censées faire les planètes aux dires des astrologues occidentaux.

 

 

 

Les arbres qu'il convient de planter au Nord-est d'une maison sont :

 

1/ Le Bael (Ma-toume - มะตูม) ou Aegle marmelos (L) Corrêa Serr 1798.

Cet arbre pouvant atteindre jusqu'à 18 mètres de haut est aussi appelé (improprement) ''cognassier du Bengale'', ''pommier du Bengale'', alors qu'il appartient à la famille des rutaceae où sont répertoriés les agrumes et plus précisément le genre … citrus (agrume).

 

C'est l'arbre sacré de Shiva. Il compte parmi les 22 arbres de bon augure. Ses fruits seraient les seins de Lakshmi la parèdre de Vishnou. En sanscrit ils portent le nom de ''sriphala'' ce qui signifie les fruits de ''Sri'', ''Sri'' étant l'un des noms de … Lakshmi. Mais ''Sri'' veut dire aussi ''prospérité''. Au Népal l'arbre participe au rituel destiné à favoriser la fertilité féminine. Entre autres noms sanskrits il y a aussi … Bilva , Śalātu !...

 

Dans la chronique du Mahathera Fa Bot, ce dernier raconte que Bouddha reçu la visite de 500 femmes venues du légendaire continent Utarakhu-dvipa, au nord du mont Méru en Inde, et qu'elles lui offrirent les fruits du … aegle marmelos.  

 

Les feuilles et les jeunes pousses de l'aegle marmelos sont consommées comme légumes. Ses fruits, ronds ou ovales, d'environ 5 à 7 cm. de diamètre agissent, quand ils sont verts contre les diarrhées, et quand ils sont mûrs contre la dysenterie. L'arbre et ses constituants sont très employés en médecine Ayurvédique. (Ancienne médecine de l'Inde)

 

Noms des fruits du ''bael'' au Lanna : ma-pine (มะปิน) et ma-pissa (มะปีส่า) dans le Nord-ouest du Lanna (Mae Hong Son) ; dans le centre : ma-toum (มะตูม).

 

    

 

 

                                            L'Aegle marmelos (L) corrêa 1800

Planche n° 1 : Cette planche est communiquée par le jardin botanique du Missouri. Elle est extraite du 2ème volume paru en 1798, de l'œuvre en quatre tomes (1795-1819) de William Roxburgh (1751-1815) intitulée ''Les plantes de la côte de Coromandel''.

Photo : Le fruit de l'aegle marmelos. (Photo venant du Net.)

Planche n° 2 : Une œuvre de David Blair extraite de la page 55 du  1er volume d'une série de quatre, paru en 1880 et intitulé ''Plantes médicinales'' de Robert Bentley (1821-1893) et Henry Trimen (1843-1896).

 

 

 

2/ La canne de bambou – phaï-ruak (ไผ่รวก) ou phaï huak (ไผ่ฮาก).

La canne de bambou est originaire d'Inde, de Birmanie, de Thaïlande, du Laos et du sud de la Chine (Yunnan).

Elle appartient à la famille des ''poacées'' (poaceae) (Graminées) dont les bambusées (bambuseae) est l'une des tribus. Cette dernière compte une centaine de genres dont le thyrsostachys et quelques 1.000 espèces dont la siamensis Gamble 1896.

 

La canne de bambou pousse en touffes. Les chaumes (tronc du bambou), qui sont creux et d'un vert grisâtre, ont un diamètre qui varie entre 4 et 8 centimètres, et une hauteur qui fluctue entre 7 et 13 mètres.

Les limbes, feuilles de monocotylédone, sont imparfaits, de forme triangulaire, et longs de 10 à 13 centimètres.

L'inflorescence est un petit épi (épillet) de trois fleurs dont une seule sera fructifère. Cette floraison n'apparaît qu'après une durée de vie de quinze ou trente ans et se conclue par la mort du bambou.

 

 

Les cannes servent à la confection de clôtures, de cannes et de manches de parapluies ou d'ombrelles et a bien d'autres choses.

