QUAND L’EUPHORIE S’ABAT SUR CHIANG-MAÏ
QUAND L'EUPHORIE S'ABAT SUR CHIANG-MAÏ
Depuis le 11octobre 2003 les ''Khone-Chiang-Maï-s'' sont atteints d'un mal qui répand l'euphorie et qui va grandissant. Et cela à la suite de l'arrivée de deux étrangers pour le moins particuliers dans leur ville.
Ces deux nouveaux résidents, Monsieur Chuang-Chuang, (ช่วงช่วงก็) et Mademoiselle Lin-Hui, (หลินฮุ่ย) âgés respectivement de sept et six ans débarquaient alors de Wolong, une ville de la province chinoise du Sichuan.
Comme prévu ils déposèrent armes et bagages au sein du zoo de Chiang-Maï, où tout était prêt pour leur assurer le meilleur des séjours qui soit.
Les communiqués de presse d'alors précisèrent même de mille et une manières que tout le confort, auquel pouvaient prétendre les nouveaux hôtes, était au rendez-vous.
Cependant ils omirent de préciser s'ils bénéficiaient ou non d'un téléviseur et d'un réfrigérateur, car comme vous allez le découvrir, Chuang-Chuang allait avoir au cours de son séjour de projections privées d'un genre particulier. Mais nous y reviendrons.
Ce couple de Pandas, car il s'agissait de deux ursidés prêtés par la Chine pour dix ans au zoo de Chiang-Maï, en moins de temps qu'il ne faut pour le dire allait mettre Chiang-Maï sous les projecteurs de l'actualité, faire tourner la tête des habitants de la ville, et aussi … remplir les caisses du zoo.
Grâce à Chuang-Chuang et Lin-Hui, selon les dires du directeur de l'établissement, Monsieur Tanapat Pongpamorn, (นายธนภัทรพงษ์ภมร) dès la première année de leur présence au zoo, huit cent mille visiteurs se sont précipités pour leur rendre visite, et ont ainsi laissé quelques trente trois millions de bahts (740.000 euros) dans les caisses du jardin zoologique, du jamais vu !...
Avec le temps l'engouement pour ces nouveaux pensionnaires aurait pu ne pas faire long feu. Mais il n'en fut rien, bien au contraire.
Car la passion causée par ces deux nouvelles personnalités suscita un attachement et une curiosité sans précédent auprès des autochtones qui doivent avoir le cœur tendre et être … un tantinet naïf.
De nouveaux gadgets, comme ces céramiques, apparurent alors sur les étals des marchés, dont ceux du dimanche et de nuit.
Cette … ''toquade'' collective alla même jusqu'à faire oublier les anciennes vedettes du zoo, les koalas, et à faire de l'ombre à … l'éléphant qui fut toujours à Chiang-Maï ce que la tour Effel est à Paris.
D'ailleurs je me demande aujourd'hui, comment Chiang-Maï a pu traverser les siècles sans la présence d'un panda. Et surtout, comment va réagir le commun des mortels lorsque les pandas prendront le chemin du retour ?...
Bref, les pandas étaient traités comme des rois, et considérés comme tels par la population. Alors à ce titre ils se devaient d'offrir un héritier à leurs fans.
Hélas, Chuan-Chuan ne semblait pas porter sur la chose. Et sa compagne ne faisait rien pour le faire changer d'avis.
Autrement dit, les deux pandas menaient une vie de pacha et d'une chasteté irréprochable, au grand dam des midinettes et des vétérinaires ; voire peut-être aussi du directeur du zoo soucieux de maintenir le niveau de ses recettes ?!...
Alors Monsieur Prasertsak Buntragulpoontawee (นายประเสริฐศักดิ์บุญตระกูลพูนทวี) un chef de projet du zoo mit tout en œuvre pour ''stimuler'' Chuan-Chuan et lui apprendre à s'accoupler.
Le brave panda, qui pesait alors 150 kilos, sera d'abord mis au régime pour ne pas écraser sa compagne, qui n'en faisait que 115, lors des futurs ébats.
Ensuite il sera séparé de Lin-Hui, tout en pouvant l'apercevoir, histoire sans doute de lui donner quelques regrets et de lui faire comprendre qu'il ne faut jamais remettre au lendemain ce qui peut être fait la veille.
Enfin il aura droit quotidiennement à des séances cinématographiques pour lui montrer comment ses congénères honorent leur compagne.
Ces films animaliers pour hommes, sont certainement classés ''X'' lorsqu'ils sont présentés aux pandas ?!...
