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L'HISTOIRE DU DRAPEAU THAILANDAIS 01

L'HISTOIRE DU DRAPEAU THAÏLANDAIS

     ou

  L'hypothétique aventure du Thong Traï Rong.(*)

 

 (première partie)

 

Rappel historique : C'est aux environs du X° siècle que les premières tribus t'aies, parties du sud de la Chine, commencent à s'installer dans le nord de la Thaïlande d'aujourd'hui.

 

Lentement, mais sûrement, et en quelques deux cents ans, elles vont occuper le centre de l'Indochine.

 

Les Môns et les Khmers, qui étaient là bien avant eux, les ont laissés faire parce que l'espace ne manquait pas, et surtout parce que leur main d'œuvre était des plus précieuses. Des Syams feront partie des troupes de mercenaires des rois khmers et travailleront dans leur administration.

 

Seulement, au cours du temps, les T'aïs se sont organisés. Les petites communautés villageoises, à la tête desquelles régnait un roitelet, se sont alliées entre elles, et sur le dos de ceux qui les avaient accueillis.

 

Cette ''organisation'' s'est d'autant mieux assise que les ''maîtres'' d'alors avaient d'autres chats à fouetter que d'aller se mêler des affaires de ces immigrés.

 

 

Alors, petit à petit, tout un système de vassalités, d'une ''élasticité toute thaïlandaise'' avant l'heure, mais dont la Thaïlande a tiré ses racines, s'est mis en place, ainsi qu'un certain type de rapports hiérarchiques bien définis entre individus.

 

 

(*) Le Thong Traï Rong est la transcription phonétique du mot thaïlandais (ธงไตรรงค์) qui signifie le drapeau aux trois couleurs, ou le drapeau tricolore.

 




Et puis les nouveaux venus ont eu les mêmes besoins en main d'œuvre que ceux qu'ils ont fini par remplacer.

 

Car ces régions étaient à l'époque extrêmement peu peuplées.

 

 

Alors, dès qu'arrivait la saison sèche parce qu'en dehors d'elle il fallait cultiver la terre, (*) les petits suzerains, puis ensuite les grands, partaient en ''guerre'' non pour conquérir des terres dont ils n'avaient que faire, mais pour capturer, ou ramener, de la main d'œuvre chez eux.

 

Pour cette raison, ces guerres ressemblaient beaucoup plus à des razzias, où il fallait faire le moins de victimes possible, qu'à des tueries ou des carnages de types occidentaux.

 

 

Le roi fournissait les armes, souvent très rudimentaires, mais c'étaient à ses hommes de main ou à ses ''guerriers'', (c'est selon !) à se vêtir, à se nourrir et à se payer sur l'ennemi … lorsque l'adversaire était défait !...

 

Comme rien ne différenciait les belligérants entre eux, il fallait que les combattants eussent un signe de reconnais-sance pour ne pas s'entretuer entre alliés, (**) comme un bandeau d'une même couleur autour de la tête ; et qu'ils se ralliassent autour de quelque chose de commun, comme une étoffe de couleur en haut d'un bambou !?...

 

En France, le ralliement au panache blanc du roi Henri IV (1553-1610) est entré dans la légende.

 

 

 

(*) Les villageois étaient tour à tour paysans et soldats, et très certainement meilleurs agriculteurs que guerriers. Lroi n'avait pas d'armée, juste une petite garde.


(**)  Plusieurs petites principautés se regroupaient. Alors les hommes combattant pour un même suzerain ne se connaissaient pas forcément entre eux.

 




Dans le royaume d'Ayutthaya, sous le règne du roi Naraï, (1657-1688) il semblerait que ce fut une étoffe de couleur rouge qui servît aux besoins de reconnaissance et de bienvenue.

 

Car le rouge aurait été la couleur des hauts dignitaires de ce royaume.

 

Mais c'est aussi une couleur dont la propriété est d'être vue du premier coup d'œil, et de loin. Ce n'est pas par hasard si les voitures de pompiers et le matériel d'incendie sont, partout dans le monde, de cette couleur.




                          Une étoffe rouge pour se rallier.


Ce fut très vraisemblablement ce qui fut à l'origine du drapeau siamois.

 

 

Parmi les quelques événements qui relatent l'utilisation de cette étoffe de couleur rouge, mais sans plus entrer dans les détails, il est souvent fait mention par les ''chercheurs d'indices'' de l'incident de 1680 et des missionnaires en partance pour le Ceylan.