 

Parmi ses nombreux noms : Thyrsostachys siamensis Gamble (Nom retenu par les botanistes), bambusa siamensis Kurz – bambusa regia Thompson – India bambus – Tiyowa birmane et le bambou des monastères, tous ces derniers noms sont donc, des synonymes.

 

 

Le bambou est symbole de longévité, de jeunesse et de force. Un carillon en canne de bambou tiendrait à l'écart les mauvais esprits.

 

    

 

 

Photos 1 : Un stipe de thyrsostachys siamensis du parc Huai Kaew, près du Zoo.

Photos 2 : Des limbes (feuilles) du même thyrsostachys siamensis.

Photo 3 : Un rideau de bambous, qui semblent être des thyrsostachys siamensis, au Wat Sri Su Phan (วัดศรีสุพรรณ) dans le sud de Chiang-Mai hors les murs.

 

 

 

3/ Le durian (Thouriane - ทุเรียน) ou ''Durio zibethinus Murray 1774''.

Cet arbre qui peut dépasser les 25 mètres de haut appartient à la famille des ''malvacées'' (malvaceae). Cette famille comporte une centaine de genre et plus de mille espèces.

 

Le genre ''durio'' compte à lui tout seul une trentaine d'espèces dont l'espèce ''zibethinus'' et tout autant de sous-espèces.

 

C'est un arbre peu feuillu. Ses feuilles, alternes et simples, de forme elliptique glabre et brillante sur le dessus, mesurent entre 10/15 centimètres de long et 3/4 centimètres de large.

 

Ses fleurs, de couleur blanc-jaune, naissent directement sur ses branches et son tronc. Elles sont hermaphrodites et dégagent une odeur qui attire, pour les féconder, des chauves-souris portant le nom de ''eonycteris spelaea''.   

   

L'arbre fructifie à l'âge de 7 ou 8 ans. Son fruit de forme oblongue, nauséabond pour certains mais d'un gout délicieux, se présente sous l'aspect d'une carapace hérissée de pointes à plusieurs faces, ce qui lui a valu le nom de ''hérisson d'arbre''. Il peut peser de 5 à 7 kilos. C'est un fruit qui ne se cueille pas mais qui se ramasse car il tombe de lui-même à maturité.

 

 

Originaire de l'Inde, de l'Asie du Sud-est et plus particulièrement d'Indonésie (Bornéo & Brunei) de Malaisie et … des Philippines, cet arbre est symbole de fertilité et son fruit est considéré comme le roi des fruits.

 

Les empereurs de Chine en auraient été de grands consommateurs et cela à la grande satisfaction de leurs concubines. Mais, leur était-il possible d'affirmer le contraire sans avoir à le regretter ?... Toujours est-il que ce serait un excellent aphrodisiaque.

 

 

Conclusion :

Les quelques mots qui résument les vertus de ces arbres sont : longévité, jeunesse, force, fécondité et prospérité.

 

       

 

 

                                                       Un durio zibethinus …

              … parmi une plantation du parc floral Ratchaphruek de Chiang-Mai.

         1/ L'arbre 2/ La fleur 3/ Le fruit 4/ La pulpe consommable vendue au détail.

 

 

 

L'astrologie et le Nord-est de Chiang-Mai :

(La maison kalê est une réplique de Chiang-Mai de ce fait le nord-est de Chiang-Mai est symboliquement similaire au nord-est de la maison kalê.)

 

C'est la planète Mars ou la navagrāha Mangala, qui en Thaïlande porte le nom de Phra Ang Khan (ระอังคาร), qui aspect le Nord-est de Chiang-Mai.

 

Mars gouverne le signe du bélier, un signe cardinal et un signe de feu. Mars symbolise un homme dans la force de l'âge, le pouvoir militaire et les armes ; la violence, les épidémies le feu et les incendies.

Le bélier en tant signe cardinal symbolise l'activité et l'initiative ; et en tant que signe de feu, l'enthousiasme, la vitalité et la violence.