Alors, et tout à fait entre nous, combien d'hommes et de femmes auraient aimé être à la place de Chuan-Chuan !....
Hélas, malgré tous ces efforts forts louables, lorsque Chuan-Chuan retrouva sa compagne ce fut pour se comporter comme par le passé.
A croire que les pandas n'ont pas de libido et qu'ils ne connaissent pas le démon de midi !...
Alors à défaut des moyens naturels, les vétérinaires eurent recours à l'insémination. Mais elle aussi ne donna aucun résultat.
Non seulement Chuan-Chuan n'était pas un chaud lapin, normal puisque c'est un panda, mais son sperme donna à penser qu'il était de mauvaise qualité.
Puis comme un malheur n'arrive jamais seul, fin mai 2009 Mademoiselle Lin-Hui donna des inquiétudes à son entourage.
Et pour cause, le 27 Mai 2009 à 10 heures 39 du matin elle mit bas à la grande surprise générale, y compris des vétérinaires qui l'avaient inséminée le 18 février, et qui par la suite n'avaient pas vu de fœtus lors des écographies.
Photo de gauche : Ce grand jeu de cubes à la gloire du bébé panda se trouvait dans le grand hall du centre commercial ''Central'' (เซ็นทรัล) appelé aussi ''Kat Suan Kaeo'' (กาดสวนแก้ว)
Photo de droite : Cette boîte à lettres se situait devant l'entrée du musée philatélique de Chiang-Maï.
Autrement dit le sperme de Chuan-Chuan n'était pas d'aussi mauvaise qualité que ça, et les vétérinaires auraient pu être priés de retourner à leurs cours.
Mais la joie faisant table rase de tous les griefs, et Chuan-Chuan n'étant pas rancunier, seuls les éléments qui prêtèrent à satisfaction restèrent en mémoire :
1/ Le 1er panda de l'année 2009 était venu au monde.
2/ Pour la 1ère fois un panda né en Asie naissait hors de chine.
3/ Pour la 1ère fois un panda captif voyait le jour en mai, alors qu'en général ils naissent entre juillet et septembre après une gestation de quelques quatre-vingt-dix-sept jours.
Les gens du Lanna, qui adorent les distinctions et les premières places, avaient de quoi se réjouir, trois premières places d'un coup remportées par un avorton pas plus gros qu'un rat, mesurant environ 10 centimètres de long, et pesant tout au plus dans les cent cinquante grammes. (Vous avez bien lu.)
La ville fut en liesse, les journaux doublèrent leur tirage. (Là j'exagère peut-être un peu)
Bref, après avoir appris le sexe de la nouvelle venue il fallut alors attendre cent jours pour en connaître le nom, car la tradition chinoise au sujet de l'appellation des bébés panda est ainsi.
En Chine on ne badine pas avec les traditions. Un nouveau né panda doit attendre cent jours, pas un de plus et pas un de moins, pour recevoir son patronyme.
Alors pour faire patienter les fans, et maintenir la pression, il fut organisé différents concours, avec à la clef des prix dont, entre autres, un séjour à Chengdu la capitale du Sichuan.
L'opération, qui fut menée tambour battant et de mains de maître, commença par un appel aux noms.
Parmi les nombreuses propositions reçues, dix d'entre elles seulement furent retenues.
01 – Kheugn-Aï (เขืองอ้าย) – 02 Ping-Ping (ปิงปิง) – 03 Thaï-Djine (ไทจีน) – 04 Thaï-Phing (ไท่ผิง) – 05 Phing-Phing (ผิงผิง) – 06 Line-Ping (หลินปิง) – 07 Uang-Line (เอื้องหลิน) – 08 Yign-Yign (หญิงหญิง) – 09 Khouane-Thaï (ขวัญไทย) – 10 Youone-Youone (หยวนหยวน)
Dès lors plus personne ne ferma l'œil, et chacun attendait avec angoisse les différents résultats pour tenter de connaître, voire de parier sur le patronyme de leur enfant chérie. (Au Lanna on parie sur tout.)
Une première série d'électeurs, triés sur le volet, optèrent pour quatre noms.
1/ Khouane-Thaï (ขวัญไทย) (génie protecteur Thaï) reçu 1355 voix.
2/ Line-Ping (หลินปิง) reçu 282 voix.
3/ Thaï-Djine (ไทจีน) (Sino-Thaï) reçu 554 voix.
4/ Yign-Yign (หญิงหญิง) (Féminine-féminine) reçu 295 voix.