 

 

L'incident de 1680 :

 

En Septembre 1680 lorsque le ''Vautour couronné'', un navire de la   Compagnie des Indes Orientales commandé par le capitaine Cornuel arrive à la barre (*) de Bangkok, il arbore le drapeau fleurdelisé de Louis XIV.

 

 

 

(*)   La barre (la Chang-Kou-ta) était une chaîne qui reliait les deux forts s'élevant  de part et d'autre des rives du Chao Phraya.  Lorsqu'elle était tendue, elle empêchait les navires de passer et de remonter vers Ayutthaya.

 




La mission de ce capitaine est de remonter jusqu'à Ayutthaya. (*)

 

Le gouverneur de Bangkok, Phra Sakson Kram, ne trouve rien de mieux pour saluer le navire Français que de faire hisser en haut du fort de Vichayen (Aujourd'hui le fort Wichiprasit.) le pavillon hollandais.

 

En arborant ce drapeau, il croit faire grand honneur à la France. Car à l'époque, la Hollande domine les mers et possède de nombreux comptoirs.

 

Or la France et les Pays-Bas, alliés au reste de l'Europe, après six ans de guerre, viennent tout juste de signer la paix, (**) rétablissant, entre autres, la liberté des mers !...

 

 

Alors, lorsque le capitaine français découvre ce pavillon, il intime qu'il soit remplacé par n'importe quel autre, pourvu qu'il ne fût pas européen.

 

Le gouverneur fait alors hisser une étoffe (?) rouge, et tirer une multitude de salves pour souhaiter la bienvenue aux Français, ce qui a l'art de plaire à ces derniers et a peut-être évité l'incident diplomatique !...

 

 

 

(*) La mission française, conduite par André Deslandes-Boureau, venait chercher les ambassadeurs siamois qui devaient se rendre à Versailles à bord du ''Soleil d'Orient''. Ce navire n'arrivera jamais à bon port. Il sombrera non loin de Madagascar. Le roi Naraï enverra alors une autre ambassade en 1686 qui, elle, arrivera saine et sauve jusqu'à Versailles.


(**)  Le Traité de Nimègue, du 10 Août 1678, met fin aux conflits franco-européens, via la Hollande. Mais en ce temps-là, les nouvelles circulaient au gré des vents. Et si la victoire française commençait à se savoir, les Français, pour ne pas faire échouer l'ambassade siamoise, s'étaient bien gardés d'avouer que la France était en guerre avec les Pays-Bas !...

 




Les missionnaires en partance pour Ceylan :

 

 

Sous le règne du roi Borommakot (1732/3-1758) ou Maha Dhammaraja II, Ayutthaya était un grand centre religieux, au point que le roi de Ceylan, vers 1753, envoya une ambassade pour demander à ce souverain que ses moines vinssent aider les siens à retrouver l'orthodoxie et la pureté du Bouddhisme.

 

Flatté, Borommakot répondit favorablement à cette demande et délégua une dizaine d'entre eux sous la houlette du vénérable  Upali Mahathera.

 

 

Et, d'après un texte de l'époque, il est fait mention de tissus rouges accrochés sur l'embarcation des moines qui les transportait vers leur pays de mission.

 

 

Ces deux témoignages ont survécu au temps ; et ce seraient les seuls qui font état de ''tissus rouges'' quand il s'agit de chercher quelques indices sur l'origine du drapeau thaïlandais.

 

Alors, compte tenu de ces très maigres résultats, et considérant peut-être aussi qu'il avait des affaires plus importantes ou plus vitales à traiter, le Prince Damrong Rajanubhab, (1862-1944) (*) a clos tous les débats en décrétant que le drapeau du Siam devait être à l'origine de couleur rouge, point barre !

 

 

 

 

(*)      Le Prince Damrong Rajanubhab était le frère du roi Chulalongkorn ou Rama V. C'était aussi un érudit et un universitaire de haute volée. Il fut directeur du Département de l'Education en 1890, ministre de l'Intérieur en 1910 et 1912-1915  et Conservateur de la Bibliothèque nationale en 1913, entre autres fonctions.

 




Durant le règne du roi Taksin, (1767/1782) qui chassa les Birmans, réunifia et agrandit considérablement le royaume d'Ayutthaya, puisqu'il l'a pratiquement doublé, un drapeau rouge servait au ralliement de ses troupes.

 

C'est de ce drapeau qu'hérite son successeur, et fondateur de Bangkok, le roi Chao Phraya Chakri ou Rama Ier. (1782-1809)

 

 

Mais sous le règne de Rama Ier, une roue blanche, ou un chakra, (*) est ajouté au milieu du drapeau rouge.