 

Mangala appartient à la caste des Kshatriyas, c'est-à-dire des princes-guerriers qui gouvernent et qui se battent pour défendre et/ou étendre leur territoire. Le rouge est leur couleur, c'est celle du sang qui colore tout individu en colère ou pris d'un coup de sang.

 

En Inde Mangala, brandissant une arme au bout de chacun de ses quatre bras, ''chevauche'' un bélier, un animal de couleur noire qui fonce sans réfléchir.

 

En Thaïlande Phra Ang Khan (ระอังคาร) a aussi quatre bras armés, mais la montée de sang du dieu est moins violente. Alors il est de couleur rose, la couleur du mardi, jour de Phra Ang Khan, et chevauche, non pas un bélier, mais un taureau de couleur noire dans l'attente de foncer.

 

 

Le Nord-est de Chiang-Mai porte le nom de Chaeng sri Phum (แจ่งศริภูนิ) c'est-à-dire l'angle de gloire et de prospérité d'une terre digne et respectable. Le nom résume tout.

 

Avant de recevoir ce nom il aurait eu, du temps des Luas, avant le XIIIe siècle, celui de ''Săt'uăng Vieng Lēk'' (1)  c'est-à-dire le quartier de la fortification de fer. En astrologie le fer est le métal attribué à Mars.

 

C'est dans cet angle et ce quartier que Phaya Mengraï (พญามังราย) et ses amis le roi de Phayao Phaya Ngam Mueang (พญางำเมือง) et le roi de Sukhothai Phaya Ramkhamhaeng (พญารามคำแหง), (2) sont venus s'asseoir après avoir inspecté les lieux où la future Chiang-Mai allait se construire ; par la suite Mengraï installa sa résidence et son armée dans ce quartier. (3)

 

C'est aussi à partir de cet angle que la douve fut percée en direction du Sud-est, et de ce fait les terrassiers au travail effectuaient comme une pradakshina autour de la future ville, c'est-à-dire une procession de bon augure, de prise de la ville. (4)

 

 

(1) La chronique du Mahāthera Fa Bot, traduite par Camille Notton, donne à penser que Mengraï aurait édifié Chiang-Mai, non seulement sur les ruines d'une ville Lua, mais pratiquement à l'identique ?!...

(2) Ces trois rois sont statufiés place des trois rois en commémoration de leur pacte d'alliance réalisé sur les bords de la Mé Ing près de Phayao. Il s'agissait alors de faire face aux Mongols qui avaient vaincu Pagan.

(3) Le Wat Chiang Man ou Chiang Mun (วัดเชี่ยงมั่น), le plus ancien de la ville, fut le lieu de la résidence royale, tout à côté s'élève le Wat lam chang (วัดล่ามช้าง) qui se traduit par, lam (attacher, enchaîner) et Chang (éléphant). C'était là qu'étaient retenus les éléphants du roi Mengraï.

(4) Les rois bouddhistes pour prendre possession de leur ville accomplissaient ce rite de pradakshina, tourner autour de, dans le sens des aiguilles d'une montre.

 

 

     

 

 

Photo 1 : La rotonde de l'angle Nord-est vue depuis le nord. (Photo des années 1960).

Photo 2 : Un plan de Chiang- Mai datant du début du XIXe.

L'Angle Nord-est – 1/ La caserne des pompiers – 2/ L'hôtel de ville. En bleu Le plan d'eau aujourd'hui disparu.

Photo 3 : La rotonde de l'angle Nord-est vue depuis le sud. (Photo de 2008, prise lors des travaux de remise en état de la douve.)

 

 

 

Au Nord-est s'élevait, un achapala Nikrot (อชปาลนิโครธ) c'est-à-dire un ficus bengalensis ou Nyagrodha en sanscrit.