Enfin le choix du nom de l'ursidée donna lieu à un vote national, qui fut l'objet d'un envoi de quelques vingt deux million de cartes postales, ce qui représente près du tiers de la population thaïlandaise !....
…et à 5 bahts la carte postale, car pour voter il fallait mettre la main au gousset et acheter une carte postale qu'il suffisait ensuite de cocher et d'expédier, plus de cent millions de bahts !....
Avec autant d'argent, et tous frais déduits, les organisateurs pouvaient se permettre d'offrir des prix à leurs votants.
Bref, ''Lin Ping'' fut le nom qui sortit des urnes avec plus de treize million de voix ce qui représente plus de 60% des participants.
Si ''Lin Ping'' l'a emporté haut la main, c'est vraisemblablement parce qu'au Lanna, le mot ''Ping'' (ปิง) correspond très exactement au nom du fleuve qui arrose Chiang-Mai ; et que Lin n'est pas sans rappeler le nom de sa mère, Lin-Hui (หลินฮุ่ย) (en phonétique française Line-Louis)
''Lin Ping'', s'écrit ''หลินปิง'' en thaï et ''林冰'' en chinois.
En Chinois cela signifie ''arbre de glace''. L'idéogramme lin ''林'' correspond à arbre, et l'idéogramme ping ''冰'' à glace.
En Thaï, à ma connaissance, ce n'est qu'une transcription phonétique du mot ou nom chinois. Car je dois avouer que je n'ai pas trouvé de définition me satisfaisant.
Comme le montre cette affiche qui fut en son temps visible tout au long des douves, ''Lin Ping'', ''หลินปิง'' eut droit à la fête du riz (งานสู่ข้าว) ou cérémonie de l'appel des khouanes (*) ''sou-khouane'' (สู่ขวัญ)
(*) Pour en savoir plus à ce sujet lire dans le lexique les 3 chroniques se rapportant à cette cérémonie sous le titre de Khouane et aussi connue sous le nom de baci.
En plus de cette grande ''votation'' comme diraient nos amis Suisses, la naissance de Lin-Ping donna lieu à des réjouissances dont un grand défilé dans les rues de Chiang-Maï et à toute une série de visites éclaires les 4, 5 et 6 juillet 2009.
Ces jours là, le matin entre 10 heures et 11 heures 30 et l'après-midi entre 14 heures 30 et 16 heures, environ cinq mille privilégiés, se succédant par groupe de trente purent admirer entre trois et cinq minutes seulement … leur idole.
Ce furent vraiment des privilégiés, car ces visites se firent à guichet fermé. Autrement écrit il fallait connaître les arcanes de cette vente pour se procurer un billet, ou … y mettre le prix !...
Quand on aime, on ne compte pas, dit le proverbe, alors au diable l'avarice ; et d'autant plus qu'il s'agit par billets interposés d'aider la petite bête à devenir un animal qui prend du poids et … de la place !...
Jugez-en plutôt !...
A cinq mois la panda mesurait 78 centimètres et pesait dix kilos trois cent soixante grammes. Le 27 novembre 2553 (2010) soit à un an et six mois elle atteignait le poids de soixante et un kilos !...
Autrement dit, l'animal a une bonne croissance.
D'ailleurs comment pourrait-il en être autrement puisque pour son anniversaire un gâteau aux fruits, avec trois couches de bambou, contenant des pommes des carottes et tout plein d'autres gâteries lui fut offert avec des jouets en peluche. Lin Ping est gâtée en permanence.
Hélas, ce que les fans oublient c'est qu'en vertu du contrat passé avec la Chine, tout bébé panda né hors de Chine appartient à la Chine et qu'il doit quitter son pays de naissance pour la terre de ses ancêtres dès l'âge de deux ans !....
Ce qui signifie qu'en juin 2011, au plus tard, Lin-Ping aura quitté Chiang-Maï !....
Comment vont alors réagir ses fans ?.... Là est la grande question !...
Des pourparlers seraient en cours pour que Lin-Ping reste avec ses parents jusqu'en octobre 2013 ?...
Mais, n'est-ce pas reculer pour mieux sauter ?....
Seule l'avenir nous le dira !.... et …
Peut-être que d'ici là, la vague d'euphorie sera retombée ?!
La famille Panda devant l'aéroport international de Chiang-Maï. Elle n'agite aucun mouchoir, mais tout laisse à penser qu'elle est là pour souhaiter un bon voyage à tous les voyageurs.
Nota bene :
Si vous désirez en savoir plus sur les pandas il existe un excellent site : http://pandageant.ifrance.com/captivite.htm
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