 

Cette modification a été faite en réponse et à la demande du gouverneur britannique de Singapour dont l'amirauté ne pouvait distinguer les navires malais des navires siamois, car tous battaient alors … pavillons rouges.

 

 

 

(*)     On trouve aussi cette ''roue'' ou ''chakra'' au centre du drapeau indien, car elle est un symbole de    pouvoir.

 

Depuis le milieu du XV° siècle, les rois d'Ayutthaya suite aux prises d'Angkor, vers 1352 et en 1432, à l'image des rois Khmers ont développé le culte du ''devarâja''. C'est-à-dire du roi divin ou du roi universel. Ils portaient alors le titre de ''Chakravartin''. C'étaient eux qui avaient entre leurs mains la destinée des hommes, ou qui faisaient tourner la roue de la Loi et de la vie ou le ''dharmachakra-mudrâ''.

 

 Ainsi, par exemple, les sujets siamois n'avaient pas le droit de lever les yeux sur leur souverain, tant son image était sacrée. Ils ne pourront le faire qu'à partir du règne de Rama IV. (1851-1868)

 

 Enfin, le nom même de Chakri, celui de la dynastie actuelle, signifie : le possesseur de chakras, voire le maître des chakras.

 




Entre 1809 et 1824, sous le règne de Rama II, heureux propriétaire de trois éléphants dits blancs, (*) cet animal sacré est placé à l'intérieur de la roue, ou du chakra, pour protéger le Siam, et distinguer les navires royaux des navires privés siamois et autres.





    

   Règne de Rama I              Règne de Rama II

       (1782/1809)                        (1809/1824)

 

 

Entre 1851 et 1868, le roi Mongkut ou Rama IV, décide de désolidariser le chakra et l'éléphant.


Deux drapeaux vont alors apparaître :

 

Un drapeau destiné à la fonction royale, identique à celui de Rama Ier, représentant un chakra sur fond rouge.

 

Et un drapeau destiné à tous les autres besoins, y compris royaux, représentant un éléphant blanc sur fond rouge.


 

Sous le règne de Chulalongkorn ou Rama V, le drapeau ne subit aucune modification. Sans doute le roi était-il trop occupé avec ses réformes et les puissances coloniales qui ne cessaient de ''grignoter'' le territoire de son royaume.

 

 

 

(*) Un éléphant blanc se caractérise par l'albinisme. Mais il n'est pas à proprement parler de couleur blanche comme le sont les albinos.

 

 



Extrait d'une gravure datant : fin XVIII et début XIX° siècle.)

 

La gravure en son entier représente le ''Phra Samut Chédi'', alors sur une île, et la barge royale Phitthayam de Rama V ancrée dans le golfe du Siam, non loin de l'embouchure du Chao Praya.

Le monarque vient rendre hommage aux reliques du Bouddha.

Aujourd'hui  le ''Phra Chédi Klang Nam'' (en souvenir de son passé d'îlien) s'érige près de l'hôtel de ville de Samut Prakan où il a été reconstruit. Tous les ans, en Octobre et durant 9 jours, ont lieu de grandes festivités.

 

Puis vient le règne de Vajiravudh ou Rama VI. (1910-1925)

 

Ce roi, dès l'âge de douze ans, est allé faire ses études en Angleterre. Il va y rester 9 ans, de 1894 à 1903. Il sera enrôlé dans l'Académie militaire de Sandhurst en 1898, et assigné à l'infanterie légère Royale d'Aldershot en 1899. Autant dire qu'il est très imprégné par la culture occidentale, et surtout Anglaise.

 

C'est aussi un artiste, et un homme de goût. Alors, tout en poursuivant l'œuvre de ses deux aînés, les rois Mongkut et Chulalongkorn, il va s'employer à mettre son pays sur le même pied que celui des Occidentaux. Et c'est en toute logique qu'il va chercher à faire du drapeau siamois, ce qu'il pense être un ''égal'' des drapeaux occidentaux.

 

D'abord, vers 1916, il va mettre en valeur l'éléphant en le posant sur un piédestal, en le harnachant et en le changeant de sens. (Au lieu d'être représenté sous son profil gauche, l'éléphant va être montré de son côté droit.)

 

                                     Rama V lors d'une cérémonie

 

   



L'éléphant repose sur un piédestal, il est harnaché, et son ''image'' est inversée. Il est vu, non plus sous son profil gauche, mais sous le droit, et donne l'impression d'aller de l'avant !…

                                      … si les vents soufflent dans le bon sens !...

 



24/08/2009
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