L'arbre était la demeure du génie protecteur de la ville. Il symbolisait alors le bras armé de la ville, le bras protecteur et était aussi l'emblème du muang c'est-à-dire tout à la fois de la cité et du royaume. (*)

 

Pour des raisons de superstitions, de trahison et de mégalomanie il fut abattu au grand dam des habitants, (**)  ainsi que le temple voisin.  

 

Courant 1519 ce temple ou Wat Chaï Sri Phum (วัดชัยศรีภูมิ) retrouva droit de cité grâce au roi Phra Muang Keaw (1482-1495-1525) (ระเมืองแก้ว).

 

Il s'appelait alors Wat Pan ta Koen (วัดปันต๋าเกิ๋น) ou Wat Phan ta Koen (วัดพันต๋าเกิ๋น) c'est-à-dire littéralement ''mille – œil – au-delà'' autrement écrit ce Wat remplissait les fonctions d'un mirador magique ou … psychologique dont l'objet était de veiller à la sécurité de la ville et du royaume grâce à la magie de ses yeux dont les regards fixaient et scrutaient l'horizon au-delà de la vue la plus perçante.

 

 

Après son éveil Bouddha médita durant 7 semaines. A chaque méditation il prenait place dans une direction bien précise, mais en faisant toujours face à l'arbre de l'éveil.

 

Le Nord-est correspond à sa deuxième semaine de méditation. En Inde, à Bodh Gaya, le site où Bouddha trouva l'éveil, ce lieu est appelé Animesh lochan chaitya et à Chiang-Mai, au Wat Chet Yod, où a été reproduit ce site il a pour nom ''animis Chedi'' (อนิมิสเจดีย์ดปันต๋า) c'est-à-dire le chédi des yeux ouverts ou le chédi du regard fixe ?!...

 

Sous Tilokarāja (1441-1487) (พระเจ้าติโลกราชะ) qui fit construire le Chet Yod, il existait au Chedi Luang une force de dissuasion impitoyable. Cette machine de guerre, était constituée de 8 éléphants dotés chacun de super pouvoirs … magiques ou … psychologiques.

 

L'éléphant du Nord-est ''Maghabangvan'' (เมฆบังวัน), moyennant offrandes et formules magiques, était soi-disant capable de masquer la vue aux envahisseurs ; pour cela il changeait le jour en nuit en créant d'énormes et de monstrueux nuages.

 

Il est beaucoup question d'œil et de surveillance au Nord-est !...

Alors est-il nécessaire de rappeler que Mars a pour symbole un vautour ou un coq dont la symbolique est la hardiesse et la vigilance. C'est d'ailleurs en raison de cette vigilance, que tous les clochers de France et de Navarre se terminent par … un coq ou une paire d'yeux de gallinacé qui scrutent en permanence l'horizon pour prévenir la population des dangers … en vue  ?!...

 

Nos ancêtres étaient tout aussi superstitieux que leurs voisins du Lanna.    

 

 

(*) Souvent dans le nom de certaines villes il y a deux fois le mot ''muang'', cette répétition signifie qu'il est sujet d'une part de la ville en question et d'autre part du royaume à la tête duquel se trouve cette ville.

 

(**) Un résumé des faits … ''très résumé'' :

Le roi Tilokarāja persuadé de son invincibilité, (a) et sur les conseils d'un magicien à la solde de ses ennemis, (Le roi d'Ayutthaya) fit table rase de tous les symboles du passé, situés au Nord-est de Chiang-Maï, pour les remplacer par ceux de son ''illustre'' personne.

Pour cela il fit déraciner le Nyagrodha (L'arbre), combler la douve, abattre une partie du rempart correspondant à ce remblaiement et vraisemblablement démonter le temple construit du temps de Mengraï, sauf – peut-être – le chédi de ce temple (?...).

Ensuite, il fit construire sur ces lieux son palais royal.

Il était alors, ''et en toute modestie'', comme le bras armé de la ville en chair et en os.

 

Son petit fils, Phra Muang Keaw, une cinquantaine d'années plus tard en apprenant que les troupes d'Ayutthaya avait occupé Lampang remis les lieux comme du temps de Mengraï, à part la muraille qui fut refaite en briques alors qu'elle était en terre.

De ce fait, faut-il écrire qu'en 1519 le temple du Nord-est fut … reconstruit ou construit ?...

 

(a) Les rois de Chiang-Mai portaient le titre de Chao. Vers 1454, Tilokarāja se décerna le titre de Phra qui alors, à Chiang-Mai, n'était réservé qu'à Bouddha et aux divinités. Tilokarāja se mettait-il sur le même pied qu'une divinité ?!... Je n'ose pas écrire ''sur le même pied que Bouddha ?!...'' et pourtant cela y ressemble beaucoup !.... En tout cas il n'est pas vainc de parler de sa mégalomanie.

 

 

    

 

 

Photo 1 : Le Wat Sri Chai Sri Phum en 2013.

Photo 2 : L'autel du Viharn Sri Chai Phum en 2010.

Photo 3 : Le Wat Sri Chai Phum vu depuis les remparts. A noter que le Chédi est éloigné du Viharn ce qui signifie - peut-être - que le Wat n'a pas été reconstruit à son emplacement d'origine.

 

 

 

Et aujourd'hui ?....

 

Hier comme aujourd'hui le Nord-est a les mêmes prérogatives.

 

1/ Qui mieux qu'un soldat du feu, ou pompier peut veiller sur la sécurité des gens et leur apporter leur aide ?...

 

La première caserne de pompiers, et la plus importante, a été créée à quelques pas de l'angle Nord-est et, elle y est encore ?!...

 

2/ Mangala, le Mars Indien appartenait à la caste des kshatriyas, c'est-à-dire des dirigeants et responsables politiques.

 

L'hôtel de ville de Chiang-Mai, là où se réunissent les responsables politiques de la ville et où travaillent pour le bien de la communauté nombre de fonctionnaires, s'élève … au nord-est de la ville.

 

3/ C'est aussi dans le Nord-est de la ville intra-muros que la croix rouge a élu domicile.        

 

 

4/ Enfin sachez qu'à l'intérieur de l'angle sri Phum s'élèvent aujourd'hui trois magnifiques banians ou ficus religiosa, et entre deux d'entre eux une maison pour l'esprit du lieu, c'est-à-dire ''Sukkhavati'' dont le nom signifierait littéralement ''Bonheur''.

 

Au fronton de la construction, le nom de ''Sukkhavati'' ne figure pas. Il est juste écrit ''sala lak muang chaeng Sri Phum'' (ศาลหลักเมืองแจ่งศรีภูมิ) c'est-à-dire ''La maison de l'esprit de l'angle Sri Phum'', sans autre précision.  

 

Dans la cosmologie bouddhique le ''Sukhàvati'' est le nom de terres situées à l'ouest du mont Méru où règne la paix et la joie (Le bonheur). Ces terres sont le paradis de l'un des cinq buddha ou jina, Amitābha. C'est le lieu où rêve d'accéder tout bon bouddhiste après sa mort car il serait d'accès plus facile que le Nirvana, le paradis des paradis.

 

     

 

 

La caserne des pompiers avec à gauche sa flotte moderne et à droite l'un des tout premiers véhicules de sa flotte d'antan … un ''Renault''.

 

 

 

Conclusion : La symbolique du Nord-est de la ville de Chiang-Mai a toujours été la même au fils des siècles et est semblable à celle de la maison kalê. L'infiniment petit se retrouve dans l'infiniment grand et vice-versa en tout cas pour la cosmologie bouddhique.

 

     

 

 

1/ Les 3 ficus religiosas du Chaeng Sri Phum – 2/ Le sanctuaire de l'esprit du lieu ''Sukkhavati'' – 3/ Le sanctuaire de ''Sukkhavati'' vu depuis le haut du rempart.

 

 

 

Pour lire la suite vous reporter à la rubrique :

 

03 CULTURE & TRADITIONS - MAISON KALÊ (2/3 & 6/12)

 

 

 

 



08/04/2014
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